Hans Namuth

Hans Namuth
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Hans Namuth, né le à Essen dans l'Empire allemand et mort le à East Hampton dans l'état de New York, est un photographe américain, naturalisé en 1943, d'origine allemande. Il est connu pour ses photographies de la guerre d'Espagne en 1936-1937 et celles d'artistes américains, en particulier de Jackson Pollock, réalisées aux États-Unis à partir des années 1950.

Jeunesse en Allemagne

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Hans Heinz Oskar Adolf Rudolf Namuth fréquente de 1925 à 1931 l'école secondaire Humboldt d'Essen ; il s'intéresse aux arts sous l'influence de sa mère et se familiarise avec l'expressionnisme allemand et l'impressionnisme français en fréquentant les collections du musée Folkwang. Son père a adhéré au parti nazi alors que le jeune Hans Namuth est un opposant ; il est arrêté et emprisonné en 1933 pour avoir distribué des tracts hostiles à Adolf Hitler ; son père, membre de la SA, intervient et lui obtient, après sa libération, un passeport et un billet pour Paris[1].

Paris et les guerres

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Namuth occupe à Paris divers petits emplois pour vivre, dont ceux de plongeur et de vendeur à la criée de Paris-Soir[2] ; il se lie d'amitié avec d'autres expatriés allemands, dont le photographe Georg Reisner qui l'initie à la photographie et qui lui propose en 1935 d'être son assistant dans son studio photographique installé à Pollença, sur l'île de Majorque en Espagne ; de retour à Paris, les deux photographes travaillent comme photojournalistes et photographes de portrait ; ils sont envoyés par le magazine français Vu pour couvrir les Olympiades populaires organisées en juillet 1936 à Barcelone en protestation contre la tenue des Jeux olympiques de Berlin[1].

Les premiers reportages de Namuth portent ainsi sur la guerre d'Espagne en 1936-1937 et sont publiés dans Vu[3],[4].

De retour à Paris en 1937, Namuth y poursuit sa carrière de photographe ; il se forme auprès de Joseph Breitenbach (en) qui lui enseigne les aspects techniques de la photographie. Après la déclaration de guerre de septembre 1939, les Allemands expatriés en France sont internés ; Namuth y échappe en s'engageant dans la légion étrangère. Il se rend à Marseille et, avec l'aide du journaliste Varian Fry et de son Emergency Rescue Committee, peut s'enfuir aux États-Unis en 1941[1].

Namuth s'engage dans l'armée américaine ; il y exerce notamment comme interprète en Angleterre, en France et en Tchécoslovaquie[2]. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, il quitte l'armée, après avoir reçu la Purple Heart américaine et la Croix de guerre française[5].

Carrière photographique aux Étas-Unis

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Il s'installe à New York en 1945 avec sa femme, Carmen Herrera, originaire du Guatemala, et sa fille qui vient de naître. Il y étudie la photographie avec Alexey Brodovitch, directeur artistique de Harper's Bazaar, dont il suit les cours à la New School of Social Research, et Joseph Breitenbach. Il crée son studio de photographie, fait de la photographie de mode et réalise de nombreux portraits de figures du monde culturel américain, dont Jackson Pollock et Andy Warhol. Il travaille pour de grands magazines, dont Harper's Bazaar, Life, Art News (pour lequel il réalise 9 couvertures en 4 ans, dont des portraits de Jasper Johns, Louise Nevelson, Romare Bearden et Jim Dine) et Connaissance des arts où il publie plus de 100 photographies.

Namuth et son épouse se rendent au Guatemala en 1946[6] ; il y photographie les Indiens de langue mam de la région de Todos Santos ; il y retourne en 1978 où il constate les dégâts d'un tremblement de terre, ainsi que les ravages de l'alcoolisme ; il publie en 1989 le livre de photographies Los Todos Santeros sur le sujet[7].

Jackson Pollock

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Hans Namuth et Jackson Pollock se rencontrent lors de l'été 1950, à l’occasion du vernissage d'une exposition des drip paintings récents du peintre au Guild Hall Museum d'East Hampton, et leur collaboration s'engage. La centaine de photographies ainsi que les deux courts films (un film muet en noir et blanc de six minutes ; un film plus long, parlant et en couleurs, avec Paul Falkenberg, Jackson Pollock ’51) que Namuth réalise pendant cet été 1950 montrant Pollock au travail, dans sa grange à Long Island, alors que One: Number 31, 1950 et Rythme d'automne (numéro 30) étaient en cours de réalisation, ont largement contribué à l'image de l'artiste moderne américain et, par voie de conséquence, au succès de l'école de New York[8],[9],[10]. Une photographie notable est celle de Pollock en train de peindre, un pinceau et un seau à la main, posant le pied sur la toile posée sur le sol[4].

Cependant, la relation entre Namuth et Pollock se termine brutalement en , avec une violente altercation entre le photographe et le peintre alcoolisé, chacun traitant l'autre d'« imposteur » et Pollock renversant une table chargée de nourriture et de vaisselle devant les convives ; Pollock revient à un style plus orienté vers la figure, ce qui a amené certains à dire que les photographies et les films de Namuth avaient orienté la peinture de Pollock[9]. Jeffrey Potter, un ami proche de Pollock, décrit Namuth comme autoritaire lors des séances, imposant à Pollock quand commencer et arrêter de peindre, ce dernier « sentait que ce qui se passait était faux »[11].

Hans Namuth meurt le à l'âge de 75 ans, des suites d'un accident de la route, alors qu'il rentrait d'une projection de son dernier film, Jasper Johns : Take an Object, au Guild Hall Museum d'East Hampton[12],[13].

Décorations et distinctions

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Livres de photographies

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  • avec Robert Capa et Georg Reisner : (fr) La grande pitié des femmes et des enfants d'Espagne, Paris, Section française du Secours international aux femmes et aux enfants des républicains espagnols, 1937, 16 p.[15].
  • (en) Fifty-two artists : an exhibit portofolio, New York, Committee for the visual arts, 1973, 4 p. et 52 photographies en noir et blanc (en feuilles dans un emboîtage).
  • (en) Early american tools, texte de Marshall B. Davidson, Vérone, Olivetti, 1975.
  • (en) Pollock painting, textes de Rosalind Krauss, Francis V. O'Connor et Barbara Rose, New York, Agrinde, 1980, 110 p. (ISBN 0-9601068-6-3).
  • (en) Artists 1950-81, a personal view, New York, Pace Gallery Publications, 1981, 96 p. (ISBN 0-938608-04-5).
  • (fr) L'atelier de Jackson Pollock, textes de E. A. Carmean, Jean Clay, Rosalind Krauss, Francis V. O'Connor ; traduction Ann Hindry, Paris, Macula, coll. « L'atelier de... », 1982 (ISBN 2-86589-003-1).
  • (fr) De Kooning, vite, texte de Philippe Sollers, 17 photographies de Hans Namuth, Paris, éditions de la Différence, coll. « La Vue le texte », 1988, 2 vol. (ISBN 2-7291-0270-1).
  • (en) American masters : the voice and the myth, texte de Brian O'Doherty, Londres, Thames and Hudson, 1988, 301 p. (ISBN 978-0-500-23524-9).
  • (en) Los todos santeros : a family album of Mam Indians in the village of Santos Cuchumatan Guatemala c.a. 1974-1987, Londres, Dirk Nishen, 1989, 127 p. (ISBN 9781853780080).

Collections

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Expositions

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puis -  : Musée national d'Art de Catalogne, Barcelone.
  • juin -  : Los Todos: A Family Album of Mam Indians, Guild Hall Museum, East Hampton, New York[20].

Notes et références

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  1. a b c et d Carolyn Kinder Carr 1999.
  2. a et b (en) Paul Cummings, « Oral history interview with Hans Namuth, 12 août et 8 septembre 1971 », sur Smithsonian Institution, Archives of American Art.
  3. a et b Carlos Vega Hidalgo et Laura García Fernández 2023.
  4. a b et c (en) « Hans Namuth », sur Center for Creative Photography.
  5. (en) Richard, Paul, « An Eye on the Artists: Galleries », The Washington Post,‎ , B15.
  6. (en) Val Williams, « Obituary: Hans Namuth », The Independent,‎ , p. 20.
  7. (en) Eamonn McCabe, « Image Makers: The work of Hans Namuth », The Guardian,‎ .
  8. Joseph Mohan 2023.
  9. a et b Sarah Boxer, « The Photos That Changed Pollock's Life », The New York Times,‎ (lire en ligne).
  10. France Jaigu, « La révolution pollockienne à l’épreuve de l’histoire : de Clement Greenberg au Jackson Pollock ’51 de Hans Namuth », dans Didier Aubert et Hélène Quanquin (dir.), Refaire l’Amérique. Imaginaire et histoire des États-Unis, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, (ISBN 978-2-87854-870-9, lire en ligne Accès libre), p. 63-72.
  11. (en) Mick Brown, « Jack the dripper », The Sydney Morning Herald,‎ , p. 26
  12. (en) Andy Grundberg, « Hans Namuth, Photographer, Is Dead at 75 », The New York Times,‎ (lire en ligne).
  13. « Photo. La mort de Hans Namuth », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  14. « Photographie de la remise de médaille », sur Rencontres de la photographie d'Arles.
  15. Allison Taillot, « Andrée Viollis et la défense de la République espagnole : de l’information à la mobilisation », Matériaux pour l’histoire de notre temps, vol. 1, nos 123-124 « Guerre d’Espagne : Intellectuels et engagements »,‎ , p. 38-43 (lire en ligne Accès libre).
  16. (en) Joan Levin, « Hans Namuth: Portraits », Library Journal, vol. 124, no 10,‎ , p. 104.
  17. Gabriel Bauret, « Halsman-Namuth, portraits croisés. L'Hôtel de Sully met en regard deux photographes européens aux itinéraires parallèles », sur www.artaujourdhui.info, .
  18. (nl) « 'Hans Namuth. Portraits', Hôtel de Sully, Parijs », De Morgen,‎ (lire en ligne).
  19. Michel Guerrin et Michel Lefebvre, « La guerre d'Espagne, laboratoire d'un photojournalisme exalté », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  20. (en) Helen A. Harrison, « Art reviews. You Can't Drive This Car », The New York Times,‎ (lire en ligne).

Bibliographie

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  • (en) Carolyn Kinder Carr (dir.), Hans Namuth : portraits (catalogue d'exposition), Washington (D.C.), Smithsonian institution press, , 166 p. (ISBN 1-560-98809-6).
  • (es) Carlos Vega Hidalgo et Laura García Fernández, « Hans Namuth y Georg Resiner, fotógrafos de guerra (1936-1939) : análisis, identificación y puesta en valor de los negativos hallados en la Biblioteca Nacional de España », Revista general de información y documentación, vol. 33, no 1,‎ , p. 35-57 (ISSN 1132-1873, lire en ligne Accès libre [PDF]).
  • (en) Pepe Karmel, « Pollock at work: the films and photographs of Hans Namuth », dans Kirk Varnedoe et Pepe Karmel (dir.), Jackson Pollock : new approaches (catalogue d'exposition, Museum of Modern Art), New York, H. N. Abrams, (ISBN 0-8109-6202-0), p. 87-137.
  • (en) Hilton Kramer, « Art. Photos of artists by Hans Namuth », The New York Times,‎ (lire en ligne).
  • (de) Franz Menges, « Namuth, Hans », dans Neue Deutsche Biographie (NDB), Berlin, Duncker & Humblot, (ISBN 3-428-00199-0, lire en ligne), vol. 18, p. 727-728.
  • (en) Joseph Mohan, « Hans Namuth’s Photographs and Film Studies of Jackson Pollock: Transforming American Postwar Avant-Garde Labor into Popular Consumer Spectacle », Arts, vol. 13, no 1,‎ (ISSN 2076-0752, lire en ligne).
  • Raynal Pellicer (scénario) et Titwane (illustration), Photographes de guerre : Hans Namuth et Georg Reisner, 1936-1940 (bande dessinée biographique), Paris, Éditions Albin Michel, , 152 p. (ISBN 9782226475084).

Liens externes

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