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Reigen 51 (d) |
La Ronde (en allemand : Reigen) est une pièce de théâtre de l'écrivain autrichien Arthur Schnitzler écrite en 1897. La publication de la pièce en 1903, sa censure en 1904 déclenchèrent un long scandale de plus de deux décennies. La pièce ne fut créée que le à Berlin au Kleines Schauspielhaus dans une mise en scène de Felix Hollaender, le à Vienne et le 29 septembre 1932 au Théâtre de l'Avenue dans une mise en scène de Georges Pitoëff[1]. Les premières représentations donnèrent lieu à deux procès gagnés par les partisans de la pièce.
La pièce La Ronde. Dix dialogues fut d'abord intitulée Liebesreigen (La Ronde d'amour). Sur la suggestion d'Alfred Kerr, un de ses amis, Schnitzler accepta de modifier le titre en Reigen, pour minimiser le scandale et les risques de censure prévisibles[2],[3].
La pièce est constituée de dix brefs dialogues entre deux personnages, un homme et une femme qui ont une relation sexuelle. Le spectateur assiste aux préliminaires, au jeu de séduction ou de pouvoir, et à la fin du tête-à-tête. L'acte sexuel lui-même n'est pas mis en scène. La ronde est constituée par le fait que chacun des protagonistes a deux partenaires successifs et apparaît donc dans deux scènes consécutives, et que le dernier personnage a une relation avec la première.
Arthur Schnitzler dépeint la société viennoise de la fin du XIXe siècle, en présentant des personnages issus de toutes les classes sociales. Selon son Journal, Schnitzler commence la pièce — qu'il qualifie d'« hémicycle de dix dialogues » — le , et la termine le . Il écrit à Olga Waissnix le « De tout l'hiver, je n'ai écrit qu'une suite de scènes parfaitement impubliables et sans grande portée littéraire, mais qui, si on l'exhume dans quelques centaines d'années, jettera sans doute un jour singulier sur certains aspects de notre civilisation »[4],[5].
Les personnages ne sont donnés que par leur type. Leur prénom n'est révélé qu'incidemment au cours du dialogue.
Les dialogues fixent l'ordre de la ronde. Les indications scéniques sont réduites. Cependant, Schnitzler indique assez précisément le lieu — dessinant une sorte de topographie viennoise du plaisir — et le moment des différents dialogues.
En raison de sa thématique sexuelle, la pièce déclencha l'un des plus longs scandales de la littérature allemande[6]. Au-delà de la question des « bonnes mœurs » et de la censure, elle servit de vecteur à l'antisémitisme, Schnitzler étant d'origine juive.
La pièce parut à deux cents exemplaires pour la première fois en 1900 pour des amis aux frais de l'auteur[7]. Cependant, même si cette édition n'était pas destinée à la vente, la pièce donna lieu à une recension critique d'Alfred Kerr dans la Neue deutsche Rundschau[8].
La première publication publique par un récent éditeur viennois Wiener Verlag eut lieu le [9],[10]. Le succès fut immédiat : en onze jours, 4 000 exemplaires avaient été écoulés. Les ventes atteignirent 11 000 exemplaires à la fin 1903, puis 20 000 en [11]. Plusieurs critiques parurent dans la presse. Les premières crispations relatives au thème se font alors sentir : le rédacteur en chef du Neuer Wiener Tagblatt refuse d'en faire paraître une critique, et déclare : « Was brauch (sic) ein Jude solche Schweinereien zu schreiben »[12].
L'interdiction en 1904 n'empêcha pas la circulation du texte, qui trouva un éditeur en Allemagne en 1908. La pièce est créée seulement en janvier 1921 à Berlin et entraîne un nouveau procès. Elle faisait toujours scandale à cause de son sujet, la sexualité.
« On assista à des protestations violentes contre “l'ouvrage ignoble de ce juif viennois” […] et on entendit scander “À bas les juifs” ! » À Vienne, la presse conservatrice nationaliste avait entretenu contre l'auteur un climat antisémite en le qualifiant de « pornographe » ou de « cochon de littérateur juif ». Le député chrétien-social Ignaz Seipel sut récupérer politiquement cette hostilité ambiante en affirmant que « la social-démocratie ne peut s'empêcher d'intervenir et de déclencher des manifestations violentes chaque fois qu'il s'agit de défendre une quelconque machination juive[13]. »
La première traduction en français paraît en 1912 chez Stock ; elle est due à Maurice Rémon et Wilhelm Bauer[14].
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