Fils d’un receveur dans l’administration des contributions, Baron reçoit une solide formation classique au lycée Napoléon, puis au Pensionnat normal, où il est admis le , et enfin docteur ès lettres de l'Académie de Paris.
Au terme d’un séjour de plusieurs années en Angleterre, il épouse Madeleine Duthillieux (1794-1866), le , à Paris.
La même année, il s’installe à Bruxelles où il est attaché en qualité de rédacteur principal à la Gazette officielle, ce qui ne l'empêche pas de rejoindre les rangs de l'opposition libérale au début de 1829. En 1824, il fut un des fondateurs de la Société des douze.
Spécialiste de l'histoire des littératures latine et française, admirateur du romantisme, poète lui-même, il fut vers 1826 nommé professeur de littérature aux cours publics annexés au Musée des Sciences et des Lettres de Bruxelles[1].
Resté en Belgique, au lendemain des Journées de septembre 1830 qui ont conduit à la naissance d’un État belge indépendant, il est initié à la loge bruxelloise Les Amis philanthropes, sans doute au début de 1834, et obtient sa naturalisation en mai 1838[2].
Il s’installe à Liège à la fin de l’année 1849. Dix ans plus tard, il y subit une profonde dégradation de sa vigueur intellectuelle et finit par mourir d'une apoplexie foudroyante.
Le , trois jours après sa mort, lors d'une séance académique, Joseph Antoine Spring, recteur de l’université de Liège, prononce son éloge funèbre, tandis que Jean Stecher[5], au nom de ses collègues de la Faculté de philosophie et lettres de la même université, prononce un autre discours sur le quai de la gare des Guillemins avant le départ du convoi qui doit transporter le corps à Bruxelles. Le 8 avril suivant, un service religieux est célébré à Saint-Josse-ten-Noode où il a été inhumé.
Auguste Baron a consacré une grande partie de sa vie professionnelle à l’enseignement des lettres classiques et de la littérature française.
Ses charges sont nombreuses :
répétiteur de grec à l’École normale supérieure (1814 à 1818) ;
cours public de littérature comparée au Musée des sciences et des lettres de Bruxelles[6] (1827-1832) où il prononce le discours d’installation (3 mars 1827) et où il a pour collègues Louis Dewez (histoire des Pays-Bas), Philippe Lesbroussart (histoire générale), Adolphe Quetelet (histoire des sciences) et Sylvain Van de Weyer (histoire de la philosophie) ;
membre de la commission de l’Instruction publique instituée par le Gouvernement provisoire (30 septembre 1830) ;
professeur de rhétorique et préfet des études à l’Athénée de Bruxelles (1830-1849) ;
professeur de belles-lettres à l’École militaire (1837 à 1840) ;
premier doyen de la Faculté de philosophie et lettres de l’Université libre (1848-1849)[7] ;
cours de littérature française et d’histoire de la littérature ancienne à l’université de Liège (1849-1862) ;
cours de style et de rédaction à l'École des mines de Liège ;
cours de littérature française à l’École normale des humanités de Liège.
Parmi ses engagements les plus durables en faveur de l’instruction, il convient de signaler la part non négligeable qu’il a joué dans la fondation de l’Université libre de Bruxelles dont il conçoit le projet dès 1831 et qu’il reformule avec succès, trois ans plus tard, d’abord auprès de Théodore Verhaegen, le vénérable de sa loge puis, en présence de tous ses frères réunis à l’occasion de leur banquet de la Saint-Jean d'été de 1834, puisque le 20 novembre suivant, il est chargé du discours d’installation de la nouvelle institution dont il devient le premier secrétaire[8].
Il préside également, en 1848, un Congrès professoral de Belgique[9] qui va stimuler l’adoption de la loi du 1er juin 1850 organisant un enseignement moyen officiel et permettre la création d’un Conseil de perfectionnement du même.
La production universitaire d’Auguste Baron est abondante et toujours très soignée[10] : articles et feuilletons ; conférences et discours ; éditions, traductions et commentaires d’auteurs anciens et d’auteurs anglais ; introductions et compléments aux ouvrages de collègues ; même un livret d’opéra-comique. Ulysse Capitaine en dresse une liste très extensive dans son Nécrologe liégeois pour 1862, tandis qu’Alexandre Jamar entreprend en 1857 une édition de ses Œuvres complètes dont cinq des douze tomes prévus sortent de presse.
De l’aveu même de l'auteur, quatre titres sont à sortir du lot. Les deux premiers sont les fruits de toute sa carrière de pédagogue, les deux suivants témoignent de son érudition comme traducteur et commentateur d’auteurs anciens :
Lettres et entretiens sur la danse ancienne, moderne, religieuse, civile, et théâtrale, Paris, Dondey-Dupré, 1824. Rééditées en Lettres à Sophie sur la danse, suivies d'entretiens sur les danses ancienne, moderne, religieuse, civile et théâtrale, Paris, Dondey-Dupré, 1825.
On lui doit également un grand nombre de Notices et d’articles sur la littérature, insérés dans le Globe et la Revue de Paris, la Gazette des Pays-Bas, le Courrier belge, l'Observateur, la Revue belge, l'Artiste, la Revue encyclopédique belge, etc. Il a aussi attaché son nom à plusieurs contrefaçons de livres d’études français[11].
Alphonse Leroy, Liber memorialis. L’université de Liège depuis sa création, Imprimerie de J.-C. Carmanne (H. Vaillant-Carmanne et Cie), , col. 51-70 (lire en ligne).
↑« Un siècle de franc maçonnerie dans nos régions 1740-1840 », Catalogue d'exposition, no 333, CGER, Bruxelles, mai-juillet 1983.
↑A. Delebecque, Pasinomie ou collection complète des lois, décrets, arrêtés et règlements généraux qui peuvent être invoqués en Belgique, 3e série, Bruxelles, Société typographique belge, 1838, p. 135, no 245, 25 mai 1838. — loi portant acte de naturalisation ordinaire du sieur Baron (Auguste-Alex's), professeur à l'université libre à Bruxelles, né à Paris. le 1er mai 1794, ledit acte accepté par lui, le 20 juin 1838. (Bulletin officiel n° XXVII.)
↑Liber Memorialis : L’Université de Liège depuis sa fondation, Liège, J. G. Carmanne, , 79 p. (lire en ligne), p. 66.
↑Joël Arvelle, Histoire de la franc-maçonnerie belge, Braine-l'Alleud, J.-M. Collet, 1995, p. 62-64, d'après John Bartier, « L'Université de Bruxelles au temps de Théodore Verhaegen », Laïcité et franc-maçonnerie. Études rassemblées et publiées par Guy Cambier, Bruxelles, Éditions de l'Université Libre de Bruxelles, 1981, p. 13-72.
↑Congrès professoral de Belgique, réuni à Bruxelles les 26 & 27 sept. 1848, Bruxelles, Deltombe, , 44 p. (lire en ligne).
↑« Baron était ce qu'on pourrait appeler un gourmet littéraire. Il avait plus de finesse que de passion, mais infiniment d'esprit, et une répugnance profonde pour les vulgarités et les banalités de tout genre. Sa vigueur était calculée plutôt que native ; mais il avait tant d'habileté et de patience à ciseler sa phrase, qu'il arrivait de sang-froid à produire, quand il le voulait bien, les effets de l'inspiration. Sa conversation était étincelante ; mais il travaillait difficilement et lentement ; il remaniait sans cesse ses écrits : le manuscrit de la Rhétorique fut recopié dix-huit fois. Il avait une immense lecture et l'habitude de prendre des notes ; avec cela, un rare talent d'assimilation et un sentiment exquis des nuances. L'érudition, sous sa plume, acquérait le don de plaire ; en somme, il ne brillait pas par l'invention, mais par une certaine façon séduisante d'appliquer le vieil adage : Non nova, sed novè. Ses écrits, sous ce rapport, sont des modèles précieux à étudier. » (Alphonse Leroy, col. 60).
↑Jacques Van Lennep, Les Bustes de l'Académie royale de Belgique. Histoire et catalogue raisonné précédés d'un essai. Le portrait sculpté depuis la Renaissance, Bruxelles, Académie royale de Belgique (Mémoires de la Classe des beaux-arts, Collection in 8°, 3e sér., t. 6), 1993, p. 146 et 250.