La thermodynamique hors équilibre est le domaine de recherche étudiant les phénomènes de relaxation et de transport au voisinage de l'équilibre thermodynamique. Il s'agit là de phénomènes dissipatifs donc irréversibles, liés à une augmentation de l'entropie.
Les méthodes présentées ici relèvent de la thermodynamique proprement dite, qui permet de donner les lois caractérisant un phénomène.
La base du raisonnement est le postulat suivant lequel les états d'équilibre d'un système isolé sont décrits au niveau macroscopique par un certain nombre de variables extensives (conservatives) , représentées par leur densité volumique . Chacun de ces états est caractérisé par son entropie où est une fonction positive, concave, continûment différentiable[12], ce qui exclut l'étude des changements de phase. Il est possible de partitionner le système en sous-systèmes (indice ) pour lesquels on définit une entropie . Ces entropies sont additives et extensives :
Les échanges autorisés entre sous-systèmes peuvent être scalaires (réactions chimiques), vectoriels (masse, énergie) ou tensoriels (quantité de mouvement). Ils provoquent une variation des variables compatible des lois de conservation.
En dérivant l'expression de on obtient la relation de Gibbs-Duhem sur les variables intensives conjuguées et donc les affinités :
étant concave la relation est inversible : connaissant on peut en déduire .
La thermodynamique hors équilibre postule également l'existence d'un équilibre thermodynamique local pour chacun des sous-systèmes élémentaires associés à un élément de l'espace-temps . Ce postulat permet de définir des quantités macroscopiques locales : énergie, température, etc. On peut justifier cette hypothèse en supposant que dans le milieu le gradient de est tel que la variation de cette quantité sur une distance microscopique représentative (par exemple le libre parcours moyen dans un gaz) est petite devant la fluctuation statistique à l'équilibre de . Cette hypothèse est habituellement amplement justifiée.
À chacun des sous-systèmes élémentaires ainsi définis on associe une entropie. L'entropie globale définie ci-dessus est maximale à l'équilibre thermodynamique global. Le processus de marche vers cet équilibre n'est possible que pour un système isolé et se fait en respectant à chaque instant l'équilibre local, ce qui implique l'existence de constantes de temps très différentes pour chacune des échelles. Le mécanisme correspondant est un mécanisme de relaxation.
Dans le cas où le système échange avec le milieu extérieur le problème correspond à un mécanisme de transport. Dans ce cas on suppose également vérifié l'équilibre thermodynamique local.
Si l'on est proche de l'équilibre thermodynamique[N 1] on peut exprimer la relation entre flux et affinités sous forme linéaire :
Dans cette équation on voit les effets directs : un flux lié à l'affinité correspondante par l'intermédiaire de . Mais on peut aussi voir les effets indirects : l'affinité est responsable du flux par l'intermédiaire du terme .
Toutefois ce couplage n'existe dans un milieu isotrope sans champ magnétique que pour des quantités de dimension analogue : scalaire, vectorielle ou tensorielle. Ceci découle d'une analyse des symétries et invariances du système comme dans le principe de Curie[13].
Les coefficients cinétiques ne dépendent que des valeurs à l'équilibre et sont liés par les relations de réciprocité d'Onsager-Casimir[7],[8],[9], liées au comportement des quantités conservatives par inversion du temps. Dans une telle opération la quantité se transforme en où est la signature de la variable. En écrivant les relations reliant les diverses valeurs pour une petite variation de celles-ci on montre que[13] :
On définit la vitesse d'ensemble barycentrique par :
et les flux de diffusion par :
La signification de cette définition est évidente lorsqu'on fait apparaître la vitesse de diffusion définie par . La vitesse d'ensemble de l'espèce i est . De cette définition il résulte que la somme des flux de diffusion est nulle :
Le second membre de l'expression est complexe et ne permet pas de faire apparaître l'affinité du mélange. On va se placer dans le cas d'un mélange binaire[N 2],[13] pour lequel :
L'expression ci-dessus se simplifie alors :
Le système s'écrira, compte tenu du fait qu'il ne peut exister de couplage entre E ou ni et V :
On voit qu'une affinité produit un flux de toutes les quantités ayant la même dimension, y compris de celles qui ne correspondent pas aux quantités conjuguées.
Par renversement du temps E et μi sont inchangés. Les valeurs des signatures seront donc les suivantes :
↑Compte tenu de la régularité supposée de cette linéarisation est toujours valable, le problème étant d'exprimer ce que signifie « proche de ». Ceci ne peut être fait qu'en examinant le problème auquel on s'intéresse.
↑(de) Josef Stefan, « Über das Gleichgewicht und Bewegung, insbesondere die Diffusion von Gemischen », Sitzungsberichte der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften Wien, 2te Abteilung a, vol. 63, , p. 63-124.