Colletes, les Collètes, est un genre d'abeilles de la famille des Colletidae. Ces 330 abeilles solitaires, présentes dans les régions tempérées et tropicales du monde entier, creusent dans la terre des cellules qu'elles tapissent de substances pour protéger leur larves et leur réserve. Ce groupe taxonomiquement uniforme se distingue des autres genres par une nervation alaire en forme de S. Généralement noires et velues, les espèces sont morphologiquement assez monotones et difficilement discernables pour l'amateur au delà de leur biologie spécifique.
Le genre Colletes particulièrement diversifié comporte 330 espèces réparties dans les régions tempérées et tropicales, 135 de la région paléarctique, près de 90 de la région néarctique et environ 90 de la région néotropicale[1],[2].
Ce genre est absent de l'Inde et de l'Australasie. Son absence d'Australie est remarquable compte tenu de l'abondance d'autres Colletidae dans ce pays. Il est également absent de l'Islande, du Groenland, de l'Afrique tropicale et du bassin amazonien[1],[2].
Les Collètes sont adaptées à de nombreux biotopes, des zones semi-arides aux prés saléss, du niveau de la mer à plus de 3 000 m d'altitude. Cependant, comme presque toutes les abeilles, elles sont de grandes amatrices de soleil et de chaleur, le nombre d'espèces étant inversement proportionnel à la latitude et à l'altitude[1],[2].
Dans leur forme générale, les Collètes ressemblent aux Andrènes et aux Halictes. Leur tête est nettemment plus large que longue. Les antennes sont composées de 12 articles chez la femelle et de 13 chez le mâle. Les yeux sont concaves, le labrum est toujours bien visible, le clypeus bien délimité et la langue courte et lobée. Le corps mesure de 7 à 16 mm et possède une pilosité abondante très dense. Les pattes sont particulièrement velues ; les pattes postérieures de la femelle sont ornées de deux grandes scopae pour la récolte du pollen. Le corps de la plupart des espèces est noir, sans éclat métallique, bien que certaines espèces aient des métasomes bleu métallique et d'autres des poils thoraciques rouge vif. Le gastre est aussi large ou plus étroit que le thorax, ovale ou conique, comportant 6 segments apparents chez la femelle et 7 chez le mâle. Le dessous du propodeum particulièrement velu chez la femelle est également utilisé pour la récolte du pollen. Les ailes sont claires ou seulement légèrement assombries chez la majorité des espèces[1],[2],[3].
Le genre se distingue par la deuxième nervure récurrente de l'aile antérieure, en forme de S, qui est unique parmi toutes les abeilles, par des yeux fortement convergents ainsi que par l'absence de franges de poils sur les flancs des deux derniers tergites de l'abdomen[1],[2].
Au sein du genre, les espèces sont assez monotones et difficilement discriminables sans analyse microscopique au point que de nombreux apidologistes ont fait l'impasse. L'espace malaire — c'est-à-dire la distance des yeux à la base des mandibules —, le septième sternite du mâle, la structure de la pilosité et la coloration des soies fournissent des critères taxonomiques importants mais c'est la biologie — notamment le biotope, les espèces butinées et la phénologie — qui permet le plus souvent à l'amateur de déterminer à l'espèce, mais ce n'est pas infaillible[3],[4].
Certaines espèces, comme la Nord-Est-Américaine Colletes inaequalis, sont parmi les premières abeilles à émerger au printemps alors que d'autres, comme la Ouest-Européenne Collète du Lierre, sont actives à la fin de l'été et au début de l'automne[1],[2].
Les mâles émergent systématiquement en premier et attendent l'émergence des femelles en stationnant depuis un perchoir, comme une tige d'herbe, sur lequel peuvent se rassembler jusqu'à une dizaine d'individus, pour les espèces grégaires. Une fois qu'une femelle émerge, les mâles attirés par ses phéromones la prennent en chasse pour tenter de s'accoupler le premier. En début de saison, lorsque les mâles sont les plus nombreux, une femelle peut se retrouver à terre au centre d'un agglutinement de mâles, formant ainsi une boule d'abeilles en plein accouplement. Chez la Collète des sablières, le mâle peut creuser le sol pour féconder une femelle avant sa sortie[1],[2].
Comme de nombreux genres de la famille des Colletidae, la femelle Colletes une fois fécondée creuse seule dans le sable, le grés ou l'argile un terrier de nidification qui contient une unique cellule de couvain ou 4 à 20 cellules agencées symétriquement le long d'un couloir principal ou au contraire de façon hétérogène. Elle en tapisse l'intérieur d'un revêtement polymère protecteur contre l'humidité et les moisissures. Cette substance fongicide et bactéricide est un laminester, une forme de polyester sécrétée sous forme liquide par la glande de Dufour, située à l'arrière de l'abdomen. Sa polymérisation et sa solidification sont probablement provoquées par les glandes salivaires. Certaines Collètes des Andes sud-américaines, comme Colletes rubicola construisent des séries de cellules dans des tiges mortes et piquantes[2].
La femelle approvisionne chaque cellule avec du pain d'abeille qui a la particularité d'être liquide du fait de la forte proportion de nectar par rapport au pollen, l'imperméabilité de la cellule évitant les fuites. L'approvisionnement effectué, la femelle pond un œuf dans la cellule en le pendant au sommet puis la scelle définitivement. Protégée des prédateurs, de la submersion et du pourrissement, la larve s'y nourrit en s'enroulant sur le côté à la surface du liquide. Une seule génération d'abeilles est généralement produite chaque année, les adultes mourant leur rôle accompli[2].
Bien que les femelles ne partagent pas leurs taches entre-elles, quelques espèces grégaires forment de grandes bourgades particulièrement populeuses de plusieurs centaines, voire milliers d'individus[1],[2].
Le genre Epeolus, de la sous-famille des Nomadinae, rassemble des espèces cleptoparasites dont le développement est synchronisé avec les Collètes. La femelle pond son œuf entre les deux couches du revêtement polymère, l'extrémité antérieure étant exposée. La larve se développe ensuite en se nourrissant rapidement du pain d'abeille mis en place par la Collète[2],[3]. De même, plusieurs familles de coléoptères, notamment les Meloidae comme le Meloe violaceus et Stenoria analis, cleptoparasitent le couvain des Collètes en se déplaçant jusqu'au nid en s'accrochant au corps des femelles sous la forme larvaire de triongulins.
La taille de certaines bourgades peut parfois devenir génante en délabrant des murs en pierre ou de briques. Tandis que certaines espèces sont des pollinisatrices économiquement importantes, notamment pour quelques Physalis comme la tomatille et la cerise de terre[1].
J. Noskiewicz, Les espèces paléarctiques de Colletes, vol. 2, Prace naukowe; wydawnictwo Towarzystwa naukowego we Lwowie, , 1-532 p. (lire en ligne) (traduit de l'allemand par Lucrèce Chartry en 1994 pour l'obtention d'un mémoire à l'université de Mons-Hainaut).