Dédée, prostituée, travaille au Big Moon, un bar à marins tenu par Monsieur René dans la zone portuaire d'Anvers. Elle vit sous la coupe de Marco, portier de l'établissement et accessoirement petit trafiquant, proxénète et pseudo caïd. Alors qu'elle se trouve un soir près du port, elle fait la connaissance de Francesco, vieil ami de Monsieur René et capitaine d'un navire marchand, dont elle tombe amoureuse.
Marco est en affaire avec un trafiquant mais n'arrive pas à trouver l'argent nécessaire à la transaction. Il presse Dédée de l'aider, ce qu'elle refuse malgré son attitude violente. De son côté, Francesco est en affaire avec Monsieur René, une affaire de cargaison dont on ne saura aucun détail mais qui est annoncée comme potentiellement dangereuse.
Après une nuit d'amour, les relations entre Dédée et Francesco se compliquent : ils s'avouent leur amour réciproque mais dans un premier temps, le marin ne veut pas s'engager, puis se ravise et lui propose de partir avec lui dès que « l'affaire » en cours sera conclue. Dédée annonce à Monsieur René son prochain départ de l'établissement. Malgré l'estime qu'il a pour elle, il n'oppose aucune objection à son départ et lui propose même de l'accompagner au bateau de Francesco quand l'affaire sera terminée. Dédée se demande comment va réagir Marco. Monsieur René se propose alors de régler le problème en le jetant dehors. Lors de l'explication musclée qu'ont les deux hommes, Monsieur René fait l'erreur d'indiquer que Dédée aime un autre homme.
Au port la transaction se termine, Dédée et Monsieur René s’apprêtent à rejoindre Francesco. C'est alors que Marco profite d'un moment d'isolement de Francesco pour l'abattre froidement. Quand Dédée et Monsieur René arrivent au lieu de rendez-vous, ils ne trouvent qu'un cadavre, mais l'arme du crime laissée sur place accuse Marco. Ils suivent sa trace dans la nuit d'Anvers, le récupèrent dans le hall de la gare, le jettent au milieu de la chaussée et l'écrasent avec la voiture.
Yves Allégret s'est fortement inspiré du Quai des brumes de Marcel Carné pour retranscrire l'atmosphère nocturne du port. Il était le mari de Simone Signoret à l'époque du tournage et c'est avec ce film que la carrière de l'actrice a véritablement pu décoller.
Dédée d'Anvers possède une trame assez classique dans son registre. On y retrouve une joyeuse compagnie de filles à matelots, un tenancier paternaliste, des clients saouls qui cherchent à être consolés, un petit truand d'une grande lâcheté et, bien sûr, un drame qui se met en place : amour, promesses, jalousie, tragédie, vengeance.
Quelques audaces de réalisation doivent être notées : une course de Dédée en vue subjective dans un escalier, une rixe de marins plutôt onirique (après une bagarre à la fois extrêmement violente et plutôt molle, les marins battus se retrouvent pour ainsi dire crucifiés sur une grille) et, enfin, une conclusion sèche dans laquelle Dédée et Monsieur René, presque sans échanger un mot, accomplissent une vengeance qui ne les consolera de rien.
L'équipe de tournage n'a jamais mis les pieds à Anvers, toute la réalisation ayant été effectuée en studio sur des décors de Maurice Colasson.
Raymond Chirat, « Dédée d'Anvers » Catalogue des films français de long métrage. Films de fiction 1940-1950, Editions Imprimerie Saint-Paul, Luxembourg (ville), 1981, no 223