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Quatre premières mesures de Tristan und Isolde (version orchestrale) | |
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L’accord de Tristan est l’accord constitué des notes fa, si, ré♯ et sol♯. Plus généralement, c’est tout accord constitué des trois intervalles suivants au-dessus d'une note de basse : quarte augmentée, sixte augmentée et neuvième augmentée. Il se nomme ainsi car c'est le premier accord de Tristan und Isolde, l’opéra de Richard Wagner.
Lors de la première représentation de Tristan und Isolde en 1865, cet accord fut considéré comme déroutant, audacieux et innovant. Pourtant cet accord est l’enharmonie d’un accord classique qui existe au moins depuis la Renaissance : l’accord de fa mineur septième avec quinte diminuée (fa, do bémol, mi bémol, la bémol). C'est l’anacrouse qui le précède et surtout l'accord de résolution qui le font apparaître dans un contexte inattendu.
En réalité, Beethoven (Sonate no 18), Schumann (concerto pour violoncelle, lied), Chopin (prélude) et Liszt (lied) ont précédé Wagner dans l'emploi de cet accord avec cette résolution. Le mérite de Wagner est d’émanciper les accords de leurs fonctions habituelles, et ce remarquable enchaînement d’accords, reste le porte-drapeau d’une grande liberté dans l’enchaînement des accords avec la généralisation du chromatisme, marque bien caractéristique de l’harmonie wagnérienne, alors que les exemples par ailleurs remarquables des trois autres compositeurs cités trouvent leur place dans un contexte harmonique moins audacieux — sans vouloir donner la moindre valeur ni négative ni positive à l'audace dans les enchaînements d'accords.
Certains veulent y voir l’annonce de l'atonalité, qui en est quand même encore bien éloignée, si tant est qu'elle existe. Peut-il y avoir de l'atonalité là où il y a l'octave et la quinte[1]?
Dans l’œuvre, c’est le premier accord d’un motif, qui apparaît au commencement du prélude, puis plusieurs fois dans le reste de l’œuvre. Ce motif enchaîne le leitmotiv de L’Aveu (premières mesures : la, fa, mi, ré#) et celui du Désir (deux dernières mesures : sol#, la, la#, si).
Bien que sonnant enharmoniquement comme l’accord de septième d'espèce du second degré en mi mineur fa la do mi (qui pourra être considéré comme un accord de 9e de dominante de sol sans fondamentale ou un accord de 11e de dominante de mi sans fondamentale), sa fonction et donc sa perception en sont très éloignés sous la forme fa si ré sol , qui ne présente que des intervalles augmentés.
Jacques Chailley le décrit comme « simple 7e de dominante du ton de la mineur »[2], avec double-appoggiature (fa appoggiature de mi et ré# appoggiature de ré bécarre). C'est cette analyse qui est la plus largement partagée.
On peut néanmoins considérer l'accord comme un accord de sixte augmentée française (fa-la-si-ré , dominante de dominante sous forme de +6, dont le fa a été abaissé en fa ), dont la 7e (le la) fait l'objet d'une appoggiature inférieure (le sol ). Cette explication permet d'éviter le problème du ré appoggiature, qui se résoudrait à l'envers dans l'explication de Chailley, et qui devient ici la sensible de l'accord de dominante de dominante, se résolvant en descendant sur la 7e de l'accord de dominante, ce qui se faisait déjà chez Mozart. La 7e (la) monte sur le si par chromatisme, ce qui existe déjà depuis le style classique, surtout pour aller vers un autre accord de tension. L'invention de Wagner réside donc en l'appogiature du la, créant un accord classé à la sonorité inattendue fonctionnellement.[réf. nécessaire]