Le cinéma de montagne est un genre cinématographique qui représente la montagne. Il ne se résume pas uniquement au « cinéma en montagne » qui qualifie plutôt les films dans lesquels la montagne n'est qu'un décor et non l'enjeu du film. Le cinéma de montagne se caractérise plutôt par des films dont la montagne est l'enjeu du film, que cet enjeu soit sportif, dramatique, symbolique, poétique, romantique, etc. Il compte aussi les films exposant les cultures populaires de la montagne.
Le cinéma de montagne peut recouvrir des documentaires et des films de fiction.
La montagne constitue un cadre riche de sens pour raconter une histoire :
Au début du XXe siècle, la représentation de la montagne dans le cinéma professionnel se faisait essentiellement de deux manières :
À côté de cela, des alpinistes tournaient des films, généralement des souvenirs de leur courses, dont la diffusion ne dépassait pas leur entourage.
En réaction contre cela, des cinéastes et surtout des alpinistes, en particulier Marcel Ichac à partir de 1934, décidèrent de replacer la montagne au centre du film :
« Marcel Ichac, avec son idée du cinéma-vérité (« Tout se serait passé de le même façon si la caméra n’avait pas été là », disait-il à propos des Aiguilles du Diable) lançait un véritable débat qui n’est aujourd’hui toujours pas clos : qu’est-ce que le cinéma de montagne ? » (Marc Fenoli).
« Le XIXe siècle a inventé la montagne et le cinéma. Ils se rencontrèrent pour se mettre au service l'un de l'autre, selon une association complexe dans laquelle il reste à démêler la fiction du documentaire. Investies diversement, les images de la montagne ont souvent précédé et servi le cinéma. Entre vision de l'histoire et miroir de la société. » (La montagne et l'alpinisme)
Le cinéma de montagne est donc avant tout un genre documentaire, même si une part de fiction peut y être apportée (voir Les Étoiles de midi de Marcel Ichac).
Reste que des films de fiction purs, ayant assimilé les leçons des alpinistes, peuvent représenter la montagne avec beaucoup de beauté ou de force (Cliffhanger).
Les Italiens (en particulier turinois) vont dominer le cinéma de montagne des années 1910.
Les Italiens vont réaliser les premiers films himalayens :
Plus tard, les Britanniques réaliseront un film lors de l’expédition de 1924 en Himalaya.
« La scénarisation, au début des années vingt, fait prendre au cinéma de montagne un tournant décisif. Pour un certain nombre de productions, la montagne devient le cadre, et seulement le cadre, d’une trame romanesque dont l’action n’est pas strictement liée au milieu montagnard. » (Marc Fenoli).
C’est l’école « allemande » (en fait d’expression germanique au sens large) qui va dominer ce cinéma dans lequel la montagne est utilisée comme un décor dramatique. Ce sont principalement les films de Fanck, Trenker et Riefenstahl. Une domination d’une bonne décennie inaugurée par La Montagne sacrée (1924) d'Arnold Fanck (mais il commence à tourner dès 1913 ?). La montagne est en fait plus qu’un décor dramatique : elle entre de plain-pied dans l’intrigue. « Elle en constitue même l’élément moteur, par le cadre et sa dimension dramatique, mais surtout par les rapports induits entre elle et les personnages. » (Marc Fenoli). Caractéristique de la culture allemande, la montagne et la nature est vue comme triomphante, inspirant ferveur ou crainte sacrée. Une vision romantique qui se coulera très bien dans l’idéologie nazie.
Voici les principaux films de montagne auxquels on pouvait assister en France vers 1930 : « On voyait en France à cette époque, quelques bons films de montagne. Jean Tedesco, au Vieux-Colombier, repassait régulièrement La Traversée du Grépon filmée par Gaston Chelle que nous retournions voir chaque fois avec dévotion, tandis qu’une petite salle de Chamonix avait constitué un programme exclusivement composé de films d’alpinisme dus à Georges Tairraz, autre vétéran du cinéma de montagne, lui aussi toujours sur la brèche. L’un de ces films montrait l’Ascension des Aiguilles Ravanel et Mummery, escaladées par deux jeunes guides affublés de culottes cyclistes : les frères Armand et Georges Charlet (…) À Paris, nous courions voir les films allemands, toujours terriblement dramatiques, d’Arnold Fanck et Luis Trenker. Comme ces films avaient eu beaucoup de succès, tout au moins en France, les producteurs austro-allemands inondèrent les écrans français. Chaque film comportait obligatoirement une scène d’amour sur la terrasse d’un refuge, cadrée sur fond de montagne, une avalanche, et une scène de nuit avec recherche des victimes par une caravane de guides brandissant des flambeaux et marchant, suivant le cas, à pied ou à ski. Car le ski se conjuguait à l’alpinisme pour les besoins de la mise en scène. Pour être passés des Prisonniers de la Montagne à Tempête sur le mont-Blanc et d’Ivresse blanche aux Chevaliers de la Montagne, nous n’est étions pas plus heureux pour cela. » (N.B. : pour la qualité de l’authenticité) (Marcel Ichac, Quand brillent les étoiles de midi, éd. Arthaud, Paris, 1960, page 11-12).
Dans les années 1930, s'affirme une école française du cinéma de montagne, moins expressionniste, plus dépouillée et réaliste que l'école allemande. Ce sont les films de Marcel Ichac, Roger Frison-Roche, Samivel, Georges Tairraz, etc. Elle se développe selon les principes fixés par Marcel Ichac, en opposition avec l’école allemande. Il s’agit à la fois de sortir de la vision dramatique de la montagne et de placer la montagne et les alpinistes au cœur de l’intrigue. « Le cinéma de montagne, versant français, aura imposé une nouvelle version, dépouillée de tout pathos, qui fera sa place au geste et à la relation pure de l’homme avec la montagne. » (Marc Fenoli).
En 1944, l'historien du cinéma Pierre Leprohon résumait ainsi les premières décennies du cinéma de montagne : « De tout ce que nous a apporté le cinéma alpestre, des images se détachent, mais trois noms restent en lumière : Arnold Fanck, Luis Trenker, Marcel Ichac. Trois noms de cinéastes qui furent d’abord des alpinistes. C’est par une connaissance personnelle de la montagne qu’ils sont parvenus à nous en donner les images les plus véridiques et aussi les plus émouvantes. (…) Les trois hommes que nous venons de citer n’ont rien en commun sinon l’amour de la montagne et de leur art. Leur expression diffère dans la mesure même de leur personnalité. Arnold Fank s’est servi de la montagne comme d’un motif symbolique ou dramatique. Luis Trenker y voit un élément de pittoresque et d’exaltation. Marcel Ichac, une école d’énergie et d’endurance. Trois formes d’inspiration aboutissent à trois expressions différentes : le symbole, l’évocation, le document. » (Pierre Leprohon, Le Cinéma et la montagne, éditions Jean Susse, Paris, 1944, page 141).
Marcel Ichac utilisera des caméras allemandes portatives prévues pour les films ethnologiques pour révolutionner le cinéma de montagne. La caméra légère permet en effet de se trouver au cœur de l'action, de skier ou de grimper avec la caméra. « « En ces temps-là (dans les années 1930), les opérateurs professionnels se déplaçaient avec de grosses caméras à moteurs électriques. Le poids de la caméra, des batteries, sans compter le pied et les films, empêchaient l’opérateur de circuler. » (expliquait Marcel Ichac). Avec sa caméra portative, Ichac, lui, va pouvoir garder un skieur dans son champ pendant plusieurs secondes ; il pourra aussi se déplacer sur une paroi pour suivre le grimpeur. Il sera au cœur de l’action, à côté du sportif. » (Marcel Ichac, Le Maître incontesté du cinéma de montagne, Pierre Minvielle, in La Montagne et Alpinisme, 3-1994, p. 12-14).
La méthode Ichac marquera le cinéma de montagne : « Marcel Ichac a fait école ; pas simplement parce qu’il a été le premier cinéaste français de montagne, mais surtout parce qu’ayant abordé le cinéma en professionnel, c’est-à-dire avec les exigences d’une véritable écriture cinématographique (scénario, cadrage, mise en scène), il n’a pas renié sa vocation d’alpiniste, laissant à la montagne sa pleine dimension. En particulier, il s’est toujours efforcé de tourner les différentes séquences au lieu et à l’heure où elles étaient supposées avoir lieu. Cette exigence reprise par ses propres collaborateurs (Jacques Ertaud, Jean-Jacques Languepin, René Vernadet, etc.) est devenue un label : celui de l’authenticité ». (Hommage à Marcel Ichac, Yves Ballu, vers 1986 in ???).
À l'instar de Marcel Ichac, plusieurs grands alpinistes français de la génération suivante ont décidé de tenir eux-mêmes la caméra, dont Lionel Terray, Gaston Rébuffat, etc.
Les États-Unis mettront du temps avant d’absorber les leçons du cinéma de montagne français. Hollywood tentera essentiellement de se situer dans le sillage de l’école allemande, exploitant principalement la montagne comme un décor dramatique.
(A compléter)
Parmi les films qui marquèrent le cinéma de montagne :
L'Alliance internationale pour le cinéma de montagne (International alliance for moutain film) compte (en 2012) 20 festivals et un musée dans 16 pays[2] :