Heinosuke Gosho, né en 1902 à Tokyo, est le fruit d'une liaison adultérine entre Heisuke Gosho et Ono Takayama, une geisha que ce dernier entretient de manière officielle[2]. Son père a eu six autres enfants avec sa femme légitime. La famille Gosho est installée dans le quartier de Kanda à Tokyo et gère une prospère maison de gros en produits d'épicerie[2]. En 1907, à la suite de la mort de l'ainé des enfants Gosho, Heinosuke est retiré à sa mère génétique pour devenir l'héritier mâle destiné à prendre la suite de son père[3].
Si la tradition veut que l'héritier de l'entreprise familiale quitte rapidement l'école pour entrer en apprentissage, le père de Gosho, conscient que les mutations économiques de l'époque nécessitent un plus haut niveau d'instruction, envoie son fils poursuivre ses études. Ainsi Heinosuke intègre en 1916 l'école de commerce privée de Keiō et étudie la comptabilité en cours du soir[2].
Diplômé de Keio en 1921, Heinosuke Gosho se consacre à la poésie et fréquente des cercles littéraires. Inquiet de ces orientations, son père l'oblige à devancer d'un an son service militaire. Après son service l'année suivante, Heinosuke Gosho fait la connaissance de Shirō Kido, futur patron de la Shōchiku, cette rencontre le convainc de choisir l'industrie du cinéma. En conflit avec son père qui s'oppose violemment à ce choix, Heinosuke Gosho quitte le domicile familial[2].
Gosho intègre les studios Kamata de la Shōchiku en , trois mois avant Yasujirō Ozu. Il est alors assistant de Yasujirō Shimazu. Il réalise son premier film en 1925. L'une de ses influences principales vient des films d'Ernst Lubitsch qu'il regarde inlassablement pour développer ses techniques de mise en scène, il est subjugué par Comédiennes (The Marriage Circle) qu'il a vu plus de vingt fois, l'incitant à travailler la technique du gros plan[4].
En 1931, Heinosuke Gosho réalise le premier film entièrement parlant du cinéma japonais, Mon amie et mon épouse (Madamu to nyōbō) avec Kinuyo Tanaka, une comédie où le ressort dramatique s'appuie sur les bruits du voisinage. Le héros est un dramaturge qui se rend chez ses voisins pour protester parce qu'il est dérangé par la musique jazz qu'ils écoutent trop fort[5]. Avant d'être l'égérie de Kenji Mizoguchi, Kinuyo Tanaka a été celle de Gosho qui a réalisé 17 films avec elle entre 1926 et 1936[6].
Pendant les années de guerre, la tuberculose éloigne Gosho des studios. Entre 1937 et 1945, il ne tourne presque plus, devant lutter contre la maladie[2].
En 1941, Gosho quitte la Shōchiku et entre à la Daiei. Il s'engage ensuite en 1945 avec la Tōhō. En 1948, il est l'un des leaders de la grève qui aboutira à une scission de la Tōhō et à la création d'une nouvelle société, la Shintōhō. Heinosuke Gosho lui se retrouve sans emploi pendant deux ans et finit par choisir l'indépendance vis-à-vis des studios en fondant en sa propre société, Studio Eight Productions avec le directeur de la photographie Mitsuo Miura, le réalisateur Shirō Toyoda, les écrivains Jun Takami, Junji Kinoshita et Sumie Tanaka[7]. Nuages épars en 1951 est le premier film produit par cette société[8].
Toute sa vie Heinosuke Gosho s'est évertué à montrer à travers ses films, sur quoi les faibles et les plus pauvres peuvent s'appuyer pour s'affirmer humainement et en tirer fierté malgré des conditions de vie difficiles. Il reste en cela proche de Mikio Naruse qui a été son assistant à la Shōchiku et de Yasujirō Ozu[10]. Il est comme eux l'un des chefs de file du genre shomingeki.
Heinosuke Gosho a tourné une centaine de films entre 1925 et 1968. De sa période muette, seuls deux films ont survécu jusqu'à nos jours, La Danseuse d'Izu (Koi no hana saku Izu no odoriko) et L'Amour (Aibu) tous deux tournés en 1933[10].
Sauf indication contraire, les titres en français se basent sur la filmographie de Heinosuke Gosho dans le livret de la rétrospective « Gosho Heinosuke, beauté & tristesse » du au à la MCJP[11].
En 2006, Heinosuke Gosho fait l'objet d'une rétrospective de quatorze de ses films à la Maison de la culture du Japon à Paris. Elle est intitulée « Heinosuke Gosho : beauté et tristesse, les maîtres méconnus du cinéma japonais : 7e volet » du au [22],[11].
↑Note : si de nombreuses sources (Kotobank, Kinenote, Encyclopædia Britannica) indiquent une date de naissance le pour Heinosuke Gosho, d'autres donnent la date du comme Allcinema ou le Wikipédia en japonais.
↑Note : ce film est absent de la filmographie de Heinosuke Gosho dans le livre que Nolletti lui consacre, de même que dans la base de données JMDb. Par contre il apparait dans le tome II du livre de Tadao Satō, Le Cinema japonais ainsi que sur la filmographie de Kinuyo Tanaka sur le site du musée Tanaka Kinuyo Bunkakan
↑ abcd et eLes maîtres méconnus du cinéma japonais 7e volet : Gosho Heinosuke, beauté & tristesse du 26 janvier au 11 février 2006, Paris, Maison de la culture du Japon à Paris, , 11 p., p. 8 et 9.
↑Tadao Sato (trad. du japonais), Le Cinéma japonais (tome I), Paris, Éditions du Centre Pompidou, , 264 p. (ISBN2-85850-919-0), p. 103.
↑(en) Stuart Galbraith, Japanese Filmography : A Complete Reference to 209 Filmmakers and the Over 1250 Films Released in the United States, 1900 Through 1994, Mcfarland, , 509 p. (ISBN978-0-7864-0032-4), p. 480.