Le déterminisme social est un concept sociologique selon lequel les pensées et les comportements des humains résultent d'une contrainte sociale qui s'exerce sur eux, la plupart du temps sans que ceux-ci en aient conscience[1]. En conséquence, l'individu ne choisit pas son action, il est contraint de la réaliser sous le poids de la société ; il n'est pas réellement libre d'agir comme il l'entend[2].
Le concept de déterminisme social est à différencier du concept d'interactionnisme ou constructivisme.
Considéré comme le père de la sociologie moderne, Émile Durkheim place le fait social au cœur de la discipline, considérant celui-ci comme l'objet même de la sociologie. Le fait social se caractérise, entre autres, par son extériorité et surtout par son pouvoir coercitif, c'est-à-dire qu'il s'impose aux individus. Ainsi, il devient un pilier de la sociologie d'Émile Durkheim et un précepte de la sociologie holiste. À ce titre, il constitue le paradigme justifiant, dans un paradigme holiste, où la société primerait sur les comportements individuels, et donc valide le déterminisme social[réf. nécessaire]. Dans sa volonté d'établir une nouvelle science sociologique, Durkheim choisit d'envisager des thèmes sur lesquels les processus de décisions individuels sont a priori les plus ouverts en tant que fait social. Un exemple célèbre est son travail sur le suicide[3], qu'il envisage comme un fait social issu d'un comportement induit par un déterminisme social.
Le concept d'habitus créé par le sociologue Pierre Bourdieu, envisagé selon un paradigme holiste par le déterminisme social, permet d'établir une première rupture avec son acception héritée du fait social. En effet, l'habitus constitue certes une matrice des comportements qui favorise la reproduction sociale (et donc un certain déterminisme social), mais il possède également la caractéristique de prendre appui sur les individus eux-mêmes dans les différents aspects de leur existence.
Confrontés à la volonté de penser le changement social, les sociologues se heurtent au constat suivant : la plupart des théories du changement social impliquent une acceptation du déterminisme social, lorsqu'elles tentent de déterminer ce qui s'apparente à des lois d'évolutions; a minima, ces théories recherchent un discriminant à tout changement social, ce qui implique également une reconnaissance du déterminisme social. Se pose alors la question de la possibilité de penser le changement social sans recourir au déterminisme social.
Ces limites justifient l'émergence d'un déterminisme qualifié de « tempéré ». Énoncé en particulier par Raymond Boudon, tenant du paradigme de l'individualisme méthodologique, il consiste en l'écriture de simples propositions conditionnelles, très localisées (dans le temps et l'espace). Boudon a nommé ce type de déterminisme, qui pourrait s'apparenter à une démarche de compréhension du réel, « déterminisme par plaques »[4]. Cette démarche a le mérite de converger selon les réflexions de Karl Popper au sujet de la distinction entre loi absolue (en quelque sorte, l'objectif d'un déterminisme social « strict ») et loi conditionnelle (relative à un déterminisme « tempéré ») : la loi absolue est-elle un objectif raisonnable en sciences humaines dans la mesure où les lois absolues édictées par le passé semblent elles-mêmes reposer implicitement sur des lois conditionnelles ?