Louis-Albert-Guislain Bacler d’Albe | ||
Louis-Albert Ghislain Bacler d'Albe (1761-1824), ancien directeur du Dépôt de la Guerre (1814), Godefroy Engelmann (1788-1839), Charles-Etienne Leguay (1762-1846) | ||
Naissance | Saint-Pol-sur-Ternoise (Pas-de-Calais) |
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Décès | (à 62 ans) Sèvres (Yvelines) |
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Origine | France | |
Allégeance | République française Empire français Royaume de France Empire français (Cent-Jours) |
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Arme | Artillerie | |
Grade | Général de brigade | |
Années de service | 1793 – 1815 | |
Commandement | Directeur du Dépôt de la Guerre | |
Conflits | Guerres révolutionnaires Guerres napoléoniennes |
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Distinctions | Baron de l'Empire Officier de la Légion d'honneur Chevalier de Saint-Louis |
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Autres fonctions | Cartographe Topographe Peintre |
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Famille | Père de Louis Marc Bacler d'Albe | |
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Le général Louis-Albert-Guislain Bacler d’Albe, né le à Saint-Pol-sur-Ternoise, mort à Sèvres le , est un général, cartographe et peintre français de la Révolution et de l’Empire.
Il joue un rôle historique dans deux domaines : la cartographie et la peinture de bataille. Par ailleurs, à partir de 1804, il est responsable de la documentation cartographique au service de l'empereur.
Bacler d'Albe est l'un des plus anciens compagnons de Napoléon Ier : artilleur comme lui au siège de Toulon en 1793, il fait encore partie des quelques noms cités dans le testament de Napoléon, rédigé à Sainte-Hélène en 1821, pour l'éducation de son fils. En tant que chef de son cabinet topographique personnel de 1804 à 1814, il fournit à Napoléon toutes les cartes disponibles nécessaires aux prises de décision stratégiques pendant les campagnes (il est à sa disposition de jour comme de nuit).
Géographe, il est considéré comme l'un des meilleurs cartographes de son temps, il a perfectionné la représentation du relief par jeux d'ombres, dirigé le Dépôt de la Guerre (ancêtre de l'actuel Institut national de l'information géographique et forestière) et réalisé les premières cartes homogènes d'Italie puis d'Europe (exemplaire unique appelée « carte de l'empereur », perdue pendant la retraite de Russie à part la feuille de Bavière).
Artiste, il est considéré comme un rénovateur du genre des peintures de bataille (en apportant à la fois vue d'ensemble topographique et sens du détail humain) et un bon graveur (vues de Savoie et vues prises à travers l'Europe pendant les campagnes de l'Empire).
Son fils Joseph, participe à la guerre d'indépendance du Chili, en formant les premières générations d’ingénieurs militaires et en dressant les plans des batailles[1].
Louis Albert Guislain Bacler d'Albe est né en Artois en 1761. Son père est un ancien trésorier du régiment de Toul. Il faut noter que de nombreuses erreurs existent dans les biographies à cause des déclarations de Louis Bacler aux autorités militaires (cf. "Vérités sur les origines et la jeunesse de Louis-Albert BACLER, cartographe de Bonaparte", (ISBN 979-8488495579), 2021, L. Benosa).
Il part vers le Sud à 24 ans, avec sa jeune amie (qu'il n'épousera qu'en 1808), et devient un peintre à succès dans la région du Mont-Blanc entre 1785 et 1793. Il vit à Sallanches (Haute-Savoie), où naissent deux fils Joseph Albert le et Marie Louis François le , avant François Auguste Laurent (02/07/1795 ) à Nice, puis Alexandrine Julie Joséphine (24/12/1799) et enfin Louis Marc à Issy (28/10/1805).
Engagé volontaire pour défendre la République en 1793, il participe au siège de Lyon et au siège de Toulon et est élu capitaine d'artillerie par ses camarades de régiment sans avoir suivi de formation militaire.
Il est ensuite affecté à l’armée d'Italie (1794-1797). Il y devient officier géographe et cartographe officiel de l’armée d'Italie en raison de ses talents artistiques. Il participe à la première campagne d’Italie sous les ordres de Napoléon Bonaparte. Bonaparte le choisit comme dessinateur et peintre afin de populariser ses victoires auprès des Français. Bacler d'Albe réalise à cette occasion à Milan en l’An V l’un des premiers portraits de Napoléon Bonaparte, s'inspirant du travail d'Antoine Gros. Nommé par Bonaparte chef du Dépôt de la Guerre de la République cisalpine, il cartographie l'Italie entre 1797 et 1799, alors que Bonaparte est revenu en France.
Il entre de nouveau au service personnel de Bonaparte à partir 1799. À partir de cette date jusqu'à la chute de l’Empire, sa vie est entièrement dévouée au service de celui-ci. Chef des ingénieurs du Dépôt de la Guerre à Paris dans les années 1799-1804, il participe à la normalisation de la cartographie française (commissions de 1802-1803). Il poursuit dans le même temps son œuvre d'artiste. Chef du bureau topographique de l'Empereur de 1804 à , il le suit partout en temps de paix comme en campagnes et est son plus proche collaborateur sur le plan de la stratégie. Il réalise la Carte de l'Empereur, première carte homogène de l'Europe (au 1:100.000).
Directeur du Dépôt de la Guerre en 1814-1815, il sauve du pillage des occupants, les cuivres de la carte de Cassini, seule carte de France existant à l'époque. Privé de son emploi par la chute définitive du Premier Empire et surveillé par la monarchie, il se retire dans sa maison de Sèvres, où il vit comme artiste lithographe. Il réalise des centaines de gravures à partir des dessins réalisés tout au long de ses campagnes à travers l'Europe. Il meurt à Sèvres en 1824.
Bacler d'Albe aura une place privilégiée parmi les collaborateurs de Napoléon. Il se distingue en particulier par sa longévité, sa proximité et le caractère essentiel de son rôle.
Bacler d'Albe a une longévité exceptionnelle auprès de Napoléon : présent comme lui au siège de Toulon en 1793, il travaille directement sous ses ordres de 1804 à . Il est du petit cercle d'intime de son "cabinet intérieur". À la veille de sa mort, Napoléon se souvient de lui et cite plusieurs fois ses œuvres cartographiques dans son testament pour l'éducation de son fils, le Roi de Rome[2],[3].
Bacler d'Albe est le cartographe personnel de Napoléon de 1804 à 1814. Il synthétise toutes les informations géographiques et militaires sur la carte qu'il tient à jour pour l'Empereur, en temps de paix comme en temps de guerre, ce qui en fait le plus proche collaborateur de Napoléon.
Concrètement,
Pour sa part, l'État-Major commandé par le maréchal Berthier transmet et précise les ordres de Napoléon, mais sans prendre part aux décisions. Selon le colonel Vachée, "Aucun autre officier, y compris Berthier, ne nous semble avoir été associé d'une façon si intime au travail de pensée de Napoléon. À ce titre, Bacler d'Albe a tenu dans l'État-Major impérial une situation unique : seul, il a rempli auprès de Napoléon celles des fonctions d'État-Major qu'on doit considérer comme les plus élevées et qui consistent à préparer la décision du Chef... "[6]. Par conséquent, l'historien militaire Ronald Pawly considère que "Pendant les campagnes, Bacler d'Albe était la seconde personne la plus importante du Quartier-général impérial"[7].
Le bureau de Bacler d'Albe est donc considéré par les historiens comme "le laboratoire où germaient les idées de Napoléon" (pour le général Bonnal)[8], "le point de départ de toute préparation initiale des campagnes" (pour Ronald Pawly)[9], "Le centre nerveux le plus secret du Sanctuaire du génie " (pour la Napoleonic Society)[10]. Bacler d'Albe est pour Napoléon "indispensable" [11] et d'une "valeur inestimable" [12].
Par ailleurs, on loue son « indépendance d'esprit, qualité rare autour de Napoléon » [13] et le fait qu'il soit l'un des membres les plus intelligents et érudits de l'entourage de Napoléon[14].
Bacler d'Albe est donc naturellement, matériellement,un proche collaborateur de Napoléon : aux Tuileries son cabinet de travail donne sur la chambre de l'Empereur. En campagne, sa tente est voisine de la sienne[15], son cabinet de travail se trouve sous la tente même de l'Empereur [16],[17] ; il est le plus souvent appelé de jour comme de nuit, car considéré comme "indispensable" [18]. Le baron Fain, secrétaire de Napoléon, décrit ainsi le travail des deux hommes : "Souvent la grande dimension des cartes forçait l'Empereur à s'étendre de tout son long sur la table et d'Albe d'y monter aussitôt pour rester maître de son terrain ; je les ai vu plus d'une fois tous deux sur cette grande table et s'interrompant par une brusque exclamation, au plus fort de leur travail, quand la tête de l'un venait heurter trop rudement la tête de l'autre." [19].
Ce travail sans fin pour un maître exigeant lui vaut des honneurs, puisqu’il est promu colonel en 1807, puis général de brigade en 1813. Il est fait baron d'Empire en 1808.
Bacler d'Albe est une figure marquante de la cartographie française de son temps. Le conservateur de la bibliothèque du Commandement de la doctrine et de l'enseignement militaire supérieur de l'armée de terre écrit en 2001 qu'en termes de cartographie, "L'époque impériale est dominée par la personnalité de Bacler d'Albe" [20].
Son biographe Marc Troude résume ainsi ses années de travail : "Bacler d'Albe, travailleur infatigable, n'a cessé, depuis 1793 jusqu'en 1815, de se consacrer à la topographie, de donner satisfaction aux ordres de l'Empereur, il a veillé de façon assidue à l'étude du terrain, à l'organisation du service, à la gravure des cartes, à l'instruction du personnel, au perfectionnement de la technique. À l'occasion de chaque campagne, il préparait la documentation nécessaire et ordonnait des reconnaissances quand elles étaient possibles"[21].
Sa première grande œuvre est la réalisation de la première carte complète de toute l'Italie (1797-1802) au 1:256 000 (en 52[22] ou 56 feuilles) appelée Carte du théâtre des campagnes de Bonaparte en Italie. En 1797, Bacler d'Albe est nommé par Bonaparte directeur du Dépôt de la Guerre de la République cisalpine afin de réaliser cette carte.
Son autre grande œuvre est la première carte homogène de l'Europe (au 1:100 000), dite "carte de l'Empereur" (1809-1812), dont il est le maître d'œuvre. Il intègre dans cet ambitieux projet des cartes qu'il a réalisé antérieurement. Cette carte, réalisée en un seul exemplaire pour accompagner Napoléon dans sa conquête de l'Europe, est en partie détruite pendant la retraite de Russie[23].
Chef des ingénieurs géographes du Dépôt de la Guerre en 1799-1804, Bacler d'Albe participe à la normalisation de la cartographie française[24]. En particulier, il obtient en 1802 l'abandon de l'ancienne représentation du relief en semi-perspective et l'adoption du "procédé des plus grandes pentes"[25]. Il perfectionne la technique de la plus grande pente avec la méthode des ombres[26], apport d'un artiste à la science cartographique. Bacler d'Albe est également le promoteur et le président de la commission (ou de sous-commissions) qui uniformisent les signes et conventions en usage dans les cartes françaises[27], ainsi que les procédés de gravure et d'impression des cartes[15]. Les commissions de 1802-1803 établissent les normes (système métrique, altitudes par rapport au niveau de la mer, échelle des cartes, établissement du cadastre, lancement de la réalisation d'une nouvelle carte de France) encore en usage de nos jours[28]. Il travaille entre autres avec le graveur François Aubertin[29].
Chargé de la formation des ingénieurs-géographes du Dépôt de la Guerre, Bacler d'Albe participe au mouvement de professionnalisation du métier qui intervient à cette époque[30].
Enfin, directeur du Dépôt de la Guerre en 1814-1815, Bacler d'Albe sauve à deux reprises les cuivres de la fameuse carte de Cassini, seule carte de France de l'époque, du pillage des armées "Alliées"[31]. Le Dépôt de la Guerre, rebaptisé Service géographique de l'armée (SGA), est devenu en 1940 l'Institut géographique national (IGN).
Malgré son travail harassant qui fait de lui un des meilleurs cartographe de son époque, Bacler d’Albe est selon le Dictionnaire Bouillet aussi un excellent peintre de bataille et de paysage et un graveur prolifique dont la qualité des œuvres le place au même rang que ses contemporains plus connus comme Antoine-Jean Gros.
Un biographe résume : "L'œuvre artistique de Bacler d'Albe est considérable. Le nombre de ses tableaux s'élève à plus de 500 et comprend des toiles, des aquarelles, des gouaches, des gravures et des lithographies."[32]. L'œuvre artistique de Bacler d'Albe peut se diviser en trois grandes parties : les vues des Alpes ; la peinture au service de Bonaparte ; et la réalisation de gravures à partir surtout des souvenirs de ses campagnes à travers l'Europe.
Installé dans les Alpes en 1785-1793, Bacler d'Albe dessine de nombreux paysages de la région du Mont-Blanc à l'époque où un public préromantique commence à s'intéresser à la beauté et au pittoresque des montagnes. Un spécialiste estime que "Entre 1785 et 1800, l'artiste qui se vendait le plus, en Savoie et en Suisse, était Bacler d'Albe, sans cesse en excursion dans le pays pour prendre de nouvelles vues, sans cesse visité par les voyageurs illustres." [33].
Parmi les principales œuvres de cette période, son biographe Despax cite notamment[34] :
À partir de 1796-1797, Bacler d'Albe est embauché par Bonaparte pour réaliser des tableaux de sa campagne d'Italie. Bacler d'Albe peint notamment de grandes toiles (batailles d'Arcole, Rivoli, Lodi, passages du Pô dont celui à Plaisance) et, plus tard, la veillée d'Austerlitz (1805) et le bombardement de Vienne de 1809. Plusieurs de ces tableaux sont exposés à Versailles. Des historiens citent en particulier deux tableaux, la bataille d'Arcole et la veille d'Austerlitz auxquelles il avait assisté. Le premier de ces tableaux se voyait à Trianon et le second dans la galerie de Diane aux Tuileries à Paris.
Cette œuvre présente un double intérêt à la fois pour l'histoire de l'art (le renouvellement du genre de la peinture militaire) et pour l'histoire politique (elle est l'un des éléments de la formation du mythe de Bonaparte dans l'esprit des Français).
Sur le plan artistique, les tableaux militaires de Bacler d'Albe constituent une œuvre novatrice appelée à faire école. Ses toiles de la campagne d'Italie introduisent notamment la précision topographique dans la peinture militaire. Un historien d'art juge ainsi que "La peinture militaire de ce temps a modifié la manière traditionnelle dans le sens de l'exactitude topographique et de la fidélité narrative" et cite Carle Vernet, Thévenin, Bacler d'Albe, Lejeune[36],[37]. Bacler d'Albe, à la fois artiste et topographe, est particulièrement bien placé pour réaliser cette synthèse.
En même temps, Bacler d'Albe ne néglige pour autant la représentation de l'humain. Un historien spécialisé écrit : "Le dessinateur, fort des connaissances militaires de l'officier, place l'homme au premier plan de ses œuvres. C'est l'apport original de Bacler qui décrit toujours les actions des combattants alors que les autres artistes peignent les paysages dans lesquels se sont passés les événements. De là l'atmosphère unique qui émane de ses gouaches. Enfant des Lumières, Bacler est un humaniste pour lequel l'homme au centre de la Création est la mesure de toutes choses"[38].
Ces nouveautés renouvelleront ce genre artistique et seront un peu un "prototype" copié par les plus grands, y compris Giuseppe Pietro Bagetti[39], Lejeune ou Carle Vernet[40], Antoine-Jean Gros[41].
Au-delà de ses qualités artistiques, l'œuvre de Bacler d'Albe (comme celle d'un Bagetti par exemple) jouera un grand rôle historique : elle concourt, à la demande de Bonaparte, à créer le mythe du général Bonaparte dans l'esprit des Français, préparant ainsi l'accession au pouvoir de son chef. Bacler d'Albe réalise ainsi en 1797 le premier portrait de Bonaparte (probablement avant celui réalisé par Gros).
Notons qu'à l'époque impériale, Bacler d'Albe réalise également quelques tableaux mythologiques qui semblent avoir disparu[42] :
Après la chute définitive de l'Empire en 1815, ruiné et privé de tout emploi public, Bacler d'Albe réalise des centaines de gravures à partir des dessins ramenés des campagnes menées à travers l'Europe de 1793 à 1814 (Italie, Allemagne, Europe centrale, Espagne, Paris et la région parisienne). Il est l'un de ceux qui lancent la mode de la lithographie (gravure sur pierre, en couleur). Son biographe écrit : "À cette époque, la lithographie, sous l'influence de deux imprimeurs, Engelmann, en 1815 et de Lasteyrie en 1816, commençait à acquérir une grande vogue parmi le public. Bacler d'Albe en fût l'animateur : il créa à Sèvres un groupement artistique pour la propagande de ce nouveau procédé de reproduction artistique, les peintres de Sèvres."[43].
Celui qui fut, selon certains, le deuxième personnage le plus important du quartier-général[44] impérial, travaille également anonymement comme peintre d'assiettes, tasses, soucoupes et autres vases à la manufacture de porcelaine de Sèvres, voisine de sa maison[45].
Il publie pendant cette période[46] :
Il est le père de l'artiste Louis Marc Bacler d'Albe.
(à compléter)
Figure | Blasonnement |
Armes du baron Bacler d'Albe et de l'Empire (décret du , lettres patentes du (Paris))
Écartelé au premier et quatrième d'azur au chevron d'argent, accompagné de trois trèfles du même ; au deuxième des barons tirés de l'armée ; au troisième de sable au globe terrestre d'or, sommé d'un compas ouvert, les pointes basses d'argent.[49],[50],[51] |