Virginie Déjazet

Virginie Déjazet
Lithographie de Engelmann sur un dessin de Pierre-Roch Vigneron.
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Pauline Virginie DéjazetVoir et modifier les données sur Wikidata
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signature de Virginie Déjazet
Signature de Virginie Déjazet sur une photographie dédicacée.
Tombe de Dejazet au cimetière du Père Lachaise.

Pauline Virginie Déjazet née le à Paris[1] et morte le à Belleville[2], est une actrice française.

Elle a donné son nom au théâtre Déjazet, dont elle fut la propriétaire de 1859 à 1870.

Treizième et dernier enfant de modestes artisans, elle débute à l'âge de cinq ans comme danseuse sur un petit théâtre élevé, en 1802, dans le jardin de l’ancien couvent des Capucines[3]:3, s'initie à la comédie avec sa sœur Thérèse, figurante à l'Opéra de Paris et débute, en 1806, au théâtre des Jeunes-Artistes de Robillon, situé et l’angle des rues de Bondy et de Lancry, dans Fanchon toute seule, vaudeville en un acte de Louis Ponet. Chaleureusement accueillie, elle dit, en quittant la scène : « La prochaine fois, je parlerai moins vite, pour que cela dure plus longtemps. »[3]:4. Monvel lui prédit un grand avenir. À la suite d’un accident, Robillon, qui ne la payait pas, commence à lui verser six cents francs par an, mais elle abandonne bientôt, suivant les conseils de sa sœur, la rue de Bondy, pour débuter, le , au théâtre des Jeunes-Élèves de la rue de Thionville, dirigé par d’Hussenet. Mme Belmont l’ayant recommandée à Dumersan, celui-ci l’engage au théâtre du Vaudeville, après qu’un décret napoléonien a supprimé quantité de théâtres, dont les Jeunes-Artistes et les Jeunes-Élèves[3]:7.

Au Vaudeville, confinée à des rôles d’enfants, elle végète dans neuf rôles d’enfant insignifiants, et doublant de temps en temps Mademoiselle Minette[4], jusqu’en , où elle incarne la fée Nabotte dans la Belle au bois dormant, féerie-vaudeville en deux actes de Bouilly et Dumersan. Au remplacement, à la direction du Vaudeville, de Barré par Désaugiers, le , à l’occasion d’une tournée à Orléans, elle incarne Mlle d’Aubigné dans le Mariage de Scarron et Tiennette dans le Nouveau Pourceaugnac et se fait remarquer. De retour à Paris, réduite de nouveau à jouer les utilités, son engagement touchant à sa fin, sur les conseils de Gonthier, elle quitter le Vaudeville pour rejoindre les Variétés, dirigées par Brunet, au boulevard Montmartre[3]:9.

Le , elle débute dans le rôle de Suzette, dans Quinze ans d’absence, de Merle et Brazier, puis joue Félix, dans les Petits braconniers, ou les Écoliers en vacances. Jalouse de son succès, la maitresse de Brunet l’empêche de jouer. Après plusieurs mois d’attente, elle rompt son engagement. Un de ses anciens camarades du Vaudeville, Seveste, qui faisait en outre métier de correspondant dramatique, lui signale une place à prendre chez Charrasson, directeur des théâtres de Lyon. Partie en hâte, elle débute brillamment au théâtre des Célestins, en 1817, avec les Deux Pères, ou la leçon de botanique, puis les Brigands sans le savoir, Angéline et le Diable couleur de rose, avant de devoir quitter précipitamment la ville après avoir été menacée de mort par un admirateur[5], et passe à Bordeaux en , mais n’y reste que neuf mois, le théâtre ayant fait faillite[3]:13.

Delestre-Poirson, qui venait d’obtenir le privilège du théâtre du Gymnase, et qui voyageait pour compléter sa troupe, l’avait engagée quelque temps auparavant. Elle fait donc partie de la troupe du nouveau Gymnase, qui a ouvert le , et débute dans le rôle de Marianne dans Caroline, où elle excelle dans les emplois de soubrettes. Elle incarne, ensuite, le lycéen Léon dans la Petite Sœur, créé le et enchaine les rôles dans la Meunière, le Nouveau Pourceaugnac, la Loge du portier, Partie et revanche, les Grisettes, le Bureau de loterie, Rodolphe, les Femmes romantiques[3]:14-5

À la suite de l'engagement de Jenny Vertpré en 1827, elle préfère abandonner le Gymnase, devenu Théâtre de Madame, pour le théâtre des Nouveautés, auquel elle redonne vie en entrainant à sa suite de nombreux acteurs[6], et où elle débute dans le rôle de Catherine, dans le Mariage impossible, le , et joue pendant trois ans, notamment dans les Trois Catherine, Valentine, l’Enragée, le Marchand de la rue Saint-Denis, la Femme, le Mari et l’Amant, Jovial en prison, André le Chansonnier, Jean, et le Mari aux neuf femmes, et ses deux rôles favoris : le Fils de l’Homme et Bonaparte à l’école de Brienne[7], qui a remporté un grand succès[3]:36, avant d’anticiper la faillite des Nouveautés, en passant au théâtre des Variétés, où elle débute avec le rôle de la grisette Herminie dans Ils n’ouvriront pas et le page Frédéric, dans l’Audience du Prince.

Dormeuil lui refusant obstinément une augmentation au Palais-Royal, elle fait ses adieux, le , dans Carlo et Carlin[3]:47. Après un an de tournée à Lyon, Bordeaux, Orléans, Lille, Nantes, puis Bruxelles, et même Londres, Nestor Roqueplan lui propose un engagement de cinq années au théâtre des Variétés, où elle débute, le , dans les Premières armes de Richelieu et enchaine, à nouveau, les rôles, jusqu’en où, ne pouvant s’entendre avec Milon-Thibaudeau, le successeur de Roqueplan, elle quitte les Variétés et repart en province, où Paul-Ernest, nommé directeur du Vaudeville, court après elle, la rejoint à Rouen et l’engage. En 1849, âgée de 52 ans, elle entame une liaison avec le jeune premier, Charles Fechter, alors âgé de 25 ans[8]

Le , elle reparait au théâtre de la Bourse, dans le Vicomte de Lélorières, puis dans la Douairière de Brionne jusqu’à ce que la faillite du directeur n’interrompe brusquement ses succès. Après un nouveau voyage en province, le Vaudeville ayant rouvert sous la direction de Lecourt, elle est rengagée à de hauts appointements. Après Ouistiti, le Marquis de Lauzun, Quand on va cueillir la noisette, les Rêves de Mathéus, son engagement est renouvelé pour deux ans, et Léon Gozlan écrit pour elle les Paniers de la comtesse, créé, le .

Virginie Déjazet en 1854.

À la suite d’un conflit avec Lecourt, elle demande et obtient la résiliation de son engagement, pour réapparaitre, le , aux Variétés dans les Trois Gamins, de Vanderburch et Clairville avant de partir avec un des auteurs pour Dijon, Nice, Marseille, Lyon. En 1854, fatiguée de courir la province et désespérée de ne pouvoir trouver à Paris un engagement dans de bonnes conditions, elle se retire dans une petite maison de plaisance qu’elle possédait, à Seine-Port. C’est là que Léon de Brécourt lui a présenté le jeune dramaturge Victorien Sardou, qu’elle a installé à Seine-Port et traité comme son meilleur ami. C’est auprès d’elle qu’il a puisé ses premières inspirations et qu’il a écrit ses premières scènes[9].

En , Déjazet a donné cent représentations du Sergent Frédéric au théâtre de la Gaité, et, le de la même année, le rôle de Richelieu au palais de Saint-Cloud. De 1855 à , elle fait plusieurs apparitions au Palais-Royal, où elle reprend quelques uns de ses meilleurs rôles, et aux Variétés, où elle crée Roger Bontemps dans les Chants de Béranger, et le Capitaine Chérubin, dans la pièce de ce nom[3].

En , elle achète la petite scène des Folies-Nouvelles, au boulevard du Temple, et la renomme Folies-Déjazet pour la rouvrir, sous la direction de son fils Eugène, pour son protégé, Victorien Sardou. La pièce d’inauguration, les Premières Armes de Figaro, dont le principal rôle était réservé à Déjazet, due à Vanderburch et Sardou, alors uniquement connu comme spirite, a été un succès[3].

Elle se retire de la scène en , avant d'y remonter en . En effet, plusieurs personnalités du monde artistique – dont Victorien Sardou – se sont alors associées pour organiser un « bénéfice » à son intention, qui lui rapporte 60 000 francs pour une représentation.

À sa retraite, en 1869, le ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts lui a fait une retraite de 2 000 francs[10]. La même année, Napoléon III[11] lui aurait attribué une pension de 2 000 francs[12],[13].

Eugène Pierron a dit d’elle : « Son extraordinaire vivacité, son esprit, son talent, et sa capacité à dire ambiguïtés de telle sorte qu’elles lui soient pardonnées, et une indescriptible espièglerie de tout son être contribuèrent à en faire l’une des étoiles les plus brillantes de la scène parisienne[14]. » Ses bons mots, réparties, saillies étaient, en effet, célèbres. À un éditeur qui l’engageait à publier ses mémoires, elle a refusé, répondant : « À tort ou à raison, on m’a fait une réputation d’esprit, vous ne voudriez pas me la faire perdre. » À une demande plus sérieuse, elle a répondu : « Je n’ai ni assez de vices pour piquer la curiosité, ni assez de vertus pour prétendre à l’admiration. »[3]:64 En 1837, l’acteur Raucourt a donc publié, en livraisons anonymes, sous le titre de Perroquet de Déjazet, un recueil authentique de ses bons mots[15].

Le , s’étant rendue à la réunion de la quatrième société du Caveau, sur la proposition d’Eugène Grangé, l’assemblée lui décerne à l’unanimité la présidence honoraire, vacante par la mort de Jules Janin[16]. Elle sera, avec la chanteuse Thérésa, l’une des deux membres féminins de l’histoire du Caveau.

Elle repose au cimetière du Père-Lachaise[17], avec les deux enfants, qu’elle avait eus d’Adolphe Charpentier, Eugène et Hermine, morte le [18], connue comme chanteuse et pour une composition.

Virginie Dejazet dans Bonaparte à Brienne par André Gill.

Bibliographie

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  • Raucourt, Le Perroquet de Déjazet : recueil authentique de bons mots, réparties, saillies, etc. ; suivi de la Notice biographique de cette actrice, Paris, Pillet aîné, , 86 p., in-12 (lire en ligne).
  • Georges Duval, Virginie Déjazet, 1797-1875 : avec une eau-forte de Gonzague Privat, Paris, Tresse, , 221 p. (lire en ligne).
  • Louis-Henry Lecomte, Une comédienne au XIXe siècle, Virginie Déjazet : étude biographique et critique, d'après des documents inédits, Paris, L. Sapin, , 448 p. (lire en ligne).
  • Louis-Henry Lecomte, Virginie Déjazet, d’après ses papiers et sa correspondance : vie de l’artiste, Déjazet et ses contemporains, Déjazet amoureuse, Paris, Jules Tallandier, , 336 p., 1 vol. portr., couv. ill. ; in-18 (lire en ligne).
  • Eugène Pierron, Virginie Déjazet, Paris, Bolle-Lasalle, , 359 p., 18 cm (lire en ligne).
  • Émilie Roger, Une comédienne en son temps : Virginie Déjazet (1798-1875). Contribution à l'étude de la femme de spectacle au XIXe siècle, UVSQ (mémoire de master en histoire culturelle et sociale, 2007), 337 p.

Notes et références

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  1. Paris, État civil reconstitué, vue 6/85.
  2. Acte de décès à Paris 19e, n° 2659, vue 28/31.
  3. a b c d e f g h i j et k Henry Lecomte, Virginie Déjazet, étude biographique, Paris, A. Faure, , 69 p., in-18 (lire en ligne).
  4. « Le Voleur illustré », sur Gallica, (consulté le )
  5. Eugène Pierron, Virginie Déjazet, Paris, Bolle-Lasalle, , 359 p., 18 cm (lire en ligne), p. 4.
  6. On y rejouait alors tant d’ouvrages anciens, que des mauvais plaisants avaient effacé, une nuit, le titre de Théâtre des Nouveautés pour lui substituer celui de… Théâtre des Vieilleries. Voir Lecomte, op. cit.
  7. Bonaparte à Brienne était la pièce de prédilection de Déjazet, qui l’a jouée cent cinquante fois à Paris et trois cents fois en province. Voir Georges Duval, Virginie Déjazet, 1797-1875, Paris, Tresse, , 221 p. (lire en ligne), p. 76.
  8. « J’étais l’automne alors qu’il était le printemps », écrira-t-elle. Voir Déjazet amoureuse, op. cit., p. 206.
  9. Georges Duval, Virginie Déjazet, 1797-1875, Paris, Tresse, , 221 p. (lire en ligne), p. 166.
  10. Félix Jahyer, « Camées artistiques : Virginie Déjazet », Paris-théâtre, vol. 2, no 72,‎ , p. 2-3 (lire en ligne, consulté le ).
  11. Fervente bonapartiste, elle s’était précipitée, en février 1845, au fort de Ham, où il était détenu et lui avait fait passer une médaille qu’il conservait attachée à sa montre. Voir Virginie Déjazet, d’après ses papiers et sa correspondance, op. cit., p. 33-5.
  12. George Ripley et Charles Anderson Dana, The American Cyclopaedia : a popular dictionary of general knowledge, t. 5, Appleton, , 800 p. (lire en ligne), p. 765.
  13. Henry Lecomte parle, lui, d’un don de 10 000 francs à sa fille Hermine sur une demande pressante de sa mère. Voir Virginie Déjazet, d’après ses papiers et sa correspondance, op. cit., p. 35.
  14. Virginie Déjazet, op. cit.
  15. Louis-Henry Lecomte, Une comédienne au XIXe siècle, Virginie Déjazet : étude biographique et critique, d'après des documents inédits, Paris, L. Sapin, , 448 p. (lire en ligne), p. 244.
  16. Louis-Henry Lecomte, « Galérie de chansonniers, Déjazet », La Chanson,‎ , p. 59 (lire en ligne, consulté le )
  17. Division 81. Voir « Les tombes du Père Lachaise par division : 81 à 90 », sur paristoric.com (consulté le ).
  18. Louis-Henry Lecomte, Virginie Déjazet, d’après ses papiers et sa correspondance : vie de l’artiste, Déjazet et ses contemporains, Déjazet amoureuse, Paris, Jules Tallandier, , 336 p., 1 vol. portr., couv. ill. ; in-18 (lire en ligne), p. 202-4.
  19. Base documentaire La Grange sur le site de la Comédie-Française

Liens externes

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