La désincarcération (ou décarcération) est l'action de dégager une personne prisonnière d'un véhicule accidenté. C'est une des opérations du prompt secours routier.
Cette opération est une opération spécialement compliquée par plusieurs facteurs :
Dans la plupart des véhicules susceptibles de faire l'objet d'opérations de désincarcération (tels automobiles ou trains), l'industrie a adopté des conceptions mécaniques qui permettent de favoriser la déformation de certaines portions du véhicule en préservant une zone privilégiée où la victime est en sécurité relative. Mais ces déformations mécaniques peuvent simultanément compliquer la tâche de désincarcération.
Le plus souvent la désincarcération est réalisée par des équipes spécialisées (des pompiers, principalement) équipées d'instruments comme des pinces hydrauliques capables de découper des tôles épaisses en minimisant les déformations additionnelles.
Parallèlement à ces opérations techniques, un équipier secouriste s'introduit si possible dans l'habitacle afin de juger l'état de la victime, lui prodiguer les premiers soins, puis l'accompagner jusqu'à l'extérieur.
La désincarcération ne peut débuter que lorsque la zone est sécurisée :
Durant cette préparation, un secouriste, surnommé « écureuil »[1], est entré dans le véhicule pour commencer les soins : bilan, arrêt des hémorragies, pose d'un collier cervical, oxygénothérapie.
De plus en plus de constructeurs automobiles éditent, à l'attention des secours, des fiches d'aide à la désincarcération pour chaque modèle de leur flotte[2]. Ces fiches sont disponibles sur les sites des constructeurs, mais de nombreuses associations automobiles les recensent sur leur site[3],[4]. En France, le site du ministère de l'Intérieur affiche une liste de ces fiches en ce qui concerne les véhicules français[5]. Certains véhicules récents portent un tag (QR code) destiné à permettre aux secours de lire (à l'aide d'un smartphone) la fiche du véhicule en question.
Il faut, autant que possible, que la désincarcération se fasse le plus rapidement, tout en maintenant de bonnes conditions de sécurité pour la victime. En effet, dans de nombreux cas (notamment d'hémorragie interne), aucun geste ne peut se substituer à une opération chirurgicale, qui elle-même nécessite au préalable des examens par imagerie médicale (en particulier radiographies du thorax, du bassin et de la colonne vertébrale). C'est la notion d'heure d'or : pour que la victime ait de bonnes chances de survie, il faut qu'elle soit hospitalisée dans l'heure qui suit l'accident.
Le meilleur moyen de gagner du temps est d'avoir du personnel formé et coordonné par un commandement unique. L'organisation sur le terrain est également importante, pour que chacun sache où se placer et ne gène pas les autres, la configuration pouvant être étroite. À titre d'exemple, les Australiens recommandent de faire trois zones :
En France, les véhicules médicaux se placent après l'accident (dans le sens de la circulation), et les véhicules de secours routier et de lutte contre l'incendie se placent avant l'accident. Le dispositif se met en place dans le sens des voies de circulation, en prenant le moins de largeur possible (tout en maintenant de bonnes conditions de sécurité) afin de laisser si possible une voie de passage pour les voitures et éviter de couper totalement la circulation, ce qui facilite par ailleurs l'acheminement de renforts.
Les soins et la désincarcération doivent se poursuivre en simultané autant que faire se peut. Cela comprend la pose d'une voie veineuse périphérique (perfusion), qui permet de maintenir la pression artérielle et d'administrer des médicaments, la réduction et/ou l'immobilisation des fractures, le recouvrement des plaies et éventuellement l'intubation trachéale.
On peut diviser une désincarcération en quelques étapes générales à appliquer. Cependant, selon les circonstances, elles peuvent quelque peu différer, une désincarcération n'étant jamais égale à une autre, ni surtout à un modèle théorique.
La première étape est l'ouverture des portes si cela est possible et n'a pas pu être réalisé avant (porte coincée par la déformation de la tôle), pour permettre de faire passer le matériel médical et le personnel soignant. On utilise pour cela les écarteurs pour écarter la porte du montant, ou bien des pinces pour couper les charnières. Les ceintures de sécurité sont coupées. Le volant est sanglé pour éviter le déclenchement intempestif de son coussin gonflable de sécurité ; en effet ceux-ci sont souvent électriquement autonomes, et comportent plusieurs charges explosives indépendantes appelés chaine pyrotechniques.
La deuxième étape consiste à redonner du volume à l'habitacle, afin de relâcher la pression qu'exerce éventuellement la tôle sur la victime, et de permettre la pratique des gestes de soin. On utilise pour cela des vérins qui vont écarter les montants de la carrosserie.
La troisième étape consiste à découper la tôle et les montants pour permettre l'extraction de la victime ; on parle de césarisation.
La quatrième étape est l'extraction en elle-même. Elle se fait avec un plan dur ; l'idéal est d'avoir un plan dur légèrement courbé en gouttière, ce qui facilite sa manipulation et l'immobilisation de la victime. Il est recommandé d'utiliser une attelle d'extraction (type KED) : cela complète l'immobilisation, du dos, et « met des poignées » à la victime.
Chaque situation est différente, mais le principe de base reste : donner du volume avant de découper.
On peut classer les désincarcération en différents types, selon l'état du véhicule, sa nature (camion, voiture...), sa position et l'accès au véhicule.
Lorsque le véhicule est toujours sur les roues est le cas général le plus simple et « de base ». Les intervenants travaillent alors sur un véhicule disposé de manière normale, et donc des passagers, normalement, installés de manière normale également. Deux solutions s'offrent alors, en fonction de l'accès à la voiture, de son état, de l'état du patient (urgent ou moins urgent) et d'autres facteurs propres à chaque cas et pris en considération par les secours.
La première découpe consiste en général en l'ablation du pavillon (toit). Cela permet de sortir la victime par tous les côtés, et donne de la place et de la luminosité pour l'équipe médicale. Il faut s'assurer auparavant que les ceintures de sécurité sont bien coupées et que le pare-brise et les portes du côté des victimes ont été retirées. Les montants sont coupés à la cisaille ; en raison de la présence possible de sécurités dynamiques, on s'attache à couper les montants au ras du toit, mais si l'on est sûr de l'absence de ces systèmes, on coupe au ras des portières. Les parties coupées étant tranchantes, elles sont protégées par des tissus épais.
Puis, on réalise un relevage de la colonne de direction, qui peut comprimer les membres inférieurs : un vérin prend appui sur le plancher de la voiture (entre les jambes du conducteur) et sur la colonne de direction, et repousse celle-ci. Si les pieds du conducteur sont coincés par les pédales, celles-ci sont coupées avec les cisailles.
Le relevage de la colonne est fréquemment remplacé ou complété par un basculement du « demi-bloc avant » si la voiture est sur ses roues pour écarter le tableau de bord :
L'extraction se fait habituellement par l'arrière :
Si l'on ne peut pas abaisser totalement le dossier du siège (cas par exemple d'une victime sur la banquette arrière), la planche est glissée verticalement entre le dos de la victime et le dossier du siège, et la victime est tractée sur le plan dur.
Puis, le plan dur est mis à l'horizontale et la victime est évacuée.
Lorsque l'état de la victime le permet, ou l'oblige (nécessité d'un dégagement urgent), on peut effectuer une sortie par la portière latérale. Il n'y a alors en général pas d'ablation du pavillon. La victime est si possible conditionnée avec une attelle d'extraction. On peut faire l'extraction par la portière côté victime ou à l'opposé de la victime.
Le plan dur est glissé sous les fesses de la victime pour faciliter sa rotation. Puis, la victime est tournée délicatement afin de présenter sa tête vers la sortie, puis allongée sur le plan dur.
En absence d'attelle d'extraction, la technique peut être facilitée par l'utilisation d'une couverture roulée :
Ils forment donc un coussin qui complète l'immobilisation du collier cervical, et deux poignées qui facilitent la manutention de la victime.
La sortie latérale est risquée car il y a un risque de flexion et de torsion de la colonne vertébrale. Elle est toutefois avantageuse si la victime se retrouve dos contre la portière (Si par exemple elle n'était pas attachée). On peut ainsi glisser le plan dur par la fenêtre et s'en servir comme dossier pendant que la portière est enlevée. Le découpage de la portière commence par la section des montants de la fenêtre. La victime est ensuite allongée avec le plan dur puis glissée dessus, ce qui minimise les mouvements.
Si la victime est assise sur son siège mais que l'évacuation par l'arrière ou le haut n'est pas possible, on peut aussi la dégager par la portière arrière s'il s'agit du conducteur ou d'un passager avant. On minimise ainsi la rotation.
Un des problèmes majeurs est l'instabilité du véhicule dans ce genre de situation. Celui-ci n'étant pas fait pour reposer sur son flanc, il est généralement prompt à bouger et se renverser. L'important est donc de bien stabiliser le véhicule, de le « caler ». Ceci s'effectue en général avec des vérins hydrauliques, ou des systèmes de sangles[6].
Puis, on procède à l'ablation du pavillon, ce qui permet l'accès direct aux victimes ; en France, les montants situés en haut sont coupés et le toit est rabattu par terre toujours maintenu par les montants du bas (technique de la charnière).
Une fois le toit ouvert, la planche est simplement glissée sous la victime, et celle-ci est sortie dans sa position (que ce soit sur le dos ou sur le côté).
Lorsque l'ablation du pavillon n'est pas possible, on peut envisager de glisser le plan dur verticalement par la portière, puis de hisser la victime sur le plan dur.
Lorsque c'est possible, l'extraction se fait par l'arrière, après enlèvement de la vitre arrière, des portières et des montants latéraux. On place une couverture sous le plan dur pour éviter qu'il ne vibre à cause du frottement (notamment du verre brisé) durant l'extraction ; le plan dur est glissé par l'arrière sous la victime. La victime se trouvant tête en bas et regardant vers l'avant (si elle est attachée), elle se retrouvera à plat-ventre sur le plan dur (sauf si elle n'était pas attachée et qu'elle s'est retournée durant le tonneau).
Si la victime est attachée sur son siège, le dossier est incliné au maximum, puis, pendant que la victime est maintenue de chaque côté et à la tête, la ceinture est coupée et la victime est mise à plat-ventre sur le plan dur ; l'attelle d'extraction facilite grandement la manœuvre. Le plan dur est ensuite sorti par l'arrière.
Si la victime n'était pas attachée et se retrouve perpendiculaire à l'axe de la voiture, elle est sortie par les côtés après enlèvement des portières et ablation du montant latéral.
Le type de véhicule employé pour transporter hommes et matériel varie selon les pays, voire selon les services. Ce sont généralement les pompiers qui s'occupent de la désincarcération. Certaines casernes disposent de camions spécifiques (véhicule de secours routier), parfois de simples camionnettes, d'autres disposent de ce matériel dans un véhicule multifonctionnel, qui officie aussi comme autopompe.
Au contraire des véhicules qui varient généralement en taille et en fonction, le matériel de base reste, lui, généralement le même. On compte souvent au moins:
D'autres matériels sont présents selon les besoins, la nature du véhicule, sa taille ou simplement le budget disponible pour les acheter.