L'histoire se situe en Normandie et plus précisément sur la côte des Deux-Amants, dont le lai retrace l'origine mythique du nom apporté à ce lieu.
Le roi du Val de Pîtres a une fille très belle et très courtoise, qu'il aime profondément. Lorsqu'on lui enjoint de marier sa fille, il décide de soumettre les prétendants à une épreuve : seul celui qui arrivera à porter sa fille hors de la ville jusqu'au sommet du mont sans se reposer pourra l'épouser. Les prétendants affluent mais échouent tous, si bien que plus personne ne demande sa main. Un jeune homme tombe amoureux de la fille, et leur amour devient réciproque ; mais le jeune homme est bien trop frêle pour réussir l'épreuve. La fille refuse néanmoins de partir avec lui loin de son père. Elle demande à une parente habitant la ville italienne de Salerne[1] de lui préparer un philtre pour donner la vigueur nécessaire au jeune homme. Ce dernier emporte la jeune fille et gravit rapidement la pente. Emporté par son élan et son amour, il se sent le cœur plein de vigueur et refuse de prendre la potion. Il arrive au sommet sans se reposer, mais y meurt d'épuisement. La jeune fille jette la potion, qui tombe se disperse alors sur la contrée, qui devient fertile ; puis la jeune fille meurt de chagrin aux côtés de son amant. Les deux amants sont enterrés au sommet du mont, ce qui donne son nom à la côte des Deux-Amants.
Marie de France attribue deux fois (v.5 et 254) la création du lai des Deus Amanz aux Bretons. Ce lai est également cité dans deux autres textes médiévaux, Guiron le Courtois (v.1235) et Jaufré (v.4460), ce qui tend selon Jeanne Wathelet-Willem à montrer l'existence de plusieurs lais lus ou chantés en cour par des jongleurs, probablement à la cour d'Aliénor d'Aquitaine[4].
↑Dans cette ville se trouve une école de médecine célèbre depuis le IXe siècle. La frontière entre médecine et magie était encore floue. Le mot "phisike" employé par la poétesse désignait autrefois la guérison par magie dans la langue populaire en Bretagne. La parente confectionne un électuaire, terme désignant une préparation médicale, encore utilisée au XXe siècle, notamment par les vétérinaires. Marie de France, Lais, traduit, présenté et annoté par Françoise Morvan, 2008, Actes Sud.
↑White-Le Goff, Myriam, « Bernard Sergent, L’origine celtique des Lais de Marie de France », Cahiers de recherches médiévales et humanistes. Journal of medieval and humanistic studies, (ISSN2115-6360, lire en ligne, consulté le ).