La théorie d'Iwasawa peut être vue comme une tentative d'étendre les résultats arithmétiques classiques sur les corps de nombres (extensions finies du corps des rationnels) à des extensions infinies de , par des procédés de passage à la limite des extensions finies vers les extensions infinies.
Les objets de base de la théorie d'Iwasawa sont les -extensions ; c'est-à-dire des extensions galoisiennes dont le groupe de Galois est le groupe profini, pour un nombre premier fixé. Par la correspondance de Galois, la donnée d'une -extension est équivalente à celle d'une tour d'extensions telle que chaque est galoisienne sur de groupe de Galois .
Pour chaque corps de nombres, une -extension particulière peut-être construite par adjonction de racines -ièmes de l'unité : la -extension cyclotomique.
Le théorème fondateur de la théorie, dû à Iwasawa, porte sur le comportement du groupe des classes le long d'une -extension. Soit un nombre premier, un corps de nombres, et une -extension de . Pour chaque , on s'intéresse au cardinal du -Sylow du groupe des classes de ; notons le . Alors, il existe des entiers , (positifs), (de signe quelconque), tels que pour assez grand, on ait :
Notons A(Kn) le p-Sylow du groupe des classes du corps Kn. Par la théorie du corps de classes, il existe une extension Ln de Kn tel que : Ln est la p-extension abélienne non ramifiée maximale de Kn. L'union des corps Ln fournit alors un corps L, qui est la pro-p- extension abélienne non ramifiée maximale de .
On considère alors le groupe de Galois :
X est la limite projective des groupes , qui apparaissent comme des quotients de X.
X en tant que pro-p-groupe abélien a une structure naturelle de -module.
Par ailleurs, le groupe de Galois de l'extension cyclotomique agit sur X, dont on peut montrer qu'il est ainsi muni d'une structure de -module, c'est-à-dire de module d'Iwasawa.
L'investigation de la structure des modules d'Iwasawa relève de l'algèbre linéaire. Connaissant leur classification à pseudo-isomorphisme près, et ayant calculé par quel sous-groupe on quotiente X pour obtenir , on peut en déduire l'estimation asymptotique du cardinal de ces groupes, qui fournit la formule annoncée sur A(Kn).
La structure de module d'Iwasawa du groupe est relié dans certains cas à certaines fonctions L p-adiques, par la conjecture principale en théorie d'Iwasawa, démontrée pour par Barry Mazur et Andrew Wiles en 1984[1], puis pour tout corps de nombrestotalement réel par Wiles en 1990[2]. Leurs techniques s'inspiraient de celles utilisées par Ken Ribet dans sa preuve du théorème de Herbrand-Ribet. Karl Rubin a démontré d'autres généralisations de la conjecture pour les corps quadratiques imaginaires[3]. Plus récemment, s'inspirant de la méthode de Ribet, Chris Skinner et Éric Urban ont annoncé une preuve de la conjecture principale pour GL(2)[4].
on considère le comportement des objets arithmétiques non plus le long d'une -extension, mais dans des extensions infinies ayant d'autres groupes de Galois : par exemple , ou plus généralement un groupe analytique p-adique. Se développe ainsi une théorie d'Iwasawa non commutative, notamment sous l'impulsion de John Coates.
↑(en) K. Rubin, « The "main conjectures" of Iwasawa theory for imaginary quadratic fields », Inventiones Mathematicae, vol. 103, no 1, , p. 25–68 (DOI10.1007/BF01239508)
↑(en) C. Skinner et É. Urban, The Iwasawa main conjectures for GL2, preprint (2010).