Bois flotté

Masse de bois flotté près de Porirua (Nouvelle-Zélande).
Bois échappé, bois mort accumulé sur une rivière (bois perdu par les bûcherons lors de l'exploitation, dit « Log Jam » par les anglophones).

Le bois flotté est du bois qui a été drossé sur la côte (de l’océan ou de toute autre étendue d'eau salée) par l'action du vent, des courants ou des marées. L'appellation « bois flotté » implique un séjour de nombreux jours, semaines, mois ou années dans une étendue d'eau salée.

Description

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Bois flotté sur la plage nord de Kaikoura, Nouvelle-Zélande. Avril 2019.

Sur certaines côtes, le bois flotté est perçu comme une nuisance, dont pour les hélices des bateaux. Quand il est d'origine naturelle, il participe cependant au biotope, fournissant abri ou nourriture aux oiseaux marins, poissons, invertébrés ou d'autres espèces aquatiques ou du bois mort lorsqu'il flotte, coule ou s'échoue. Les limnories, les tarets et les bactéries décomposent ce bois, le transformant progressivement en nutriments qui sont réintroduits dans la chaîne alimentaire. Lorsque ce bois, partiellement décomposé et creusé, est rejeté à la côte, il peut servir d'abri aux oiseaux ou à d'autres espèces animales et permettre la pousse de certaines plantes. Il sert parfois de fondations pour la création de dunes.

Il peut s'agir de :

  • arbre ou branches d'arbres apportés par les fleuves après avoir été arrachés par les vents, les crues, les tempêtes, glissements de terrains, inondations ;
  • éléments d'immeubles ou de maisons, détruites lors d'inondations, tempêtes ou tsunamis ;
  • objets en bois emportés par la mer depuis la côte ou la plage ;
  • restes d'épaves de bateaux en bois ;
  • palettes, caisses ou grumes perdues par les cargos.

Dans l'histoire et la préhistoire

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Selon la mythologie nordique, les premiers êtres humains, Ask et Embla ont été créés à partir de deux pièces de bois flotté, un frêne et un orme, par le dieu Odin et ses frères, et Vili.

Le bois flotté charrié par les fleuves arctiques a longtemps été la principale et quelquefois la seule ressource en bois des Inuits et d'autres populations de l'Arctique qui habitaient bien au-delà de la limite des arbres, au Nunavik par exemple[1],[2],[3]. Dans les années 1940, Giddings a créé une collection d'échantillons et de données d'intérêt à la fois dendrochronologique et dendroclimatique, encore utilisés et exploités, intéressant la seconde moitié du dernier millénaire du nord-ouest de l’Alaska.

Dans de nombreuses régions maritimes, du bois flotté était utilisé, par exemple pour les séchoirs à poissons et pour la construction.

Une des plus célèbres pièces de bois flotté est le Old Man of the Lake dans le lac du Cratère en Oregon (États-Unis). Le tronc de cet arbre flotte verticalement dans le lac depuis plus d'un siècle[4]. Grâce à l'eau froide du lac, l'arbre a été préservé.

Bois de feu : Le bois humide et imbibé de sel brûle mal et en produisant des dioxines et furanes en raison du chlore qu'il contient, mais le bois flotté provenant d'eaux douces, bien qu'il ait perdu un peu de son pouvoir calorifique, une fois sec, peut être utilisé comme combustible (avec des précautions, dans un incinérateur avec filtre) s'il a été peint ou traité, ou s'il a pu être contaminé par des sédiments ou un eau pollués, durant son transport. De grandes grandes quantités de bois flottants étaient autrefois charriées par les crues[5]. C'est encore parfois le cas. Par exemple sur le Rhône genevois, avant le barrage de Verbois, les crues saisonnières de l'Arve (rivière significativement plus polluée que le Rhône au point de confluence) apportent de 120 à 800 tonnes de bois sec/an, soit en moyenne environ 500 tonnes d'équivalent bois sec/an. En 2005 le bois échantillonné sur ce site était essentiellement d’origine naturelle (au maximum 5 % de déchets anthropiques, parmi des troncs et branches de salicacées, aulnes et peupliers essentiellement)[5]. L’exploitant ayant obligation de ne pas rejeter ces bois flottants vers l'aval, il a étudié la possibilité d'en faire du bois-énergie. Ce bois a un pouvoir calorifique moyen de 17.5 à 20 MJ/kg (sec). Un premier échantillonnage du bois flotté a été fait au moment de la crue printanière, avec une méthode d'extraction faisant que ce bois a été mis en contact avec du sédiment pollué[5]. Il présentait un taux de cendres proche de 15 % (après combustion des plaquettes), et il était systématiquement pollué par l'arsenic, du chrome, du cuivre et du plomb (largement au dessus des valeurs limites fixées par la suisse pour le bois énergie (norme SN166 000) ; le cadmium et le mercure n'ont pas été recherché, mais ils pourraient aussi être présents. Inversement, les échantillons prélevés lors de la crue automnale (où l'on n'a soutiré que les bois flottants en surface, sans le mettre en contacts avec le sédiment), n'a produit que 3 % de cendres ; et il contenait bien moins de métaux lourds et métalloïdes (10 à 20 fois moins que les échantillons printaniers), permettant de produire des plaquettes ou pellets conforme à la norme suisse SN166 000[5]. Cette étude a montré que les bois flottants ayant séjourné dans un sédiment pollué ou extrait de l'eau avec un peu de sédiment peuvent être trop pollués pour être brûlés[5].

Sculptures en bois flotté

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Construction en bois flotté sur une plage de Christchurch en Nouvelle-Zélande, la Lune en arrière plan. Juin 2019.

Le bois flotté est fréquemment utilisé comme élément décoratif ou artistique. Des sculptures de bois flotté ont été construites sur des plages ou des vasières.

  • Une des plus connues se trouve à Kullaberg en Suède, où Lars Vilks créa en 1980 Nimis, une œuvre controversée.
  • Des sculptures furent créées dans les vasières d'Emeryville en Californie et dans la baie de San Francisco à la fin des années 1960.
  • La première sculpture collective française en bois flotté a été édifiée en , au centre de la chapelle Sainte-Anne de la ville d'Arles, par les visiteurs de l'exposition Marcher dans le pas des glaneurs organisée par un couple d'artistes locaux d’À Flots perdus. Construite avec des morceaux de bois flotté posés en équilibre, cette représentation de la "Bête des marais des Launes a atteint deux mètres de hauteur et trois mètres cinquante de longueur, le dernier jour de l'exposition. Le , elle a été démontée et les bois flottés ont été remis au Rhône pour respecter le cycle de la nature et remercier le fleuve pour sa prodigalité. (La Provence du ).
  • La seconde édition de "Marcher dans le pas des glaneurs" organisée en , par le même couple d'artistes arlésiens et Pierre Milhau, s'est déroulée au même endroit, en respectant le même rituel. Cette deuxième sculpture collective française a, cette fois ci, atteint deux mètres cinquante de hauteur et cinq mètres cinquante de longueur, avant d'être elle aussi démontée et rejetée dans le fleuve, le [6].
  • La ville d’Évian accueille chaque hiver depuis 2006 le festival « Le Fabuleux village ou la Légende des Flottins » ; cabanes, personnages, animaux en bois flotté voient le jour au centre-ville d'Evian[7].

Notes et références

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  1. Stéphanie Steelandt (2014) ; Disponibilité et exploitation des ressources ligneuses par les paléoesquimaux et les Inuit sur la côte ouest du Nunavik (Québec, Canada) ; Thèse, préparée avec l'université de Renne et soutenue à l’Université Laval (université de cotutelle) le 12 novembre 2014.
  2. Alix, C.(1998). Provenance et circulation des bois en milieu arctique : quels choix pour les Thuléens ? Revue Archéométrie, 22 : 11-22.
  3. Alix, C., (2004). Bois flotté et Archéologie de l’Arctique : contribution à la Préhistoire récente du détroit de Béring. Etudes/Inuit/Studies, 28(1): 109-132.
  4. Salinas, J., « The Old Man of the Lake », Nature Notes from Crater Lake National Park, Vol. XXVII (1996).[1]
  5. a b c d et e Pierre-Alain Viquerat, Bernard Lachal, Johanna Beck, Eric Pampaloni et Florian Sella (2006) Bois flottants à Verbois: déchets ou ressource? Caractérisation physico-chimique et valorisation énergétique ; Archives des sciences ; | Arch.Sci. (2006) 59: 279-290|url=https://www.unige.ch/sphn/Publications/ArchivesSciences/AdS%202004-2015/AdS%202006%20Vol%2059%20Fasc%202-3/279-290_viquerat_59_2-3.pdf.
  6. La Provence du 14 février 2010.
  7. Le Fabuleux village ou la Légende des Flottins, sur lefabuleuxvillage.fr, consulté le 3 janvier 2018.

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Bibliographie

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Articles connexes

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