Laurent Cars était l'arrière-petit-fils de Jean Cars, peintre « de peu de notoriété » selon Portalis & Béraldi[1], et de Marie Firens, fille d'un graveur réputé[2] ; et le petit-fils de François Cars, dit François I Cars, graveur, imprimeur, éditeur et marchand d'estampes (Paris -Lyon 1701) et premier graveur de la dynastie Cars, qui s'installera à Lyon au début des années 1660.
Son père, Jean-François Cars (1661-1738), est graveur également, à Lyon. Mais au commencement du XVIIIe siècle, tout en gardant son activité lyonnaise, il s'installe, aussi, à Paris, rue de la Savonnerie, près de la manufacture des Gobelins. C'est à cette adresse qu'il vend l'une de ses premières œuvres, un portrait gravé de Louis XIV[3]. Ce n'est que dans les années 1720 qu'il semble s'être définitivement installé à Paris. Il aura comme élèves, entre autres, François Boucher et Jean-Baptiste Perronneau[4]
« Étant tout jeune encore, il dessina d'après nature à l'Académie de Saint-Luc, se mit sur le rang, chaque fois qu'il y eut concours pour les médailles et remporta la première ; mais plusieurs années s'étant écoulées sans qu'on en distribuât aucune et cette académie ayant un trop grand nombre de couronnes à décerner, décida que tous ceux qui avaient gagné le premier prix concourroient ensemble et qu'un seul vainqueur le remporteroit. Cars rentra dans la lice et triompha de ses rivaux »[6].
Mais, très vite, il revient à la gravure, Émile Dacier le citant avec Jacques-Philippe Le Bas comme élève de Nicolas-Henri Tardieu[7]. En 1724, il peint et grave en même temps le portrait de Michel-Celse-Roger de Bussy-Rabutin, évêque de Luçon. Cars débute surtout sa carrière par l'interprétation d'une œuvre d'un ami de sa famille, François Lemoyne qui vient de livrer l'un de ses chefs-d'œuvre en 1724 : Hercule et Omphale[8] ; toile exposée au Salon de 1725. Le jeune interprète grava également plusieurs autres toiles du maître de Boucher : l'Iris au bain, Andromède délivrée par Persée et Céphale enlevée par l'Aurore. « Ses planches ne sentent point la sujétion d'un graveur copiste, mais elles semblent l'ouvrage d'un même artiste qui aurait conçu et exécuté le même sujet » nous avoues Jean-Baptiste D. Lempereur[9].
Très vite, Cars livre une belle estampe d'après les Fêtes Vénitiennes de Watteau avant de se consacrer, en 32 planches restées célèbres, à l'interprétation des figures des Comédies de Molière d'après des dessins de Boucher (1734).
Les affinités du graveur de 32 ans avec le dernier, peintre d'origine catalane âgé de 74 ans, n'étaient d'ailleurs pas nouvelles. En effet, le père de Laurent Cars, Jean-François, avait également choisi une œuvre de Rigaud pour l'une de ses planches : le portrait du cardinal de Polignac et de l'évêque d'Angers, Michel Poncet de La Rivière (1722).
Laurent Cars fut également un témoin des artistes de son temps en gravant les portraits de Boucher, de Chardin (dont il fut un « merveilleux interprète » écrit Paul Lacroix[10]) et de son épouse, Marguerite Pouget. Auteur d'une vaste planche figurant la reine de France, Marie Leszczyńska, Cars produisit également le portrait d'une danseuse renommée, « La Camargo » d'après Nicolas Lancret et celui de Mademoiselle Clairon d'après Carle Van Loo, non moins célèbre actrice que le roi souhaitait flatter en lui offrant son portrait. Malgré son talent, Cars n'arriva pas à achever la tête de l'actrice et on sollicita dans un premier temps le graveur Wille, en 1763, pour ce travail. Ayant « la vue trop courte », c'est finalement à Beauvarlet que revint le privilège d'achever la planche[11].
Il traduisit également au burin plusieurs œuvres majeures et emblématiques de Jean-François de Troy : Suzanne et les vieillards ; Bethsabée au bain ; L'évanouissement d'Esther.
Installé rue Saint-Jacques à Paris juste face au collège du Plessis[12], Laurent Cars se consacra de plus en plus vers 1750 au commerce des estampes, notamment celles de son élève Jean-Jacques Flipart ainsi que les fonds hérités de son père (thèses). Ce fonds est acheté après sa mort par François Babuty, qui en publie le catalogue[13].
Mort le , « regretté autant par ses qualités morales et l'agrément de son esprit, que par ses talents »[6], Laurent Cars est inhumé le lendemain, , « juste au pied de son banc » en l'église Saint-Benoît-le-Bétourné[12]. À la démolition de celle-ci en 1831, les ossements sont portés aux catacombes.
Recueil d'un grand nombre de vues des plus belles villes, palais, châteaux, maisons de plaisance de France, d'Italie, dessinés et gravés par Israël Sylvestre, quatre volumes, cinq cent cinquante-sept planches, 1750.
Musée Jean-de-La-Fontaine, Château-Thierry, La perdrix ; Le clergé ; L'hymne à l'amour ; Les deux rats, le renard et l'œuf ; Les poissons et le berger qui joue de la flûte, d'après Jean-Baptiste Oudry[34].
Musée Médard, Lunel, livre de René Aubert de Vertot, Histoire des Chevaliers hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, appelés depuis les Chevaliers de Rhodes, et aujourd'hui les Chevaliers de Malte, édité par Rollin, Quillau et Desaint en 1726, contient le portrait de René Aubert de Vertot d'après Jean-François Delyen et d'autres portraits de chevaliers, dont Gérard l'Hospitalier, Jacques de Milly et Antoine de Paulo, gravés par Laurent Cals[35].
Musée du Louvre, Paris, Adam et Ève, d'après François Lemoyne[16] ; Le recueil Julienne, d'après Antoine Watteau[20].
Petit Palais, Paris, Fêtes vénitiennes, d'après Antoine Watteau[21].
Musée Mandet, Riom, Hercule et Omphale, d'après François Lemoyne.
Château de Versailles, Portrait de Michel Anguier, d'après Gabriel Revel ; Portrait de Marie Leszczynska, d'après Carle Van Loo ; Portrait de Charles-Louis de Lorraine[30].
San Francisco De Young Museum, Molière, d'après François Boucher, 1734 ; Jean Siméon Chardin, d'après Charles-Nicolas Cochin[26] ; Jean Philippe d'Orléans d'après Jean Raoux[29].
« Laurent Cars, l'un des meilleurs graveurs du XVIIIe siècle. Il mit dans ses ouvrages un goût qui n'était pas celui des graveurs du siècle précédent, qui peut-être ne lui doit pas être préféré, qui même n'aurait pas convenu aux tableaux que ces graveurs devaient rendre, mais qui fut inspiré à Cars par les gravures de Lemoyne. Les tableaux des grands maîtres d'Italie, ceux de Le Sueur, de Le Brun, de Mignard, avaient dans le faire une sorte d'austérité qui aurait été mal exprimée par l'aimable mollesse que Cars introduisit jusque dans les masses d'ombre. Dans Gérard Audran, le ragoût domine dans les parties de demi-teintes, et dans Cars c'est dans les parties ombrées. Ses chefs-d'œuvre sont les morceaux qu'il a gravés d'après Lemoyne, et surtout l'estampe d'Hercule filant auprès d'Omphale. » - Claude-Henri Watelet et Pierre-Charles Levesque[47]
« Laurent Cars peut être regardé, après Gérard Audran, comme le plus habile graveur dans le grand genre ; son Hercule et Omphale, son Allégorie sur la fécondité de la Reine, la Thèse de Ventadour, sont des chefs-d'œuvre ; le moelleux du pinceau, l'empâtement de la couleur, la finesse de la touche, y sont rendus avec une vérité, un sentiment rares. » - Biographie universelle, ancienne et moderne[6]
« Laurent Cars ne figure pas parmi les graveurs de Boucher, si ce n'est pour une seule pièce : un tableau d'histoire ! Son absence paraît d'autant plus surprenante que, d'une part, ce graveur, à coup sûr l'un des meilleurs de la première moitié du XVIIIe siècle, a été l'interprète favori du maître de Boucher, François Lemoyne, dont il a traduit supérieurement une douzaine de peintures ; que, d'autre part, il a été formé à la gravure en même temps que Boucher par son père Jean-François Cars ; enfin, qu'il a reproduit avec un rare bonheur les dessins de son ancien camarade d'atelier pour le Molière de 1734. » - Émile Dacier[7]
« Laurent Cars fut un des graveurs les plus estimés du XVIIIe siècle. Son dessin est correct et savant, sa touche est mœlleuse et expressive. » - Dictionnaire Bénézit[48]
↑Dictionnaire des graveurs-éditeurs et marchands d'estampes à Lyon aux XVIIe et XVIIIe siècles. Catalogue des pièces retrouvées. Par Sylvie Martin de Vesvrotte et Henriette Pommier. PUL 2002
↑Louis-Abel de Bonafons, abbé de Fontenay, « Dictionnaire des Artistes, ou Notice historique et raisonnée des Architectes, Peintres, Graveurs, Sculpteurs, Musiciens, Acteurs & Danseurs ; Imprimeurs, Horlogers & Méchaniciens » - A Paris chez Vincent, 1776
↑ ab et cBiographie universelle, ancienne et moderne, ouvrage rédigé par une société de gens de lettres et de savants, Louis-Gabriel Michaud, Paris, 1813, tome 7, pages 222-223.
↑ ab et c Émile Dacier, La Gravure française, Larousse, 1944, pages 82-84.
↑ a et b Henri Herluison, Actes d'état civil d'artistes français, peintres, graveurs, architectes, etc. - Extraits des registres de l'hôtel de ville de Paris détruits dans l'incendie du 24 mai 1871, Slatkine Reprints, Genève, 1972.
↑Maxime Préaud, Pierre Casselle, Marianne Grivel, Corinne Le Bitouzé, Dictionnaire des éditeurs d'estampes à Paris sous l'Ancien régime, Paris, Cercle de la Librairie, 1986, p. 74
François Basan, Dictionnaire des graveurs anciens et modernes depuis l'origine de la gravure, avec une notice des principales estampes qu'ils ont gravées, chez De Lormel, Saillant, Veuve Durand, Durand et Dessaint, Paris, 1767.
Encyclopédie méthodique - Beaux-arts dédiés et présentés à Monsieur Vidaud de La Tour, Charles-Joseph Panckoucke à Paris et Plomteux à Liège, 1788.
Karl-Heinrich von Heinecken, Dictionnaire des artistes dont nous avons des estampes avec une notice détaillée de leurs ouvrages gravés, t. III, Bretikopf, Leipzig, 1789, p. 679 et suiv.
Claude-Henri Watelet et Pierre-Charles Levesque, Dictionnaire des arts de peinture, sculpture et gravure, Fuchs, Paris, 1792.
Biographie universelle, ancienne et moderne ouvrage rédigé par une société de gens de lettres et de savants, Louis-Gabriel Michaud, Paris, 1813.
Edmond de Goncourt, Catalogue raisonné de l'œuvre peint, dessiné et gravé d'Antoine Watteau, Rapilly, Paris, 1875.
Paul Lacroix, L'ancienne France - Peintres et graveurs, Firmin-Didot et Cie, Paris, 1888, réédition B.N.F. 2012.
Emilia Dilke, French engravers and draughtsmen of the XVIIIth century, George Bell ans Sons, 1902 (chapitre 6 : Laurent Cars, Flipart and Le Bas).
Émile Dacier, Hubert Vuaflart et Jean Herold, Jean de Julienne et les graveurs de Watteau au XVIIIe siècle, 4 volumes, Maurice Rousseau, libraire à Paris, 1922-1929.
Marcel Roux, Inventaire du fonds français - Graveurs du dix-huitième siècle, tome 2, Bibliothèque nationale, Paris, 1934 (consulter en ligne).
Émile Dacier, La gravure française, Larousse, 1944.
William McAllister Johnson, « La gravure d'art au XVIIIe siècle », Revue de l'art, vol.99, no 1, 1993, pages 29-44 (lire en ligne).
Emmanuel Bénézit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, Gründ, 1999.
Marie-Catherine Sahut, Antoine Watteau et l'art de l'estampe, Le Passage Eds, 2010.
Peter Fuhring, Louis Marchesano, Rémy Mathis et Vanessa Selbach, A Kingdom of images - French prints in the age of Louis XIV, 1660-1715, Getty Research Institute, Los Angeles, 2015.
Giorgio Marini, « Laurent Cars, Joseph Wagner, Charles-Joseph Flipart : le radici francesi dell'incisione di traduzione a Venezia nel Settecento », actes du colloque Invenit et delineavit. La stampa di traduzione tra Italia e Francia dal XVI al XIX secolo, Istituto centrale per la grafica, Rome, .