Une équipe de cinéma tourne une sorte de western : un officier nordiste conduit un prisonnier peau-rouge à travers la nature, accompagné d'un petit groupe d'hommes et de femmes en costumes d'époque, parmi lesquels un journaliste sert d'intermédiaire entre le captif et l'officier ; on voit parfois l'équipe de tournage qui les filme. Les personnages du film tiennent aussi des discours sur le marxisme.
Dans la bande-son, tantôt sans lien direct avec les images et tantôt au contraire en commentant directement celles-ci, des personnages parlent, en faisant référence notamment à Lénine et à la Chine maoïste, de plusieurs sujets consécutifs : la grève, le délégué syndical, les minorités agissantes, l'assemblée générale, la grève active, l'état policier, puis des moyens de lutte contre le capitalisme. Ils s'interrogent sur la manière de faire du cinéma militant et évoquent Dziga Vertov ; on entend ainsi des débats de l'équipe de tournage réunie sous forme d'assemblée générale. Le discours s'oppose aux capitalistes mais aussi aux « révisionnistes », auxquels sont assimilés les délégués syndicaux qui « mentent » et servent en fait les intérêts capitalistes.
À la fin des captifs prennent le contrôle du groupe et miment avec des fusils l'exécution du soldat et de l'intermédiaire. Des indications sont également données sur l'emploi de la violence.
En 1969, Jean-Luc Godard, Jean-Henri Roger et Anne Wiazemsky partent avec l'étudiant Daniel Cohn-Bendit pour Rome, où ils ont l'intention de travailler sur un « western politique », ou plutôt un « western spaghetti gauchiste », avec Gian Maria Volonté comme acteur principal. Le réalisateur Marco Ferreri, un militant de Lotta continua, est également impliqué dans le projet Le Vent d'est. Le financement est important, 220 000 dollars américains, le plus gros budget que Godard ait eu jusqu'alors[2]. Jean-Pierre Gorin ne peut pas participer, il est hospitalisé à Paris à la suite d'un accident de moto, mais il arrivera en cours de tournage pour corriger les positions trop « anarchiques » de Cohn-Bendit.
Exaspérée par l'influence que les jeunes maoïstes dogmatiques exercent sur son mari, Anne Wiazemsky part avec un autre homme et Godard revient à Paris en , en proie à la dépression ; après une tentative de suicide maladroite aux barbituriques, il tente même de se jeter par la fenêtre, bloqué au dernier moment par un ami passant par hasard[3].
Godard et Gorin monteront le film durant quatre mois.
Roberto Chiesi, Jean-Luc Godard, Gremese Editore, (lire en ligne), p. 107
Le Groupe Dziga Vertov est présenté dans Les Cahiers du Cinéma, nos 238-239 (mai-) et 240 (juillet-) ; le no 240 donne la « bande paroles » de Vent d'est (pages 31 à 37).