Les Alukus (/a.lu.ku/) ou Bonis (du nom de leur premier chef, Boni Okilifuu), sont une population bushinenguée — littéralement, les « Noirs des forêts », aussi appelés « Noirs marrons » — issus de descendants d’esclaves africains évadés des plantations néerlandaises aux XVIIe et XVIIIe siècles[2]. Ils vivent en Guyane française. Ils parlent l'aluku, un créole à base lexicale anglaise.
Avant eux s'étaient échappés d'autres esclaves : les premiers forment le groupe Saramaca, les seconds le groupe Djuka puis les Aluku. S'enfonçant, peu à peu, dans la forêt amazonienne, ils finirent par s'installer à la fin du XVIIIe siècle le long des berges du fleuve Maroni (qui est aujourd'hui la frontière entre la Guyane française et le Suriname). Actuellement[Quand ?], la grande majorité des Aluku vit sur les berges du Lawa, autre nom du Maroni dans sa partie haute.
Au fur et à mesure des brassages entre les différentes populations en fuite ils formèrent une nouvelle ethnie. Les combats menés pour leur liberté contre les troupes hollandaises, mais aussi contre les Djukas et les Saramacas, frères ennemis vivant plus au nord, créèrent un sentiment d'appartenance à un même peuple habitant indifféremment d'un côté ou de l'autre du fleuve, aujourd'hui frontière.
Aujourd'hui, la fraction la plus importante et la plus anciennement occupée du territoire des Alukus est située dans la région de Maripasoula, avec les communes et villages de Maripasoula, Papaichton, Cormontibo, Assissi, Loka, Tabiki, et Agoodé en Guyane française, et Cottica, au Suriname. Une autre partie, très en aval, se situe près de l'embouchure du fleuve avec les villages d'Apatou et de Maïman. De nombreux Alukus vivent également à Saint-Laurent-du-Maroni, à Cayenne, à Kourou ainsi qu'à Mana.
Les Alukus vivaient de cueillette, de chasse, de pêche et de cultures nomades situées loin de leurs habitations. Aujourd'hui, dans leur ensemble, ils semblent avoir passé le point de non-retour vers la société de consommation, l'économie marchande et la modernité. De nombreux Bonis sont embauchés comme « conducteurs d'embarcations fluviales » (piroguiers) par l'armée de terre, au sein du 9e RIMa. Selon Bernard Delpech, ils subissent une « déstabilisation de la base matérielle traditionnelle, transformation des mentalités, altération des règles de vie collective »[3].
Le chef des Alukus est appelé Gran Man. Il disposait autrefois d'un pouvoir politique. Le Gran Man Tolinga fut élu maire de Papaichton, mais son successeur ne fut pas élu maire[4]. Un grand man a également été désigné à Maripasoula, créant une situation inédite avec deux grands mans. Des capitaines sont désignés dans chaque village[4].
↑Bernard Delpech, « Les Aluku de Guyane à un tournant : de l'économie de subsistance ala société de consommation », Cahiers d'Outre-Mer, no 182, (résumé).
Serge Anelli, Nongo : Proverbes aloukous, Cayenne, Les deux fleuves, 1990, 69 p.
Serge Anelli, Mato : contes des Aloukous de Guyane, recueillis, transcrits et traduits, Paris, Conseil International de la Langue Française, 1994, 137 p.
Philippe Dakan, Napi Tutu : l'enfant, la flûte et le diable, conte aluku raconté en , Cayenne, CRDP de Guyane, 2003, 25 p.
Études
Jules Brunetti, La Guyane française. Souvenirs et impressions de voyage (1840), Len Pod, .
Jean-Marcel Hurault, Les noirs réfugiés Boni de la Guyane Française, Dakar, IFAN, , 362 p..
Jean Moomou, Le monde des Marrons du Maroni en Guyane, 1772-1860 : la naissance d'un peuple : les Boni, Matoury, Ibis rouge, , 216 p. (ISBN2-84450-206-7)
Jean Moomou, « Boni et Amérindiens : relations de dominants/dominés et interculrelles en Guyane (fin XIXe siècle : années 1990) », Outre-mers, vol. 98, no 370, , p. 273-299 (lire en ligne).
Jean Moomou, Les marrons Boni de Guyane : luttes et survie en logique coloniale, 1712-1880, Matoury,, Ibis rouge, , 597 p. (ISBN978-2-84450-422-7)
Jean-Louis Garel de Ayala, Boni, Maréchal de la Nation Aluku. Tribu française du Mawina konde, Saint-Laurent du Maroni, Association Melodya, musicatelier@mail.com, 2017 (t1), 2018 (t2), non-dispo (t3)
Marie Fleury, « Gaan Mawina, le Marouini (haut Maroni) au cœur de l’histoire des Noirs marrons Boni/Aluku et des Amérindiens Wayana1 », Revue d’ethnoécologie, no 13, (ISSN2267-2419, DOI10.4000/ethnoecologie.3534, lire en ligne)
Marie Fleury, « Dénominations et représentations des végétaux en forêt tropicale : étude comparative chez les Amérindiens wayana et les Noirs marrons aluku de Guyane française », dans Serge Bahuchet, Daniel Bley, Hélène Pagezy, Nicole Vernazza-Licht, L’homme et la forêt tropicale, Travaux de la Société d’Écologie Humaine, , 31-43 p. (ISBN2-9511840-5-0, lire en ligne)
Jean Moomou, « La politique des autorités coloniales et Marrons Boni 1776-1841 », Cahiers des Anneaux de la Mémoire, no 7, , p. 106-123 (lire en ligne)