Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS, de l'anglais per- and polyfluoroalkyl substances, que l'on prononce « pifasse »), également appelées polluants éternels du fait de leur persistance dans l’environnement[1], autrefois aussi dénommées composés perfluorés, sont des composés organofluorés synthétiques comportant un ou plusieurs groupes fonctionnelsalkyle per- ou polyfluorés. Elles contiennent au moins un groupement perfluoroalkyle, –CnF2n–[2],[3]. Il existe probablement entre six et sept millions de PFAS[4].
Un sous-groupe des PFAS, les tensioactifs fluorés, possèdent une « tête » hydrophile en plus de la « queue » fluorée[5]. En tant que tensioactifs, ils abaissent plus efficacement la tension de surface de l'eau que leur homologues dont la queue hydrophobe est à base hydrocarbure.
Certaines PFAS (acide perfluorooctanesulfonique (PFOS), Acide perfluorooctanoïque (PFOA) et Acide perfluorononanoïque (PFNA) notamment) ont attiré l'attention des chercheurs, des autorités de réglementation et d'Organisations non gouvernementales environnementales en raison de leur toxicité et de leur écotoxicité, de leur caractère de polluant très persistant, et d'une présence déjà généralisée dans l'eau, l'air, le sol, les pluies et les écosystèmes (faune en particulier) et dans le sang de la population générale humaine[6],[7] et de la faune. Ils sont retrouvés dans les organismes vivants sur toute la planète. Les scientifiques et diverses administrations appellent à rapidement « réglementer, surveiller et gérer » les PFAS[4].
Des études récentes ont mis en œuvre une recherche plus étendue de PFAS dans l'environnement et dans les organismes vivants — notamment basées sur la spectrométrie de masse haute résolution (HRMS) — et incluant des sources ponctuelles et de nouvelles « matrices » jusqu'alors inexplorées, ainsi que des voies de transformation qui n'avaient jamais été explorées par la Recherche publique[4].
Ces études ont mis à jour un grand nombre de PFAS antérieurement non répertoriés, faisant émerger un véritable « monde des PFAS »[4].
Les PFAS sont « une large famille de plus de quatre mille composés chimiques » : avec leurs propriétés antiadhésives, imperméabilisantes, résistantes aux fortes chaleurs, depuis les années 1950, « ils sont largement utilisés dans divers domaines industriels et produits de consommation courante : textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, revêtements antiadhésifs, cosmétiques, produits phytosanitaires, etc. »[15].
Certaines PFAS telles que l'acide perfluorooctanoïque (PFOA), l'acide perfluorooctanesulfonique (SPFO) et l'acide perfluorononanoïque (PFNA) ont attiré l'attention des toxicologues et des écotoxicologues puis des organismes de réglementation pour la double raison de leur persistance dans l'environnement et de leur toxicité, et parce qu'elles sont maintenant retrouvées dans le sang et certains organes de la population générale ; dans le corps des animaux sauvages et domestiques[17],[18],[19],[20] partout sur la terre y compris dans les eaux gelées des pôles et l'air des plus hautes montagnes.
En 2006, une évaluation faite par le gouvernement canadien sur les effets du SPFO, de ses sels et de ses précurseurs sur la santé des Canadiens, sur la base des éléments alors disponibles[21],[22], a conclu que dans la population générale l'exposition à ces produits était insuffisante pour engendrer des effets nocifs sur la santé. « En revanche, l'évaluation écologique a conclu que le SPFO pénètre ou pourrait pénétrer dans l'environnement à des concentrations nocives pour l'environnement[23]. ».
Leur production a été réglementée ou supprimée par des fabricants tels que 3M, DuPont, Daikin et Miteni aux États-Unis, au Japon et en Europe. Des fabricants ont en 2019, en réaction à l'ajout d'un amendement à la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants[26], remplacé le SPFO et l'APFO par des PFAS à chaîne courte, tels que l'acide perfluorohexanoïque (PFHxA), l'acide perfluorobutanesulfonique[27] et le perfluorobutanesulfonate (PFBS)[27].
Les surfactants fluorés à chaîne fluorée plus courte pourraient être moins enclins à s'accumuler chez les mammifères[27], mais ils semblent rester nocifs pour l'humain[28],[29],[30] et pour l'environnement en général[31],[3].
Les coûts sanitaires ont été évalués entre 52 et 84 milliards d'euros pour les seuls pays de l'Espace économique européen[34]. Les coûts annuels cumulés du dépistage environnemental, de la surveillance en cas de contamination, du traitement de l'eau, de la dépollution des sols et de l'évaluation sanitaire seraient quant à eux compris entre 821 millions d'euros et 170 milliards d'euros dans l'EEE plus la Suisse[34].
Les PFAS sont souvent globalement surnommées Forever Chemicals (« Produits chimiques éternels »)[35] ou FC à la suite d'un jeu de mots utilisé dans un éditorial du Washington Post de 2018[36]. Les lettres « F-C » évoquent les symboles du fluor et du carbone, éléments chimiques qui constituent le squelette de ces molécules ; par ailleurs, la liaison carbone-fluor est l'une des liaisons les plus fortes en chimie organique, ce qui confère à ces produits une demi-vie dans l'environnement extrêmement longue (le « Forever » (pour toujours) de l'expression « Forever Chemicals »). Le nom Forever Chemicals est maintenant couramment utilisé dans les médias anglophones, en plus du nom plus technique de substances per- et polyfluoroalkylées, ou PFAS[37],[38],[39],[40].
Une enquête collaborative lancée par Le Monde, et 17 partenaires dont NDR Info, WDR, Süddeutsche Zeitung, Radar Magazine, Le Scienze, The Investigative Desk et NRC Handelsblad dans le cadre du projet international « Forever Pollution Project », a documenté et cartographié l'ensemble de la contamination de l'Europe par les substances PFAS[41].
Selon cette première « carte de la pollution éternelle », l'Europe compterait plus de 17 000 sites contaminés à plus de 10 nanogrammes par litre (ng/l) qui est le niveau auquel les autorités doivent commencer à s'alerter, dont plus de 2 000 à des niveaux jugés dangereux (plus de 100 ng/l)[35], selon des analyses environnementales faites entre 2003 et 2023[41]. S'y ajoutent près de 21 500 sites présumés contaminés, qui sont des industries ou activités utilisatrice et/ou émettrice de PFAS (ex. : bases militaires utilisant des mousses anti-incendie « AFFF »)[41].
Ce travail, inspiré de celui du PFAS Project Lab (Boston) et du « PFAS Sites and Community Resources Map » aux États-Unis, repose sur l'aggrégation de données publiques et non publiques, lesquelles ont permis de lister et positionner cartographiquement un grand nombre de sites contaminés et présumés contaminés. L'enquête s'est appuyée sur un groupe de sept spécialistes, à la manière du « peer-reviewed journalism », en adoptant systématiquement « l'approche la plus prudente possible », ce qui implique, précisent ses auteurs, que dans le contexte d'incomplétude de données (certaines ne sont pas accessibles et il n'y a pas de prélèvements exhaustifs dans aucun des pays européens, « aussi impressionnant qu'il soit, le nombre de sites contaminés et présumés contaminés que montre notre carte est très largement sous-estimé »[41]. Ces polluants « accompagneront l'humanité pendant des centaines, voire des milliers d'années ». Selon l'étude ils sont produits en Europe par vingt producteurs puis utilisés par 232 utilisateurs industriels « pour fabriquer des plastiques « haute performance », des peintures et des vernis, des pesticides, des textiles imperméabilisés, d'autres produits chimiques, etc. ».
En , 11 responsables politiques européens ont fait doser les PFAS dans leur sang, pour susciter l'attention sur ce sujet, et démontrer que les riverains des usines chimiques ne sont pas les seuls concernés : le sang de chacun de ces dirigeants en contenait, avec dépassement des seuils de sécurité indicatifs chez 5 d'entre eux[42]. 7 PFAS sur 13 recherchés ont été décelés dans l'organisme de Frans Timmermans, ancien vice-président S&D de la Commission européenne, qui dénonce avec véhémence la prolifération des PFAS à l'intérieur de l'Union européenne. L'étude a notamment révélé la présence systématique de PFOA et de PFOS dans le sang des dirigeants étudiés, bien qu'interdits dans l'Union européenne respectivement depuis 2020 et 2009[42].
En 2021, un rapport (datant de 2018) sur la pollution de l'eau potable par des PFAS sur la base aérienne de Chièvres en 2017 est divulgué par le PTB au Parlement wallon[43]. À la suite de tests de dépistage du PFOS et du PFOA par l'armée américaine, des taux dépassant la norme de l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (EPA) ont été relevés[44]. Les résultats des tests sont partagés avec la Société wallonne des eaux (SWDE) qui confirme que l'eau est considérée comme potable d'après les normes belges (qui ne comprennent pas à ce moment-là de norme concernant les PFAS)[44],[45]. Malgré l'avis positif de la SWDE, de l'eau en bouteille est mise à disposition des soldats, mais la population de Chièvres n'est pas avertie[44],[46].
À Anvers (Belgique), l'usine 3M a contaminé l’air, le sol et le sang de près de 800 personnes vivant à proximité de l’usine chimique avec du PFOS[47],[48].
À Korsør (Danemark), un centre de formation à la lutte contre les incendies a contaminé des terres agricoles et du bétail avec du PFOS et du PFHxS[49],[50],[51].
En France en 2023, la pollution aux PFAS serait largement sous-estimée selon l'ONG Générations futures[52],[53]. Des eaux de surface sont polluées[54].
Une étude effectuée par la Direction régionale de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt (DRAAF) en 2022 à proximité des usines de Daikin et Arkema au Sud de Lyon révèle la contamination élevée de légumes et d'œufs de poules par des PFAS. Il est recommandé aux particuliers de ne pas consommer ces produits[55],[56],[57]. Daikin Chemical arrête l'utilisation de PFAS sur ce site en 2008 et un arrêté préfectoral contraint Arkema à faire de même d'ici fin 2024[57]. La « Vallée de la chimie » est reconnue comme le site français le plus pollué par les PFAS[58],[59].
En , le gouvernement définit un plan d'action[60] et soutient le projet déposé par l'Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas, la Suède et la Norvège[61],[62].
En , le député Nicolas Thierry estime que le plan d'action du gouvernement est une « diversion » ; il dépose une proposition de loi interdisant dès 2025 les produits contenant des PFAS lorsqu'une alternative existe, avant une interdiction totale en 2027[63].
Le , 34 communes, 35 personnes et 7 associations de pêcheurs originaires de territoires situés autour du fleuve du Rhône déposent plainte contre les entreprises Arkema et Daikin pour « mise en danger de la vie d'autrui », « écocide », « pollution des eaux » et atteinte au règlement de l'Union européenne sur les substances chimiques[64],[65].
L'été 2023, le député (Modem) du Rhône Cyrille Isaac-Sibille, est missionné[66] par le gouvernement pour produire un rapport sur les PFAS (notamment responsables d'une contamination « éternelle » de la vallée du Rhône où en 2024, 150 000 habitants reçoivent une eau « non-conforme »)[67]. Le député remet un rapport au ministre de l'Écologie du Gouvernement Attal, le [68]. Le rapporteur promeut une avancée de la science sur le sujet des PFAS, d'en établir la liste exhaustive, dont pour évaluer leur niveau de toxicité et fixer règlementairement des seuils à ne pas dépasser dans les différents milieux. Le rapport contient 18 préconisations et appelle à « agir urgemment » pour faire cesser les rejets industriels de PFAS, sans attendre de restriction européenne[68] ; recenser l'intégralité des sites pollués ; contrôler les PFAS dans tous les milieux : eaux de surface et eaux profondes, sols des jardins, des écoles, des crèches, des stades autour des sites industriels, air intérieur et atmosphère et dans les denrées alimentaires ; créer un fonds PFAS alimenté par l'industrie sur le principe du « pollueur payeur » pour financer la dépollution (« le coût total du traitement des eaux potables et usées pour (les) éliminer a été estimé à 238 milliards d'euros par an dans l'Union européenne »)[68]. Le député repousse à 2026 ou 2027 de nouvelles règlementations pour les industriels, pour la dépollution[69].
Une étude de chercheurs de l'Université de Stockholm (Suède)[72], parue en , montre qu'à cause des PFAS, « l'eau de pluie, partout dans le monde, est jugée impropre à la consommation »[73] et même dans les régions les plus isolées du monde[74].
À Ronneby, les mousses anti-incendie d'un aéroport militaire ont contaminé l'eau potable et le sang des riverains avec plusieurs PFAS[75],[76].
À la fin des années 1970, des scientifiques de 3M, qui est une gros utilisateur et le principal fournisseur de ces produits, prennent conscience de leur toxicité pour les animaux et de leur accumulation dans le sang des êtres humains, mais gardent plus ou moins le silence. À la fin des années 1990, une autre scientifique de l'entreprise établit que la contamination est mondiale ; mais elle rencontre des résistances lorsqu'elle révèle en interne ses conclusions, et est écartée du dossier[77].
En 2019, Robert Bilott[78] lança une nouvelle action contre les entreprises chimiques 3M, DuPont et Chemours, une spin-off (filiale) de DuPont, accusées d'avoir sciemment dissimulé pendant plus de 20 ans les risques associés à ces substances. L'action vise à obtenir le statut de recours collectif au nom de toutes les personnes vivant aux États-Unis qui ont été exposées non seulement au Acide perfluorooctanoïque (PFOA), mais aussi à des composés apparentés connus sous le nom de PFAS, abréviation de (en)per- and polyfluoroalkyl substances. Ces produits pratiquement indestructibles s'accumulent dans le corps humain et dans l'environnement. Elles sont responsables d'une famille de risques de santé publique, notamment l'affaiblissement du système immunitaire, le dysfonctionnement du foie et des malformations congénitales[79].
La prévalence de ces composés chimiques récemment devenus omniprésents est multiple. Ainsi, en 2019, une étude des sérums sanguins des femmes enceintes d'un panel[80] de 457 dyades mère-enfant a montré que la totalité des échantillons de sérum maternel prélevés pendant la grossesse en contenaient, avec des concentrations médianes (intervalle interquartile) de 13,8 ng/mL (11,0, 17,7), 3,0 ng/mL (2,3, 3,8), 1,9 ng/mL (1,4, 2,5) et 0,4 ng/mL (0,3, 0,5) pour le SPFO, PFOA, PFHxS et PFNA, respectivement.
Dans une étude d'une population d'Arvidsjaur ayant accidentellement consommé de l'eau contaminée par des mousses utilisés par les pompiers de l'aéroport, la demi-vie de ces produits dans le corps humain pu être estimée[81]. Pour les PFAS à chaine longue : 2,86 années pour le PFHxS, 2,91 années pour le L-PFOS. Pour ceux à chaine courte, la demi-vie est de 1,46 années pour PFHpS. Les demi-vies les plus courtes étaient de 0,12 années pour le PFBA et 0,17 années pour le PFHpA.
En 2022, une autre étude a montré que le don de sang réduit durablement le taux de PFAS présent dans le corps humain. L'effet est le plus important dans le cas de dons de plasma, avec une réduction de 30 % de la concentration médiane après un an de dons espacés de trois mois[82].
In utero : concernant les nourrissons de sexe masculin : plus le sang de la mère en contenait lors de la grossesse, plus le risque d'avoir un enfant de faible poids à la naissance augmentait (idem pour le risque de petit périmètre crânien) et le développement foetal (avec risque accru de faible poids à la naissance)[83].
L'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) « considère que la diminution de la réponse du système immunitaire à la vaccination constitue l'effet le plus critique pour la santé humaine »[15].
L'usage des PFAS est questionné aux États-Unis où ils sont notamment utilisés comme additifs du plastique de nombreux contenants. Le recyclage de ces plastiques conduit à une accumulation des PFAS[96].
Les feux de catégorie B (feux de solvants inflammables) sont combattus par des mousses épaisses à base d'agents fluorés (commercialisées depuis les années 1970 par la société 3M). Ils sont efficaces mais « nocifs pour l'environnement et la santé »[97]. Des alternatives moins toxiques ou non toxiques sont recherchées, par exemple à base de polysaccharides tels que la gomme xanthane[97].
L'APFO, ses sels et les composés apparentés ont été inscrit en 2019, l'acide perfluorohexane sulfonique (PFHxS), ses sels et les composés apparentés en 2022[100].
À partir du , la Directive de l'Union européenne 2020/2184 du impose aux États membres de fournir une eau potable respectant des valeurs maximum concernant, entre autres parmi 34 substances ou catégories mentionnées, le bisphénol A (2,5 µg/L), les chlorates (0,25 mg/L), les chlorites (0,25 mg/L), les acides haloacétiques (60 μg/L), la microcystine-LR (1,0 μg/L), les nitrates (50 mg/L), les nitrites (0,50 mg/L), chaque pesticide (0,10 μg/L), la somme des pesticides (0,50 μg/L), le total des PFAS (0,50 µg/L), la somme des vingt PFAS considérées comme préoccupantes (0,10 µg/L), les cyanures (50 μg/L), le cadmium (5,0 μg/L), le chrome (25 μg/L), le cuivre (2,0 mg/L), le plomb (5,0 μg/L), le mercure (1,0 μg/L), le nickel (20 μg/L), le sélénium (20 μg/L) et l'uranium (30 µg/L) [45]. Les fournisseurs d'eau doivent également vérifier les concentrations de ces substances à partir de la même date[45].
En , sur base de l'avis de l'EFSA, le Danemark fixe des limites pour les PFAS totales (0,1 µg/L) et la somme des PFOA, PFOS, PFNA et PFHxS (0,002 µg/L) dans l'eau potable[72],[103].
En 2019, le Conseil de l'Europe demande à la Commission européenne d'élaborer un plan d'action pour éliminer toutes les utilisations non essentielles des PFAS en raison des preuves croissantes d'effets néfastes causés par l'exposition à ces substances, des preuves de la présence généralisée de PFAS dans l'eau, le sol, les articles et les déchets et la menace que cela peut représenter pour l'eau potable[106].
À l'initiative de l'Allemagne et des Pays-Bas, ces pays, ainsi que le Danemark, la Norvège et la Suède, ont soumis une proposition dite de restriction basée sur le règlement Enregistrement, évaluation et autorisation des produits chimiques (REACH) pour obtenir une interdiction européenne de la production, de l'utilisation, de la vente et de l'importation de PFAS[107]. La proposition stipule qu'une interdiction est nécessaire pour toute utilisation de PFAS, avec des délais différents de prise d'effet pour différentes applications (immédiatement après l'entrée en vigueur de la restriction, cinq ans après ou douze ans après), selon la fonction et la disponibilité d'alternatives. La proposition n'a pas évalué l'utilisation des PFAS dans les médicaments, les produits phytosanitaires et les biocides, car des réglementations spécifiques s'appliquent à ces substances (ex. : Règlement relatif aux produits biocides, directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques) dont la procédure d'autorisation de mise sur le marché (AMM) est supposée tenir compte des risques connus ou suspectés pour la santé et l'environnement (et en outre, le principe de précaution figure depuis 1992 dans le Traité de Maastricht[108],[109])
« La politique de la Communauté […] vise un niveau de protection élevé […]. Elle est fondée sur le principe de précaution et d'action préventive, sur le principe de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement et sur le Principe pollueur-payeur. »
La proposition est soumise le et publiée par l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) le de la même année. Du au , les citoyens, entreprises et autres organisations peuvent soumettre leurs vues sur la proposition lors d'une consultation publique[110]. Sur la base des informations contenues dans la proposition de restriction et de la consultation, deux comités de l'ECHA donnent un avis respectivement sur le risque et sur les aspects socio-économiques de la restriction proposée. Dans l'année suivant la publication, les avis sont envoyés à la Commission Européenne, qui fait ensuite une proposition finale qui est soumise aux États membres de l'UE pour discussion et décision[111]. Dix-huit mois après la publication de la décision de restriction, l'interdiction entrera en vigueur. La restriction définitive pourrait bien entendu différer de la proposition[110].
Les eaux de pluie contenant des PFAS se retrouvent dans les rivières, fleuves, barrages hydrauliques ou nappes phréatiques avant les captages ou pompages. Les eaux captées ou pompées doivent subir des traitements de potabilisation[112].
En 2024, elle passe par une combinaison de traitements supplémentaires qui ne sont pas appropriés à traiter de très grande quantité d'eau, de sol ou de sédiment : adsorption au charbon, échange d'ions, nanofiltration et/ou osmose inverse[114]. Dans l'eau, l'adsorption au charbon activé et l'échange d'ions permettent chacun d'éliminer jusqu'à 100 % des PFAS, la nanofiltration et l'osmose inverse permettent quant à eux d'éliminer chacun plus de 90 % des PFAS[114]. Les PFAS ne sont pas détruits, mais déplacés.
Concernant les résidus du traitement contenant ces PFAS, leur élimination se fait classiquement par incinération à haute température[113], une technique adaptée et rendue obligatoire dans l'UE par le « règlement européen POP » CE no 850/2004 (polluants organiques persistants)[115].
La recherche explore d'autres pistes de destruction des PFAS, basées sur le traitement électrochimique de l'eau, avec une technologie à ce jour consommatrice d'énergie, et nécessitant d'améliorer les électrodes utilisées, mais avec l'espoir d'une méthode ne nécessitant pas de réactifs chimiques, et ne générant pas de déchets résiduels intermédiaires ou finaux problématiques ;
méthode de radiolyse, c'est à dire décomposition des PFAS par un rayonnement très énergétique (radioactivité) en présence d'un catalyseur (sulfite par exemple), mais la méthode ne semble adaptée qu'aux petites molécules[116] ;
méthodes basée sur des électrodes nanostructurées, par exemple en éponge de graphène, « le premier matériau d’anode dont l’inertie électrochimique au chlorure a été démontrée et qui peut encore dégrader les PFAS » (et d'autres micropolluants organiques persistants et toxiques), étudiées par le projet GRAPHEC[117], financé par l'Union européenne[118] ;
oxydation électrochimique au moyen d'électrodes BDD ;
utilisation de diamants, proposé par Element Six (filiale du diamantaire De Beers, spécialisée dans les diamants synthétiques), et Lummus Technology pour doper les électrodes l’électro-oxydation et permettre des densités de courant plus élevées[119].
↑(en) Robert C. Buck, James Franklin, Urs Berger, Jason M. Conder, Ian T. Cousins, Pim de Voogt, Allan Astrup Jensen, Kurunthachalam Kannan, Scott A Mabury et Stefan P.J. van Leeuwen, « Perfluoroalkyl and polyfluoroalkyl substances in the environment: Terminology, classification, and origins », Integrated Environmental Assessment and Management, vol. 7, no 4, , p. 513–541 (PMID21793199, PMCID3214619, DOI10.1002/ieam.258).
↑ a et bRitscher A. et al., « Zürich Statement on Future Actions on Per- and Polyfluoroalkyl Substances (PFASs) », Environmental Health Perspectives, vol. 126, no 8, , p. 084502 (DOI10.1289/EHP4158)
↑ abcde et f(en) Hanna Joerss et Frank Menger, « The complex ‘PFAS world’ - How recent discoveries and novel screening tools reinforce existing concerns (CC-BY-SA) », Current Opinion in Green and Sustainable Chemistry, vol. 40, , p. 100775 (ISSN2452-2236, DOI10.1016/j.cogsc.2023.100775, lire en ligne, consulté le ).
↑(en) H. J. Lehmler, « Synthesis of environmentally relevant fluorinated surfactants—a review », Chemosphere, vol. 58, no 11, , p. 1471–1496 (résumé).
↑(en) Antonia M. Calafat, Lee-Yang Wong, Zsuzsanna Kuklenyik et John A. Reidy, « Polyfluoroalkyl Chemicals in the U.S. Population: Data from the National Health and Nutrition Examination Survey (NHANES) 2003–2004 and Comparisons with NHANES 1999–2000 », Environmental Health Perspectives, vol. 115, no 11, , p. 1596–1602 (ISSN0091-6765 et 1552-9924, DOI10.1289/ehp.10598, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Zhanyun Wang, Ian T. Cousins, Urs Berger et Konrad Hungerbühler, « Comparative assessment of the environmental hazards of and exposure to perfluoroalkyl phosphonic and phosphinic acids (PFPAs and PFPiAs): Current knowledge, gaps, challenges and research needs », Environment International, vol. 89-90, , p. 235–247 (DOI10.1016/j.envint.2016.01.023, lire en ligne, consulté le )
↑I.T. Cousins, J.H. Johansson, M.E. Salter, B. Sha et M. Scheringer, Outside the safe operating space of a new planetary boundary for per- and polyfluoroalkyl substances (PFAS) ; Environ. Sci. Technol., 2022, 10.1021/acs.est.2c02765 ; acs.est.2c02765.
↑(en) « Toward a New Comprehensive Global Database of Per- and Polyfluoroalkyl Substances (PFASs): Summary Report on Updating the OECD 2007 List of Per- and Polyfluoroalkyl Substances (PFASs) » (rapport), Series on Risk Management, OECD, no 39, (lire en ligne).
↑Whitehead H.D., Venier M., Wu Y., Eastman E., Urbanik S., Diamond M.L., Shalin A., Schwartz-Narbonne H., Bruton T.A., Blum A. et Wang Z., « Fluorinated Compounds in North American Cosmetics », Environmental Science & Technology Letters, vol. 8, no 7, , p. 538–544 (DOI10.1021/acs.estlett.1c00240, hdl20.500.11850/495857, S2CID236284279, lire en ligne [archive du ], consulté le ).
↑Calafat A.M., Wong L.Y., Kuklenyik Z., Reidy J.A. et Needham L.L., « Polyfluoroalkyl chemicals in the U.S. population: data from the National Health and Nutrition Examination Survey (NHANES) 2003-2004 and comparisons with NHANES 1999-2000 », Environmental Health Perspectives, vol. 115, no 11, , p. 1596–602 (PMID18007991, PMCID2072821, DOI10.1289/ehp.10598).
↑Wang Z., Cousins I.T., Berger U., Hungerbühler K. et Scheringer M., « Comparative assessment of the environmental hazards of and exposure to perfluoroalkyl phosphonic and phosphinic acids (PFPAs and PFPiAs): Current knowledge, gaps, challenges and research needs », Environment International, vol. 89-90, , p. 235–47 (PMID26922149, DOI10.1016/j.envint.2016.01.023).
↑Alexandre-Reza Kokabi, « Téflon : les molécules toxiques « s'incrustent partout, jusqu'aux tréfonds de l'Arctique » : Entretien avec Xavier Coumoul », Reporterre, (lire en ligne).
↑Gouvernement canadien (2006) Rapport sur l'état des connaissances scientifiques sous-jacentes à une évaluation préalable des effets sur la santé : Le sulfonate de perfluorooctane, ses sels et ses précurseurs contenant la fraction C8F17SO2 ou C8F17SO3 (janvier).
↑ Gouvernement canadien (2006) Rapport d'évaluation écologique préalable sur le sulfonate de perfluorooctane, ses sels et ses précurseurs (juin).
↑Blum A., Balan S.A., Scheringer M., Trier X., Goldenman G., Cousins I.T., Diamond M., Fletcher T., Higgins C., Lindeman A.E., Peaslee G., de Voogt P., Wang Z. et Weber R., « The Madrid Statement on Poly- and Perfluoroalkyl Substances (PFASs) », Environmental Health Perspectives, vol. 123, no 5, , A107-11 (PMID25932614, PMCID4421777, DOI10.1289/ehp.1509934)
↑Wang Z., Cousins I.T., Scheringer M. et Hungerbuehler K., « Hazard assessment of fluorinated alternatives to long-chain perfluoroalkyl acids (PFAAs) and their precursors: status quo, ongoing challenges and possible solutions », Environment International, vol. 75, , p. 172–9 (PMID25461427, DOI10.1016/j.envint.2014.11.013)
↑Birnbaum L.S. et Grandjean P., « Alternatives to PFASs: perspectives on the science », Environmental Health Perspectives, vol. 123, no 5, , A104-5 (PMID25932670, PMCID4421778, DOI10.1289/ehp.1509944)
↑Perry M.J., Nguyen G.N. et Porter N.D., « The Current Epidemiologic Evidence on Exposures to Poly- and Perfluoroalkyl Substances (PFASs) and Male Reproductive Health », Current Epidemiology Reports, vol. 3, no 1, , p. 19–26 (ISSN2196-2995, DOI10.1007/s40471-016-0071-y)
↑(en) Christian N.P., Chemical toxicity of per- and poly-fluorinated alkyl substances (PFAS) : in "Wexler P. Encyclopedia of Toxicology". Fourth Edition, Academic Press, (DOI10.1016/B978-0-12-824315-2.01052-6), p. 747-756.
↑(en) Angelica P. Ahrens, Tuulia Hyötyläinen, Joseph R. Petrone […] Matej Orešič, Eric W. Triplett, Johnny Ludvigsson, « Infant microbes and metabolites point to childhood neurodevelopmental disorders », Cell, vol. 187, no 8, , p. 1853-1873 (DOI10.1016/j.cell.2024.02.035, lire en ligne, consulté le ).
↑ ab et cDirective (UE) 2020/2184 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relative à la qualité des eaux destinées à la consommation humaine (refonte) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (à transposer au plus tard le 12 janvier 2023), vol. OJ L, (lire en ligne)
↑(en) Kristin J. Marks, Anya J. Cutler, Zuha Jeddy et Kate Northstone, « Maternal serum concentrations of perfluoroalkyl substances and birth size in British boys », International Journal of Hygiene and Environmental Health, vol. 222, no 5, , p. 889–895 (PMID30975573, PMCIDPMC6571162, DOI10.1016/j.ijheh.2019.03.008, lire en ligne, consulté le )
↑(en-US) Nidhi Subbaraman, « What to Know About ‘forever chemicals’ and Your Health », Wall Street Journal, (ISSN0099-9660, lire en ligne, consulté le ).
↑(en-US) Lisa Friedman, « Biden Administration to Restrict Cancer-Causing ‘Forever Chemicals' », The New York Times, (ISSN0362-4331, lire en ligne, consulté le )
↑(en-GB) Damian Carrington et Damian Carrington Environment editor, « ‘Forever chemicals’ linked to infertility in women, study shows », The Guardian, (ISSN0261-3077, lire en ligne, consulté le ).
↑(en-GB) Tom Perkins, « ‘Forever chemicals’ detected in all umbilical cord blood in 40 studies », The Guardian, (ISSN0261-3077, lire en ligne, consulté le ).
↑Gary Dagorn et Stéphane Horel, « « Polluants éternels » : quels sont les effets des PFAS sur la santé ? », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
↑(en) « Some Chemicals Used as Solvents and in Polymer Manufacture », dans IARC Monographs on the Evaluation of Carcinogenic Risks to Humans, vol. 110, (lire en ligne).
↑Suzanne E. Fenton, Jessica L. Reiner, Shoji F. Nakayama, Amy D. Delinsky, Jason P. Stanko, Erin P. Hines, Sally S. White, Andrew B. Lindstrom, Mark J. Strynar et Syrago-Styliani E. Petropoulou, « Analysis of PFOA in dosed CD-1 mice. Part 2: Disposition of PFOA in tissues and fluids from pregnant and lactating mice and their pups », Reproductive Toxicology, vol. 27, nos 3–4, , p. 365–372 (PMID19429407, PMCID3446208, DOI10.1016/j.reprotox.2009.02.012)
↑Sally S. White, Jason P. Stanko, Kayoko Kato, Antonia M. Calafat, Erin P. Hines et Suzanne E. Fenton, « Gestational and Chronic Low-Dose PFOA Exposures and Mammary Gland Growth and Differentiation in Three Generations of CD-1 Mice », Environmental Health Perspectives, vol. 119, no 8, , p. 1070–1076 (PMID21501981, PMCID3237341, DOI10.1289/ehp.1002741)
↑ a et bArnault J (2018) Formulation de nouvelles mousses d'extinction d'incendie avec impact réduit sur environnement (Doctoral dissertation, Lyon) (résumé).
↑(en) Arlene Blum, Simona A. Balan, Martin Scheringer et Xenia Trier, « The Madrid Statement on Poly- and Perfluoroalkyl Substances (PFASs) », Environmental Health Perspectives, vol. 123, no 5, (ISSN0091-6765 et 1552-9924, DOI10.1289/ehp.1509934, lire en ligne, consulté le )
↑Art. 130R devenu 174 avec le Traité d'Amsterdam) qui donne à l'Union européenne l'objectif de promouvoir une croissance soutenable en respectant l'environnement, et qui précise notamment que ce principe s'applique aussi à la « protection de la santé des personnes » ; Article 130 R relatif à l'environnement.
↑(en) Zhiwen Jiang, Sergey Denisov, Daniel Adjei et Mehran Mostafavi, « Overlooked Activation Role of Sulfite in Accelerating Hydrated Electron Treatment of Perfluorosulfonates », Environmental Science & Technology, vol. 58, no 21, , p. 9427–9435 (ISSN0013-936X et 1520-5851, DOI10.1021/acs.est.4c01444, lire en ligne, consulté le ).
(en) Emma L. Schymanski, Parviel Chirsir, Todor Kondic, Paul A. Thiessen, Jian Zhang et Evan E. Bolton, PFAS and Fluorinated Compounds in PubChem Tree [PDF], 21 juin 2023, National Center for Biotechnology Information (NCBI) et Luxembourg Centre for Systems Biomedicine (LCSB), lire en ligne.
(en) Richard H. Anderson, Timothy Thompson, Hans F. Stroo et Andrea Leeson, « US Department of Defense–Funded Fate and Transport Research on Per‐ and Polyfluoroalkyl Substances at Aqueous Film–Forming Foam–Impacted Sites », Environmental Toxicology and Chemistry, vol. 40, no 1, , p. 37-43 (ISSN0730-7268 et 1552-8618, PMID32077141, PMCIDPMC7984261, DOI10.1002/etc.4694, lire en ligne).