Augustin-Bernard Mouchot, né le à Semur-en-Auxois (Côte-d'Or), et mort le à Paris, est un inventeur et enseignantfrançais (professeur de mathématiques et de physique dans le secondaire), connu, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, pour ses travaux sur l'énergie solaire dont il a inventé les premiers outils de conversion[1].
Né le [2],[3], Augustin Mouchot est le dernier des six enfants d'un serrurier installé à Semur-en-Auxois[4]. Il fréquente l’école communale de Semur, puis le collège et la faculté de Dijon et obtient son diplôme de bachelier ès lettres en 1845[4]. D'abord instituteur, il enseigne dans des écoles primaires du Morvan, puis à Dijon, avant d'être diplômé en mathématiques en 1852 et licencié ès sciences physiques en 1853 à l'université de Dijon[4]. Il devient professeur et enseigne les mathématiques dans des établissements secondaires à Alençon (1853-1862)[4], Rennes (1862-1864)[5], puis au lycée impérial de Tours[6],[5] (1864-1876[7]).
En 1866, il invente le premier moteur solaire avec un réflecteur parabolique et une chaudière cylindrique en verre alimentant une petite machine à vapeur[8]. Cette machine est présentée à Napoléon III, puis exposée, jusqu'au siège de Paris en 1870, au cours duquel elle disparaît[17].
En 1872[18], une subvention du conseil général de Tours lui permet de travailler à plein temps pour construire un four solaire d'une surface de 4 m2[19] qu'il présente à l'Académie des sciences en [20],[21],[22],[23],[24]. En 1877[25], une subvention du conseil général d'Alger[26] lui permet de construire sur le même principe un « grand appareil de 20 m2 » qui reçoit une médaille d'or à l'exposition universelle de 1878 à Paris[27],[28],[29],[30]. Il reçoit ainsi la Légion d'honneur et la possibilité de continuer ses travaux en Algérie[10],[31]. Ayant créé une entreprise, la Société solaire, pour exploiter ses inventions, il dépose avec son nouvel associé, Abel Pifre, un nouveau brevet en 1878[32].
En , lors de la fête de l'Union française de la jeunesse, Abel Pifre, qui lui a racheté ses brevets entre-temps[33], utilise un récepteur solaire d'Augustin Mouchot pour actionner une machine à vapeur lui permettant d'imprimer un journal sur une presse Marinoni[34],[35], le Soleil Journal[36],[37],[38],[39]. La France a alors une production de charbon insuffisante pour les besoins de l'industrie, ce qui justifie la démarche de Mouchot. Le traité de commerce franco-Britannique de 1860, ainsi que l'amélioration du réseau ferré facilite l'approvisionnement en charbon et accélère le développement industriel. Cela conduit le gouvernement français à estimer, après études[40], que l'énergie solaire n'est finalement pas rentable et à cesser de financer les recherches de Mouchot.
Mouchot retourne dans l'enseignement et publie un livre de mathématique en 1892[41]. Il reçoit le prix Francœur de l'Institut de France en 1891 et en 1892[42].
La fête de la jeunesse aux Tuileries - Tirage du Soleil-Journal par le moteur solaire d'Abel Pifre (basé sur Mouchot) en août 1882.
Insolateur d'Abel Pifre (basé sur Mouchot) qui imprime un journal par chaleur solaire, le 6 août 1882 lors de la fête de l'Union française de la jeunesse.
« […] La solution que Mouchot tenta ensuite combina deux développements solaires qui au cours des siècles précédents avaient évolué indépendamment : le piège à chaleur en verre […] et le miroir brûlant. […] La grande perspicacité de Mouchot a été de lier ces deux approches. Avec le faisceau concentré de lumière solaire, un piège à chaleur en verre pourrait être maintenu à une taille gérable tout en produisant suffisamment de chaleur pour faire bouillir de l'eau en grande quantité. […] Le nouveau dispositif a conduit à plusieurs inventions réussies, dont un four solaire, un alambic solaire et une pompe solaire ainsi que le moteur solaire géant qui a tant fasciné Louis-Napoléon et a généré le soutien financier dont Mouchot avait besoin. […] (p. 155-156) […] 1866 […] Mouchot avait inventé la première machine à vapeur fonctionnant à l'énergie du soleil, convertissant l'énergie solaire en travail mécanique utile. […][50] »
Selon le mathématicien Étienne Ghys en 2018, Augustin Mouchot « a résolu d'intéressantes questions de géométrie[41]. »
Pour le chimiste Daniel Lincot en 2019, il est « un des premiers savants à avoir pris toute la mesure du potentiel immense de l'énergie solaire pour répondre aux besoins de l'humanité[51]. »
D'après l'universitaire Frédéric Caille en 2020, Mouchot est non seulement un « précurseur de premier plan des utilisations thermiques et thermodynamiques du rayonnement solaire », mais il a également envisagé certaines formes de conversion de l’énergie solaire utilisées actuellement[52].
« L'ingénieur Jordan » du roman Travail (1901) d'Émile Zola « ressemble beaucoup à Augustin Mouchot » selon L'Obs[53],[54].
L'Inventeur de Miguel Bonnefoy, Payot et Rivages (2022), roman historique fantaisiste qui raconte de manière provocatrice certains moments de la vie d'Augustin Mouchot.
L'invention de l'énergie solaire. La véritable histoire d'Augustin Mouchot de Frédéric Caille Librinova (2023) est la première biographie détaillée d'Augustin Mouchot.
Marianne Mouchot, arrière-arrière-petite fille du frère d'Augustin Mouchot, et linguiste travaillant pour Larousse, essaye depuis des années de faire entrer son aïeul dans le dictionnaire, en vain, « faute de documentation ». Elle espère que le livre de Miguel Bonnefoy aidera en cela[55]
La Chaleur solaire et ses applications industrielles, Paris, Gauthier-Villars, 1869 [lire en ligne][56],[57],[58],[59] ; Seconde édition « Revue et considérablement augmentée » : 1879 ; rééditée en 1980 par A. Blanchard, Paris, préface de M. Perrot (ISBN9782853670180)[60]
La Réforme cartésienne étendue aux diverses branches des mathématiques pures, Paris, Gauthier-Villars, , 180 p. (lire en ligne)
Les Nouvelles Bases de la géométrie supérieure : géométrie de position, Paris, Gauthier-Villars, , 180 p. (lire en ligne)
↑Appareil dit Héliopompe, destiné à élever les eaux, brevet n° 48622 déposé le 4 mars 1861, Archives de l’Institut national de protection industrielle.
↑Augustin Mouchot, La chaleur solaire, (lire en ligne), p. 214 :
« […] si dans nos climats l’industrie peut se passer de l’emploi de la chaleur solaire, il arrivera nécessairement un jour où, faute de combustible, l’industrie sera bien forcée de revenir au travail des autres agents naturels. Que les dépôts de houille et de pétrole lui fournissent longtemps encore leur énorme puissance calorifique, nous n’en doutons pas. Mais ces dépôts s’épuiseront sans aucun doute […] on ne peut s’empêcher de conclure qu’il est prudent et sage de ne pas s’endormir à cet égard dans une sécurité trompeuse. […] »
↑Éric Le Ray, « Hippolyte-Auguste Marinoni, l’un des fondateurs de la presse moderne (1823-1904) », Documentation et bibliothèques, vol. 51, no 2, , p. 151–157 (ISSN0315-2340 et 2291-8949, DOI10.7202/1030096ar, lire en ligne, consulté le ).
↑Éric Le Ray, « Hippolyte-Auguste Marinoni (1823-1904) », Cahiers GUTenberg, , p. 33-99, article no 43 (lire en ligne [PDF]).
↑ a et b« Etienne Ghys : "J’aime bien les maths quand elles sont partagées" », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ) :
« […] Beaucoup de mathématiciens inconnus ont joué de grands rôles dans leur histoire. […]. On peut citer un mathématicien, Augustin Mouchot, pionnier de l'énergie solaire au XIXe siècle, qui pour la domestiquer a passé sa vie à dessiner de grands miroirs paraboliques et a résolu d'intéressantes questions de géométrie. Ce serait dommage d'oublier ces "inconnus". »
↑Louis Figuier et Émile Gautier, L'Année scientifique et industrielle, L. Hachette et cie., (lire en ligne).
↑Un vieux savant est jeté à la rue, Le Parisien, (lire en ligne).
↑Lionel Dufaux, « Le solaire au Musée des arts et métiers », Cahiers d'histoire du Cnam, vol. 13, , p. 52 (lire en ligne, consulté le ) :
« […] L’appareil se compose de trois éléments : un miroir réflecteur cylindrique ou parabolique plaqué d’argent, qui concentre les rayons du Soleil ; une chaudière en cuivre noirci installée au centre du miroir et contenant le fluide à chauffer ; une cloche en verre recouvrant la chaudière, destinée à emprisonner la chaleur. […] »
↑(en) Frank T. Kryza, The power of light : the epic story of man's quest to harness the sun, McGraw-Hill, , 298 p. (ISBN978-0-07-142595-7, présentation en ligne), chap. 6 (« Augustin Mouchot and the First « Sun Engine » ») :
« […]The solution Mouchot tried next combined two solar developments that over previous centuries had evolved independently: the glass heat trap […] and the burning mirror. […] Mouchot’s great insight was to link these two approaches. With the concentrated beam of sunlight, a glass heat trap could be kept to manageable size while still producing enough heat to boil water in large quantities. […] The new device led to several successful inventions, including a solar oven, a solar still, and a solar pump as well as the giant solar engine that so fascinated Louis-Napoleon and generated the financial support Mouchot needed. […] (p. 155-156) […] 1866 […] Mouchot had invented the first steam engine to run on energy from the sun, converting solar energy into useful mechanical work. […] (p. 158) »
↑« Pourquoi ne pas investir dans des usines photovoltaïques plutôt que dans de nouveaux EPR ? », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le ).
↑Frédéric Caille, « Augustin Mouchot », sur mouchot.hypotheses.org (consulté le ) : « […] Loin d’être pourtant seulement un précurseur de premier plan des utilisations thermiques et thermodynamiques du rayonnement solaire, il envisagera les modes de conversion de l’énergie les plus récemment rediscutés, telles l’électricité thermosolaire ou la décomposition-photolyse de l’eau pour produire de l’hydrogène. […] »
Jacques Borowczyk, La Passion des sciences en Touraine au XIXe siècle, t. XXIII, Mémoires de l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Touraine, (lire en ligne [PDF]), « Le semurois Augustin Mouchot (1825-1912), professeur de Mathématiques et pionnier de L'énergie solaire », p. 143-150
(en) Frank T. Kryza, The power of light : the epic story of man's quest to harness the sun, McGraw-Hill, , 298 p. (ISBN978-0-07-142595-7, présentation en ligne), chap. 6 (« Augustin Mouchot and the First « Sun Engine » »)
De l'inventeur à l'entrepreneur, histoire de brevets, brochure du Musée des arts et métiers, Paris, 2008
Frédéric Caille, « Augustin Mouchot », Carnets de recherche sur Hypothèses, 2020-2021 (lire en ligne)
Chloé Cottour, « Utiliser les rayons du soleil : des appareils d’Augustin Mouchot aux premiers panneaux solaires », Blog Gallica Bnf, (lire en ligne)
François Jarrige, « "Mettre le soleil en bouteille" : les appareils de Mouchot et l'imaginaire solaire au début de la Troisième République », Romantisme, vol. 150, no 4, , p. 85 (ISSN0048-8593 et 1957-7958, DOI10.3917/rom.150.0085, lire en ligne, consulté le )