En dépit de ses mérites théoriques et de son importance dans l'histoire cryptologique récente, le cryptosystème de Goldwasser-Micali n'est pas utilisé en pratique : il est bien moins efficace que les alternatives et la sécurité sémantique seule est insuffisante pour de nombreuses applications.
un algorithme de génération des clés, probabiliste, qui prend en entrée un paramètre de sécurité et retourne un couple constitué d'une clé privée et de la clé publique correspondante ;
un algorithme de chiffrement, également probabiliste[Note 2], qui prend en entrée le paramètre de sécurité, un message clair, et une clé publique, et retourne un message chiffré ;
et un algorithme de déchiffrement, déterministe, qui prend en entrée le paramètre de sécurité, un message chiffré, et une clé privée, et retourne un message.
Deux nombres premiers et distincts sont générés, on note . La taille de et est déterminée en fonction du paramètre de sécurité à partir de la preuve de sécurité (voir plus bas).
Pour l'étape 2, il existe essentiellement deux méthodes. La première méthode consiste à tirer au hasard, et vérifier ses symbole de Jacobi ; en principe, un nombre sur quatre possède la propriété recherchée. La seconde méthode consiste à fixer mod , ce qui garantit que convient[11],[12].
Soit un message d'un seul bit, c'est-à-dire . Pour chiffrer ce message,
L'algorithme tire uniformément un entier dans .
L'algorithme retourne le message chiffré
Pour chiffrer un message plus long, constitué de plusieurs bits, chaque bit est chiffré indépendamment[3]. Ainsi, si , le message chiffré correspondant est où chaque est le chiffré de .
Cette manière de faire est responsable de la faible bande passante du cryptosystème[Note 4]. L'indépendance entre chaque chiffrement permet également à un attaquant de réordonner les membres de sans jamais déchiffrer : il s'agit d'une vulnérabilité de malléabilité, qui n'est pas capturée par le modèle de sécurité sémantique (voir discussion plus bas).
Cette étape est efficace puisque l'algorithme de déchiffrement reçoit la clé privée qui donne la factorisation de [Note 5]. Si le chiffré correspond à un message de plusieurs bits, , chaque est déchiffré pour donner le bit du message clair.
La sécurité sémantique (IND-CPA) du cryptosystème de Goldwasser et Micali a été réduite, dans le modèle standard, à la difficulté du problème de la résiduosité quadratique modulo — c'est-à-dire l'hypothèse qu'il est difficile de déterminer si un nombre est un résidu quadratique modulo . Cette preuve est historiquement la première de son genre et a participé à développer la notion de sécurité prouvable en cryptologie[6],[Note 6].
Lorsque la factorisation de est connue, le problème de la résiduosité est facile, c'est précisément ce que fait l'algorithme de déchiffrement décrit dans la section précédente. À l'heure actuelle (2018) il ne s'agit que d'une condition suffisante, et il n'est pas exclu qu'existe un algorithme efficace pour résoudre le problème de la résiduosité quadratique, bien qu'aucun ne soit aujourd'hui connu[13].
La meilleure attaque connue (en 2018) consiste ainsi à calculer la factorisation de , ce qui détermine la manière de générer les clés pour cet algorithme : pour résister à un attaquant classique, et doivent être individuellement assez grands pour éviter une factorisation par ECM (ainsi ) et leur produit doit opposer assez de résistance aux meilleurs algorithmes génériques de factorisation, notamment le crible du corps de nombres. Pour un niveau de sécurité classique de 128 bits, cela correspond à . Face à un attaquant quantique, l'algorithme de Shor donne la factorisation de en temps polynomial et il n'existe donc pas de paramètres rendant le cryptosystème sûr dans ce contexte.
Le cryptosystème de Goldwasser-Micali n'est pas sûr face à des modèles d'attaquants plus forts : il ne possède que la sécurité sématique (IND-CPA). En particulier, comme évoqué dans une section précédente il existe des attaques de malléabilités permettant à un adversaire de manipuler les chiffrés de façon indétectable. L'existence de telles attaques montre que le cryptosystème n'atteint pas la sécurité IND-CCA, c'est-à-dire qu'il est de manière générique vulnérable aux attaques à chiffré choisi. Ces observations sont bien sûr anachroniques, puisque les modèles correspondants ont été développés ultérieurement et précisément pour capturer les limites de ce système[6].
Un autre point de vue sur le même phénomène est que le cryptosystème de Goldwasser-Micali est partiellement homomorphe : si sont deux bits, chiffrés en respectivement, alors déchiffre en . Autrement dit, la fonction ou exclusif est calculable homomorphiquement sur ce cryptosystème[14],[15].
↑D'après (Dent 2008), le cryptosystème de Rabin et celui de Goldwasser-Micali sont responsables de la prise de conscience, dans les années 1990, de la nécessité de formaliser (et prouver) la sécurité des schémas cryptographiques. Voir aussi (Goldwasser 2002).
↑Un algorithme de chiffrement déterministe ne peut pas être sémantiquement sûr.
↑Le cryptosystème de Rabin (1979) précède de quelques années celui de Goldwasser-Micali, et a été présenté avec une preuve de l'équivalence entre le calcul de racines carrées modulo et la factorisation de . Voir (Dent 2008) pour une discussion.
↑(en) S. Goldwasser et S. Micali, « Probabilistic encryption and how to play mental poker keeping secret all partial information », dans STOC '82 Proceedings of the 14th annual ACMSymposium on Theory of Computing, , p. 365–377.
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↑(en) Seung Geol Choi, Dana Dachman-Soled, Tal Malkin et Hoeteck Wee, « Black-Box Construction of a Non-malleable Encryption Scheme from Any Semantically Secure One », Theory of Cryptography Conference (TCC), (DOI10.1007/978-3-540-78524-8_24, lire en ligne).
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↑(en) Association for Computing Machinery (ACM), « ACM Turing Award 2012 », sur youtube.com, (consulté le )
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↑(en) Benjamin Justus, « The distribution of quadratic residues and non-residues in the Goldwasser–Micali type of cryptosystem. II », Journal of Mathematical Cryptology, vol. 9, no 2, (ISSN1862-2976 et 1862-2984, DOI10.1515/jmc-2014-0004, lire en ligne, consulté le )
↑(en) René Peralta et Eiji Okamoto, « Some combinatorial problems of importance to cryptography », Proceedings of the IEICE 1996 Symposium on Cryptography and Information Security, (lire en ligne)
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