Professeur titulaire (en) Université de Graz | |
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Friedrich Heinrich Suso Denifle, né à Imst (comté de Tyrol) le et mort à Munich le , est un historien de l'Église et un dominicain austro-hongrois.
Lecteur à Graz depuis 1870, il y devint professeur en 1876. En 1880 il devint assistant général de l'ordre des Dominicains à Rome puis, en 1883, archiviste aux archives du Vatican.
Comme le rappelle Kurt Flasch dès l'introduction de sa monographie sur Maître Eckhart[1], c'est au travail de Heinrich Denifle que l'on doit la découverte de la majeure partie de l’œuvre latine d'Eckhart.
De son œuvre historique, ce sont ses brillants travaux sur Luther et le luthéranisme qui sont les plus importants. Sa considérable étude sur Luther en 4 volumes, publiée en 1904, suscita un vif débat intellectuel dans l'Europe d'avant-guerre et qui continua après-guerre : la préface de la deuxième édition française, rédigée par le traducteur J. Paquier une décennie après la mort de Denifle, témoigne de l'impact considérable de l'ouvrage en France et en Allemagne[2].
D'une manière pionnière, Denifle appliqua la méthode critique des sources au traitement de la question historico-génétique de la Réforme, et apporta un éclairage inédit et savamment documenté sur les aspects les moins connus de la théologie luthérienne.
Les adversaires de ses conclusions ne le furent pas cependant de la rigueur scientifique de sa démarche, et un débat s'engagea ainsi entre Adolf von Harnack et Denifle[3]. L'on ne saurait donc réduire un travail d'une telle ampleur à "l'influence des conceptions ultramontaines de Johannes Janssen". À partir des sources qu'il trouvait dans les archives du Vatican sur Luther et sur la Réforme, Heinrich Denifle fit, de par l'édifice critique qu'il put constituer, un portrait à charge du "Réformateur". Dans un autre ton, Hartmann Grisar, le biographe de référence de Luther, rejoint la plupart des résultats établis par l'étude historique de Denifle[4].
Walther Köhler, que Denifle réfuta[5] en amont, et Grisar également[6] mais en aval, contesta cette nouvelle représentation de la Réforme et du protestantisme, au motif que la méthode, opérant pourtant par les sources, en était dogmatique, et n'argumenta pas : aussi sa mise en cause fut-elle de peu de poids et fut éclipsée, comme d'autres critiques affectives, par la confrontation entre les deux figures de A. von Harnack et H. Denifle. Köhler voulait reprocher à Denifle une connaissance peu objective de Luther au moment même où Denifle, connu comme l'un des meilleurs exégètes médiévistes de son temps, et récent découvreur de l’œuvre latine de Maître Eckhart, mettait précisément en œuvre une démarche d'une objectivité historique supérieure à ce que l'université allemande avait jusqu'alors produit : les reproches de Köhler ne furent donc pris au sérieux ni par la communauté savante, ni par le public lettré, auprès desquels Denifle jouissait d'une réputation solide que l'ampleur de son étude confirmait. Les travaux de Denifle suscitèrent de nombreuses critiques chez les protestants, mais elles ne furent pas toutes du même niveau : c'est la confrontation avec Harnack et Reinhold Seeberg qui s'imposa, et le résultat sur le long terme en fut un développement de l’œcuménisme en profondeur. Au point que les éditeurs protestants des œuvres de Luther utilisèrent le travail de Denifle pour comprendre et corriger l'édition de Weimar.
Certains voient pourtant en Denifle, à la suite des travaux de Döllinger et de Janssen, le point culminant d'une historiographie catholique radicale.[réf. souhaitée] Outre ces questions, Denifle s'intéressa aussi au mysticisme ainsi qu'à l'histoire de la civilisation et de l'Église au Moyen Âge, fit des découvertes manuscrites précieuses sur lesquelles se fondent aujourd'hui la recherche, et rédigea entre autres un ouvrage sur la formation des universités médiévales.