Avortement sexo-sélectif

Le sex-ratio à la naissance est fortement influencé par les avortements sélectifs.

Un avortement sexo-sélectif est un avortement sélectif, basé uniquement sur le sexe de l'enfant. Cela concerne principalement les fœtus de sexe féminin, dans des pays où les normes culturelles valorisent les garçons par rapport aux filles, notamment en Asie de l'est et du sud ou dans le Caucase et le sud-est de l'Europe[1],[2].

Les avortements sexo-sélectifs affectent le sex-ratio d'une classe d'âge[3],[4]. On estime que le sex-ratio naturel est entre 103 et 107 garçons pour 100 filles. Dans les pays où l'infanticide des filles est pratiqué, la pratique moderne de l'avortement sélectif est souvent abordée comme une question étroitement liée.

Entre 1970 et 2017, le nombre total de naissances féminines «manquantes» est estimé à 45 millions, dont 95% en Inde et en Chine[5].

Définition

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Un avortement sexo-selectif est une sélection de l'enfant à naître en fonction de son sexe[6]. Ce terme et sa définition apparaissent dans la littérature scientifique à partir des années 1980[6].

Détermination du sexe

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À partir d'un échantillon de sang chez la femme enceinte, il est possible de déterminer avec une précision de 98 % le sexe de l'enfant dès la 7e semaine de grossesse, grâce à l'ADN fœtal présent [7],[8].

L'utilisation d'ultrasons dans le cadre d'une échographie à partir de la 12e semaine permet de déterminer correctement le sexe dans 3 cas sur 4, selon une étude parue en 2001[9]. La précision est environ de 50% pour le sexe masculin et 100% pour le sexe féminin. À partir de la 13e semaine, la précision est de presque 100% dans tous les cas [9].

Une amniocentèse permet également la détermination du sexe, mais est plus risquée et plus chère que l'échographie ou le prélèvement sanguin[10].

Disponibilité

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Signe dans une clinique indienne qui rappelle que la détermination du sexe prénatale est interdite (En hindi et en anglais)

C'est en 1979 que la Chine lance la première machine à ultrason, utilisée dans les cliniques chinoises pour la détermination du sexe depuis 1982. en 1991, 5000 machines à ultrason étaient produites par an. En 2001, presque tous les hôpitaux et cliniques savaient déterminer avec une bonne précision le sexe des enfants[11].

En Inde, si les premières échographies ont été réalisées en 1979, leur introduction a été beaucoup plus lente. Dans les années 1980, les machines à ultrason arrivent dans les grandes villes, dans les années 1990 dans les régions urbaines, et dans la grande majorité de l'Inde dans les années 2000.

Signe contre la sélection sexuelle prénatale en Chine

Il n'existe aucune loi sur l'avortement au Canada, hormis les lois d'accès sécuritaire de certaines provinces[12]. D'autre part, la Cour suprême du Canada interprète la Charte canadienne des droits et libertés et la Charte des droits et libertés de la personne comme s'appliquant aux personnes nées seulement[13]. Des députés d'arrière-ban du Parti conservateur ont déjà tenté de proposer des projets de loi pour interdire l'avortement sexo-sélectif, mais ils n'ont pas connu de succès[14].

De façon traditionnelle, en Chine les garçons sont préférés[15]. Une fille est appelée à se marier un jour et à quitter ainsi ses parents. De ce fait, elle est perçue comme une charge, un fardeau lourd à supporter économiquement. La politique de l'enfant unique en vigueur depuis 1979 a aggravé la situation de déficit de femmes.

On compte 117 naissances masculines en moyenne pour 100 naissances féminines alors qu'au niveau mondial, 105 garçons naissent en moyenne, pour 100 filles[16].

La Chine n'autorise pas la révélation du sexe des fœtus afin d'éviter les avortements sélectifs[17]. De nombreuses familles passent alors par Hong Kong et des analyses sanguines pour le dévoiler le sexe des fœtus, dès la septième semaine de grossesse[17].

Carte du sex-ratio pour les bébés de moins d'un an en 2011.

Selon le recensement de 2001, entre 0 et 6 ans le sex-ratio était de 108, et de 109 selon le recensement de 2011[18]. Le sex-ratio est très différent selon les États, avec 120 en Haryana, 118 au Penjab, 116 au Jammu-et-Cachemire, et 111 au Gujarat[19]. Le recensement de 2011 a montré que les états de l'est de l'Inde avaient un sex-ratio entre 103 et 104, soit assez proche de la normale[20], et un taux plus élevé à l'ouest[21].

Les chiffres semblent montrer un lien entre un sex-ratio anormal et un meilleur statut socio-économique. Il ne semble pas y avoir de corrélation entre les religions prédominantes et le sex-ratio[19].

Un hôpital en Inde rappelle que la détermination prénatale du sexe est interdite.

La loi punit de 5 ans de prison la détermination prénatale du sexe pour éviter les avortements sexo-sélectifs[22]. Le premier ministre Narendra Modi a appelé à faire cesser les avortements sélectifs[23]. La ministre de l'enfance Maneka Gandhi a proposé de rendre un test prénatal obligatoire, déclarant : « À mon avis, il faut changer la politique actuelle. Chaque femme enceinte devrait obligatoirement savoir s'il s'agit d'un garçon ou d'une fille »[24].

C'est après la chute des régimes communistes en Europe que le sex-ratio des pays du Caucase a commencé à fortement augmenter, alors qu'il était entre 105 et 108 avant. L'accès à des échographies et des cliniques privées conjuguée à une société patriarcale qui favorise fortement les garçons par rapport aux filles font partie des causes[25]. Pendant 20 ans, le taux est resté fort élevé en Azerbaïdjan, Arménie et Géorgie[26],[27].

Pour les naissances entre 2005 et 2010, le sex-ratio de l'Arménie semble être en lien avec l'ordre de la naissance. Pour le premier enfant, ce sex-ratio est de 138. Si le premier enfant est un garçon, le sex-ratio du deuxième est 85, par contre si le premier enfant est une fille, le sex-ratio du deuxième enfant est 156. Le sex-ratio global est de 115, devant l'Inde à 108[27],[28],[29]. Ces chiffres suggèrent un grand nombre d'avortement sélectifs, mais cela n'a pas pu être constaté[26]. Certaines femmes enceintes de filles subissent des pressions pour avorter, alors que dans les pays de l'ex-bloc de l'Est, le taux de contraception est faible, et l'avortement plus courant qu'en Europe de l'Ouest[30]. Une loi arménienne votée en 2016 demande à tous les médecins de poser un questionnaire sur les raisons de l'avortement. Si celui-ci est en raison du sexe, ils doivent refuser[31].

Balkans occidentaux

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Un rapport déséquilibré entre les sexes à la naissance est présent au XXIe siècle dans les Balkans occidentaux, aux pays comme l'Albanie, la Macédoine, le Kosovo et le Monténégro. En 2016, selon les estimations de la CIA, l'Albanie a l'un des déséquilibres sexuels les plus élevés au monde, à 110[32],[33]. Les experts affirment que les avortements sélectifs sont fréquents dans le sud-est de l'Europe[34].

Royaume-Uni

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Quelques avortements sélectifs ont été dénoncés par les journalistes du Daily Telegraph et ont provoqué un tollé[35].

La pratique des avortements sélectifs se répand rapidement au Vietnam, où certaines femmes sont menacées si elles mettent au monde des filles. Le sex-ratio est de 110,5 en 2010[36].

Réactions internationales

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En 1994, plus de 180 états se sont engagés à éliminer toute forme de discrimination contre les filles[37]. En 2011 l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe condamne la pratique de la détermination du sexe prénatale [38].

Pour l'Office des Nations unies contre les drogues et le crime, les fœticides et infanticides de filles sont des cas répondant à la définition des féminicides[39]

Notes et références

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  1. (en) Goodkind, Daniel, « Should Prenatal Sex Selection be Restricted?: Ethical Questions and Their Implications for Research and Policy », Population Studies, vol. 53, no 1,‎ , p. 49–61 (DOI 10.1080/00324720308069, JSTOR 2584811)
  2. A. Gettis, J. Getis, and J. D. Fellmann (2004). Introduction to Geography, Ninth Edition. New York: McGraw-Hill. p. 200. (ISBN 0-07-252183-X)
  3. (en) J. Kumm, K. N. Laland et M. W. Feldman, « Gene-culture coevolution and sex ratios: the effects of infanticide, sex-selective abortion, sex selection, and sex-biased parental investment on the evolution of sex ratios », Theoretical Population Biology, vol. 43, no 3; number 3,‎ , p. 249–278 (PMID 7846643, DOI 10.1006/tpbi.1994.1027)
  4. (en) Jeff Gammage, « Gender imbalance tilting the world toward men », The Philadelphia Inquirer, (consulté le ).
  5. (en) Fengqing Chao, Patrick Gerland, Alex Richard Cook et Christophe Z. Guilmoto, « Projecting sex imbalances at birth at global, regional and national levels from 2021 to 2100: scenario-based Bayesian probabilistic projections of the sex ratio at birth and missing female births based on 3.26 billion birth records », BMJ Global Health, vol. 6, no 8,‎ , e005516 (ISSN 2059-7908, PMID 34341019, DOI 10.1136/bmjgh-2021-005516, lire en ligne, consulté le )
  6. a et b Agnès Guillaume et Clémentine Rossier, « L’avortement dans le monde. État des lieux des législations, mesures, tendances et conséquences », Population, vol. 73, no 2,‎ , p. 225 (ISSN 0032-4663 et 1957-7966, DOI 10.3917/popu.1802.0225, lire en ligne, consulté le )
  7. (en) Devaney SA, Palomaki GE, Scott JA et Bianchi DW, « Noninvasive Fetal Sex Determination Using Cell-Free Fetal DNA », JAMA, vol. 306, no 6,‎ , p. 627–636 (PMID 21828326, PMCID 4526182, DOI 10.1001/jama.2011.1114)
  8. (en) Michelle Roberts, « Baby gender blood tests 'accurate' », BBC News Online,‎ (lire en ligne)
  9. a et b (en) V. Mazza, C. Falcinelli, S. Paganelli et al., « Sonographic early fetal gender assignment: a longitudinal study in pregnancies after in vitro fertilization », Ultrasound Obstet Gynecol, vol. 17, no 6,‎ , p. 513–6 (PMID 11422974, DOI 10.1046/j.1469-0705.2001.00421.x)
  10. Alfirevic Z, von Dadelszen P (2003). "Instruments for chorionic villus sampling for prenatal diagnosis". In Alfirevic, Zarko. Cochrane Database Syst Rev (1): CD000114. DOI 10.1002/14651858.CD000114
  11. (en) Chu Junhong, « Prenatal Sex Determination and Sex-Selective Abortion in Rural Central China », Population and Development Review, vol. 27, no 2,‎ , p. 260
  12. Loi de 2017 sur l’accès sécuritaire aux services d’interruption volontaire de grossesse, L.O. 2017, Chapitre 19
  13. Tremblay c. Daigle, [1989] 2 R.C.S. 530
  14. La Presse / La Presse canadienne. 14 avril 2021. « Erin O’Toole permettra un vote libre ». En ligne. Page consultée le 2021-04-17
  15. (en) « China's great gender crisis », The Guardian,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  16. Dwight H. Perkins, Steven Radelet, David L. Lindauer, Économie du développement traduit par Bruno Baron-Renault, 3e édition, De Boeck, 2008, (ISBN 978-2-8041-4918-5), p. 317-318
  17. a et b Ouest-France avec AFP, « Ils veulent choisir le sexe de leur bébé : Hong Kong au cœur d’un trafic de sang de Chinoises enceintes », sur Ouest-France.fr, (consulté le )
  18. India at Glance – Population Census 2011 – Final Census of India, Government of India (2013)
  19. a et b Child Sex Ratio in India « Copie archivée » (version du sur Internet Archive) C Chandramouli, Registrar General & Census Commissioner, India (2011)
  20. Census of India 2011: Child sex ratio drops to lowest since Independence The Economic Times, India
  21. Trends in Sex Ratio at Birth and Estimates of Girls Missing at Birth in India UNFPA (July 2010)
  22. « Discrimination. En Inde, ces femmes qui luttent contre l’avortement sélectif de fœtus féminins », sur Courrier international, (consulté le )
  23. « Inde : une ministre propose un test prénatal obligatoire de détection du sexe de l'enfant », sur RTBF.be, (consulté le )
  24. « Inde : rendre obligatoire un test prénatal de détection du sexe pour éviter le fœticide des filles », sur levif.be, (consulté le )
  25. Catherine Vincent, « édition abonné La sélection prénatale des garçons s'étend dans le Caucase », sur Le Monde, (consulté le )
  26. a et b (en) France MESLÉ, Jacques VALLIN et Irina BADURASHVILI, A Sharp Increase in Sex Ratio at Birth in the Caucasus. Why? How?, Paris, Committee for International Cooperation in National Research in Demography, , 425 p. (ISBN 978-2-910053-29-1 et 2-910053-29-6)
  27. a et b Gendercide in the Caucasus The Economist (September 13, 2013)
  28. Michael, M; King, L; Guo, L; McKee, M; Richardson, E; Stuckler, D (2013), The mystery of missing female children in the Caucasus: an analysis of sex ratios by birth order, International perspectives on sexual and reproductive health, 39 (2), p. 97-102, ISSN 1944-0391
  29. John Bongaarts (2013), The Implementation of Preferences for Male Offspring, Population and Development Review, Volume 39, Issue 2, pages 185–208, June 2013
  30. « L'Arménie face à l'explosion des avortements sélectifs de filles », sur RTL, (consulté le )
  31. Violette Salle, « À cause de l'avortement sélectif, il pourrait bientôt ne plus y avoir de femmes en Arménie », sur Aufeminin.com, (consulté le )
  32. « CIA - The World Factbook -- Field Listing », sur cia.gov via Wikiwix (consulté le ).
  33. (it) Osservatorio Balcani e Caucaso, « Selective abortion in Albania », sur OBC Transeuropa (consulté le )
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  35. Chloé Woitier, « Des avortements sélectifs font scandale au Royaume-Uni », sur Le Figaro, (consulté le )
  36. « L'avortement sélectif se banalise », sur Courrier International,
  37. (en) « Preventing gender-biased sex selection », UNFPA (consulté le )
  38. (en) « Prenatal sex selection » [archive du ], PACE (consulté le )
  39. « Symposium sur le féminicide: un problème mondial qui nécessite une intervention! », sur unodc.org, .