Mohammed Bedjaoui (en arabe : محمد بجاوي), né le à Sidi-Bel-Abbès, est un juriste, haut fonctionnaire, diplomate et homme politique algérien. Il est également une figure importante du droit international public, ayant signé des ouvrages dans cette discipline et officié au sein de la Cour Internationale de justice en tant que juge et président.
Né dans une famille modeste en 1929[1], Mohammed Bejaoui a vu le jour à Sidi-Bel-Abbès, à l’Ouest du pays. Orphelin à quatre ans, il n’a pas eu la chance de connaître son père décédé en 1933. Il grandira dans la grande banlieue de Tlemcen après que son oncle maternel l'ait recueilli. Il rencontre son épouse, feue Leïla Francis, avec qui il se marie en 1962. L'oncle de son épouse, Ahmed Francis, n’est autre que l’ancien premier ministre des Finances de l'Algérie indépendante.
Il est le père de la réalisatrice de cinéma Amal Bedjaoui.
Avant de commencer sa carrière, il fut connu comme l'un des requérants communistes exclus du concours d'accès à l'ENA (école nationale d'administration). Cette discrimination a été sanctionnée dans le célèbre arrêt Barel du Conseil d'État ().
Durant la guerre d'Algérie, M. Bedjaoui a été conseiller juridique du FLN et du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Il figurait aussi parmi la délégation algérienne lors des négociations d’Evian[2].
Il est diplômé de l'Institut d'études politiques de Grenoble en 1952 et docteur en droit de l'université de Grenoble en 1956[3].
Il a occupé le poste ministre de la Justice, de 1964 à 1971. En tant que ministre de la Justice, il s'est notamment manifesté pour avoir refusé la grâce de M. Desiré Drai, français de confession juive qui avait été condamné à mort pour faux monnaye, et ce, alors qu'elle avait été accordée aux deux autres condamnés à mort dans la même affaire (Giovanni Corti, également français, et l'Algérien Ahmed Bouharid)[4]. Il a notamment dans cette affaire tenu personnellement à déclarer que "un tel verdict répond au vœu profond du peuple algérien et jette la lumière crue sur l'originalité de l'expérience algérienne de répression des infractions économiques portant atteinte grave aux intérêts de l'économie nationale"[5]. Outre le traitement différencié appliqué à M. Desire Drai par rapport aux deux autres condamnés, la sentence apparaissait d'autant plus dure qu'il ne s'agissait que d'une tentative (les personnes ayant été arrêtés avant toute diffusion des faux billet) mais surtout car il s'agissait d'un cas d'application rétroactive de la loi pénale, la peine de mort n'étant pas prévu en droit algérien pour l'émission et la diffusion de fausse monnaie à l'époque du délit [4].
Il préside le Conseil constitutionnel de 2002 à 2005[6], Mohammed Bejaoui[7] a été président de la Cour internationale de justice en 1993 et président de la Commission de Surveillance de l’élection présidentielle du . Il est nommé Ministre des Affaires étrangères du au . Il a demandé à être déchargé de ses fonctions pour des raisons personnelles et sa requête a été acceptée.
Après avoir quitté le gouvernement, il est désigné ambassadeur en France, auprès de l'Unesco et de l’ONU (1971-1979). Il fut nommé ambassadeur, représentant permanent de l’Algérie auprès des Nations unies à New York jusqu’à 1982. Durant cette période, outre celui d’être vice-président du Conseil des Nations unies pour la Namibie et président du Groupe de contact pour Chypre, Mohmamed Bejaoui a été coprésident de la Commission d’enquête des Nations unies en Iran pour la libération des diplomates américains retenus en otages à Téhéran (1980). Titulaire de plusieurs diplômes, M. Bejaoui a été juge à la Cour internationale de justice de La Haye pendant près de vingt ans (1982-2001), puis président de Chambre (1984-1986) et président de la Cour (1994-1997)[8].
Bedjaoui est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages qui font autorité en droit international[réf. nécessaire], dont La Révolution algérienne et le Droit, Traités de conventions de l’Algérie, Non-alignement et droit international, Terra nullius, droit historique et autodétermination et Pour un nouvel ordre économique international. Il a donné trois cours à l’Académie de droit international de La Haye, dont le cours général de droit public en 2006. Il a rédigé près de 300 articles portant sur les matières de droit international public, contribuant à améliorer le droit constitutionnel, le droit d’arbitrage commercial international et les sciences politiques.
En , Mohammed Bedjaoui admet avoir introduit Pierre Falcone auprès des autorités algériennes pour appuyer un consortium répondant à l'appel d'offres pour la construction de l'autoroute Est-Ouest, consortium qui a remporté le marché. Ce comportement est dénoncé par Djilali Hadjadj, porte parole de l'Association algérienne de lutte contre la corruption qui y voit un abus de droit, l'intéressé étant alors président du Conseil constitutionnel[9]. En septembre 2020, dans le cadre de la lutte contre la corruption engagée envers d'anciens ministres ou hauts fonctionnaires, son nom apparaît dans la liste de personnalités susceptibles d'être inquiétées[10].
En mars 2021, l'hebdomadaire Jeune Afrique indique que Mohammed Bedjaoui occupe jusqu'à une période récente, un poste de conseiller diplomatique à l'ambassade d'Algérie à Paris, touchant un salaire de 9 000 euros par mois sans exercer d'activité diplomatique. L'hebdomadaire précise que « l’ambassadeur Antar Daoud a (...) décidé de procéder au retrait de ses cartes diplomatique et d’immatriculation »», et précise que « Mohamed Bedjaoui n’exerçait aucune activité diplomatique en échange de ce poste, qui lui avait été accordé lorsque Bouteflika était au pouvoir »[11],[12].