Les générateurs magnéto-cumulatifs sont des générateurs de hautes puissances pulsées fonctionnant par compression d'un flux magnétique à l'aide d'explosifs.
Les premiers travaux sur ces générateurs à explosifs ont été réalisés indépendamment, d'abord en Union soviétique dans le centre de recherches nucléaires de l'Institut panrusse de recherche scientifique en physique expérimentale (VNIIEF) à Sarov au début des années 1950, puis aux États-Unis dans le Laboratoire national de Los Alamos.
La compression de flux électromagnétique sans explosif est aussi possible, par l'action directe des forces de Lorentz sur un conducteur traversé par un très fort courant électrique : voir Z-pinch.
Pour mener à bien leurs recherches sur la fusion nucléaire, la nécessité de disposer de générateurs d'impulsions électriques ou magnétiques extrêmement brèves et puissantes est apparue aux scientifiques soviétiques dès le début des années 1950. À l'époque, le seul procédé disponible était le générateur de Marx, qui utilise un stockage capacitif de l'énergie électrique. Le coût prohibitif des condensateurs nécessaires pour obtenir les puissances requises les a conduits à rechercher des techniques alternatives plus économiques. C'est ce qui a abouti au développement des premiers générateurs magnéto-cumulatifs en Union soviétique, à partir d'idées originales d'Andreï Sakharov.
Dans la suite du texte, on utilisera par commodité des termes comme « compression » ou « confinement », fondés sur la similarité de certaines propriétés physiques entre un champ magnétique et un gaz.
Les générateurs magnéto-cumulatifs utilisent une technique dite « de compression de flux magnétique » dont une description élémentaire est fournie plus loin. Cette technique s'appuie sur le fait que, à des échelles de temps suffisamment brèves pour que les pertes de courant induit provoquées par effet Joule soient négligeables, le flux du champ magnétique traversant une surface quelconque délimitée par un conducteur électrique (bobinage par exemple) reste constant lorsque la surface varie.
Cette conservation du flux peut être démontrée[1] à partir des équations de Maxwell. De façon plus intuitive, elle est la conséquence du principe selon lequel tout changement d'état d'un système électromagnétique provoque un phénomène dont les effets tendent à s'opposer à ce changement. La réduction de la surface, en diminuant le flux magnétique, entraîne par réaction la production d'un courant dans le conducteur électrique, tendant à ramener le flux à sa valeur d'origine. Dans les générateurs magnéto-cumulatifs, ce phénomène est obtenu par divers procédés techniques mettant en œuvre des explosifs puissants[2].
Le processus de compression de flux permet ainsi à l'énergie chimique des explosifs d'être transformée en énergie électrique, le flux magnétique étant utilisé comme agent intermédiaire ; ce dernier joue ici un rôle similaire à celui d'un catalyseur dans les réactions chimiques : il permet en effet au processus de transformation de se produire, tout en restant lui-même conservé.
Un champ magnétique externe (lignes bleues) traverse une boucle fermée que l'on assimilera à un conducteur parfait (de résistance nulle). Les neuf lignes de champ représentent le flux magnétique traversant la boucle.
Après diminution du diamètre de la boucle, le flux magnétique, réduit dans la même proportion que la surface, est représenté maintenant par cinq lignes de champ. La variation du flux magnétique induit un courant dans la boucle conductrice (flèches rouges), qui à son tour produit un nouveau champ magnétique (cercles verts). Le sens de circulation du courant est tel que le champ magnétique induit s'ajoute au champ externe, le flux total à l'intérieur de la boucle étant ainsi maintenu (les quatre lignes de champ vertes s'ajoutent aux cinq bleues pour redonner les neuf lignes de champ d'origine).
Lorsque l'on additionne le champ externe et le champ induit, on obtient la configuration finale après compression : le flux magnétique total a été conservé (bien que la distribution du champ magnétique ait été modifiée), et un courant est apparu dans la boucle conductrice.
Si le principe de base de la compression de flux reste toujours le même, les techniques appliquées sont en revanche assez variées. Les scientifiques soviétiques du VNIIEF, pionniers dans ce domaine, ont conçu successivement trois types de générateurs[3] :
De tels générateurs peuvent, selon le cas, être utilisés de façon indépendante, ou bien être assemblés en plusieurs étages successifs, l’énergie produite par un générateur étant transférée au suivant dans lequel elle est amplifiée, et ainsi de suite ; par exemple, le générateur DEMG est prévu pour être alimenté par un générateur de type MK-2.
Au printemps 1952, R.Z. Lyudaev, E.A. Feoktistova, G.A. Tsyrkov, et A.A. Chvileva ont réalisé la première expérience avec ce type de générateur, dans le but d’obtenir des champs magnétiques très élevés.
Le fonctionnement d'un générateur MK-1 est le suivant :
Dès les premières expériences, des champs magnétiques d'un million de gauss ont pu être obtenus, pour un champ initial de 30 kG.
Les générateurs hélicoïdaux ont été principalement conçus pour délivrer un courant intense dans une charge située à distance de sécurité. Ils sont fréquemment utilisés comme premier étage dans un système de génération multi-étages, le courant de sortie étant utilisé pour créer un champ magnétique très intense dans un deuxième générateur.
Le fonctionnement d'un générateur MK-2 est le suivant :
Le générateur MK-2 est particulièrement intéressant pour la production de courants intenses, jusqu'à 108 A, ainsi que de champs magnétiques à très haute énergie, une proportion allant jusqu'à 20 % de l'énergie d'explosion pouvant en effet être convertie en énergie magnétique, et ce pour des valeurs de champ relativement élevées, pouvant atteindre 2×106 Oe.
La réalisation pratique de systèmes MK-2 à performances élevées a nécessité des études approfondies effectuées par une équipe importante ; celles-ci étaient pratiquement achevées en 1956, le premier générateur MK-2 ayant été réalisé en 1952, et des courants allant jusqu’à 100 millions d’ampères ayant été obtenus dès 1953.
Le fonctionnement d'un générateur DEMG est le suivant :
Des systèmes utilisant jusqu'à 25 modules ont été développés au VNIIEF. Des énergies de 100 MJ à 256 MA ont été produites par un générateur d'un mètre de diamètre composé de trois modules.
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