Maurizio Cattelan

Maurizio Cattelan
Autoportrait de l'artiste en sculpture grandeur nature. L'artiste lève les yeux à travers un trou dans le sol, la pièce du dessous est le vestiaire du personnel du musée (Musée Boijmans Van Beuningen).
Naissance
Voir et modifier les données sur Wikidata (64 ans)
PadoueVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Représenté par
Galerie Emmanuel Perrotin (d), Marian Goodman Gallery (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Lieux de travail
Distinction
Site web
Œuvres principales

Maurizio Cattelan est un artiste italien né à Padoue le [1]. Il vit et travaille à New York. Il a réalisé ses œuvres d'art les plus importantes à Viale Bligny 42 à Milan, où il a vécu de nombreuses années.

Ses œuvres connaissent le succès à la fin des années 2000 sur le marché de l'art contemporain[2] et chez les collectionneurs[3].

Formé de façon indépendante, il commence sa carrière à la fin des années 1980. Ses œuvres, qui prennent forme à partir d'objets et de personnes du monde réel, sont le résultat d'une opération irrévérencieuse contre l'art et les institutions[4].

Le musée Guggenheim de New York a présenté en une rétrospective de son œuvre sur vingt-et-une années, intitulée « Maurizio Cattelan: All »[5]. En juin 2010, il lance le magazine Toilet paper avec le photographe Pierpaolo Ferrari[6].

Cattelan ouvre sa propre galerie new-yorkaise, la Wrong Gallery, espace où rien ne se vend et qui demeure fermée de façon permanente.

HIM installé dos au public dans le Ghetto de Varsovie.

Cattelan crée des œuvres qui font toujours scandale et donnent lieu à toutes sortes d'interprétations, jusqu'à mettre en cause la religion et le sacré, comme La Nona Ora, sculpture qui représente une effigie, en cire et grandeur nature, du défunt pape Jean-Paul II terrassé par une météorite. L'artiste n'apprécia d'ailleurs pas la revente de La Nona Ora par son collectionneur ; pour illustrer son mécontentement, il scotcha son galeriste (Massimo De Carlo) au mur afin qu'il se vende lui-même.

En 1994, il persuade le galeriste Emmanuel Perrotin de passer un mois déguisé en lapin rose en forme de pénis appelé Errotin le Vrai Lapin. À une autre occasion, il fait pédaler sur place les gardiens du musée où on lui demande d'exposer. Sa sculpture Him (Adolf Hitler agenouillé et suppliant), réalisée en 2001, connut un énorme succès. Elle a été vendue aux enchères chez Christie's à New York le pour 15 037 403 dollars[7].

Réception par la critique

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Il entretient une allure de « ragazzo[8] » italien[réf. nécessaire]. Des médias rapportent qu'il est désigné comme « le Buster Keaton de l'art contemporain[9] » ou comme « l'idiot du village » de l'art contemporain[10] ». Le caractère provocateur de ses expositions est généralement évoqué[11],[12],[13].

Sélection d'œuvres

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  • 1996 :
    • La Ballade de Trotski, composé d'un cheval empaillé, vendue par Sotheby's en 2004.
    • Novecento, analogue (ou la même ?), véritable cheval empaillé suspendu, par des harnais de cuir, à un des hauts plafonds peints du Château de Rivoli (musée d'art contemporain).
  • 1997 :
    • Charlie don't surf (1997), enfant au pupitre, les deux mains clouées par des crayons, au musée d'art contemporain (musée au Château de Rivoli).
    • Autruche mâle naturalisée (1997), Une autruche, la tête enfoncée dans le parquet (Fonds national d'art contemporain).
  • 1999 :
    • La Neuvième heure (La Nona Ora), créée en 1999, une effigie, en cire et grandeur nature, du pape Jean-Paul II terrassé et cloué au sol par une météorite.
    • Mère, présentée à la Biennale de Venise, un véritable fakir en train de prier est enfoui sous le sable, ses mains seules sont en vue. Cette performance fut réalisée quatre fois une heure par jour.
  • 2001 :
    • Hollywood, des lettres blanches géantes identiques à celles d'Hollywood sont plantées sur une colline dominant la décharge publique de Palerme, la plus importante de Sicile. Dans le cadre de la biennale de Venise, il affrète un avion et fait admirer sa réalisation par la jet-set de l'art contemporain, déclarant : « L'art doit être en compétition avec la télévision. Si on n'utilise pas la même stratégie, on n'aura jamais de succès. »
    • Par peur de l'amour, un éléphant en uniforme du Ku Klux Klan.
    • Him, représentant un petit Adolf Hitler agenouillé comme s'il priait. Elle est l'objet d'une controverse lors de son exposition à Varsovie en [14].
  • 2004 :
    • Maintenant, présentée à Paris dans la chapelle des Petits-Augustins aux Beaux-Arts, représente la dépouille de John Fitzgerald Kennedy allongé dans son cercueil. Il s'agit d'un mannequin en cire, pieds nus dans un cercueil ouvert.
  • 2010 :
    • Rétrospective 2003-2007 au Menil Collection de Houston[15]
    • L.O.V.E. (Liberté, Haine, Vendetta et Éternité), marbre de Carrare, 6 tonnes et 4,60 m et 11 mètres de haut avec le socle : une main ouverte aux doigts coupés, à l’exception du majeur dressé vers la haut, Piazza Affari (it), face au Palazzo Mezzanotte de la Bourse de Milan[16].
  • 2013 :
    • Kaputt, une série de cinq chevaux naturalisés accrochés à un mur par l'encolure, exposés à la Fondation Beyeler[17].
  • 2016 :
    • Not Afraid of Love[18], exposition de trois pièces majeures à la Monnaie de Paris, du au .
  • 2018 :
    • Big Paintings, une série de peintures de grand format (297 × 210 cm et 210 × 210 cm) reprenant et détournant plusieurs classiques de l'histoire de l'art[19],[20].

Médiatisation auprès du grand public

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Fin 2019, deux de ses œuvres sont particulièrement couvertes par des médias grands publics généralistes (dans le sens où ils ne sont pas spécialisés dans les informations autour de l'art contemporain), allant jusqu'à passer dans des journaux télévisés de grande audience comme le 19/20 de France 3[21] ou le Journal de 20H de France 2[22].

Vol d'America

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La première est America, des toilettes en or massif de 18 carats[23], estimées à plus de 1 million d'euros[21],[24]. Ces toilettes sont fonctionnelles et normalement reliées à la plomberie du bâtiment où elles sont exposées, et peuvent être utilisées par les visiteurs[21],[23],[24]. America est présentée comme une satire des excès de richesses aux États-Unis[23], et « de l'art du 1 % (comprenant les personnes les plus riches de la planète) pour les 99 autres pour cent »[24].

L’œuvre connaît une première médiatisation en 2019, lorsque l'administration Trump demande au Musée Solomon R. Guggenheim de New York de prêter le Paysage enneigé de Vincent van Gogh en , afin de l'exposer à la Maison-Blanche, ce que le musée refuse en proposant de prêter America à la place[23].

Cependant, l’œuvre devient vraiment médiatisée le , après qu'elle a été volée la nuit précédente alors qu'elle se trouvait au Palais de Blenheim au Royaume-Uni, où avait lieu une exposition consacrée à Maurizio Cattelan[24]. Les voleurs auraient utilisés deux véhicules, se seraient introduits dans le palais durant la nuit, et auraient quitté les lieux vers 4 h 50[24]. America étant reliée à la plomberie lorsqu'elle a été volée, le cambriolage a provoqué une inondation dans le palais[24]. Un homme a été placé en garde à vue[24], mais l’œuvre n'a pas été retrouvée, ce qui suscite l'inquiétude de la police britannique, car si, entière, America vaut un peu plus de 1 million d'euros, son or fondu en vaut environ 3 millions[21].

Vente et ingestion de Comedian

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Comedian est une banane fraîche scotchée à un mur avec du gros scotch argenté. Cattelan la présente comme une interrogation sur la notion d'art, qui se trouve selon lui plus dans l'idée que dans l’œuvre d'art elle-même[25]. Il estime se placer dans la continuité de la célèbre Fontaine de Marcel Duchamp, et dans la continuité de sa propre carrière après Perfect Day, un homme qu'il avait scotché à un mur en 1999, et America[25]. Selon le critique d'art Fabrice Bousteau, c'est également une critique des prix sur le marché de l'art qui peuvent être jugés comme obscènes[25]. Comedian existe en trois exemplaires[26].

Deux exemplaires sont vendus le à la foire Art Basel à Miami pour 120 000 , tandis que le troisième exemplaire reste en vente pour 150 000  à lui seul[26]. Les exemplaires vendus sont fournis avec un certificat d'authenticité, et un protocole est prévu pour remplacer la banane par une autre une fois qu'elle est pourrie[26].

Quelques heures après la vente, l'artiste américain d'origine géorgienne David Datuna mange l'un des exemplaires, lors d'une performance appelée Hungry Artist (« Artiste ayant faim » ou « Artiste affamé »), et diffuse la vidéo sur son compte Instagram[27], pour dénoncer le prix de vente de certaines œuvres alors que 95 % des artistes dans le monde sont pauvres selon lui[22]. Il précise dans la description de sa vidéo qu'il aime le travail de Maurizio Cattelan, et qu'il a trouvé la banane délicieuse[27]. Si la performance est bien accueillie par les visiteurs qui y ont assisté, Datuna est expulsé de la foire juste après[27]. Cependant, selon Cattelan et Lucien Terras, le directeur des relations entre Art Basel et les musées, le préjudice n'est que relatif, car l’œuvre résiderait plus dans l'idée que dans l'objet lui-même[25],[27], et parce qu'un protocole de remplacement de la banane est prévu[26]. Bousteau, qui interprète Comedian comme une critique des prix du marché de l'art, va jusqu'à faire une parallèle entre la performance de Datuna qui prolongerait le message de Cattelan, et l'acte de Pierre Pinoncelli qui avait uriné sur la Fontaine de Duchamp pour prolonger l'idée de l’œuvre et se la réapproprier en 1993[25].

Un autre exemplaire est avalé en 2023 à Séoul[28].

Publications

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Notes et références

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  1. (it) Cattelan, paura d'essere risucchiato dallo scarico della lavatrice dans La Stampa le 20 juillet 2010 : « L'artista Maurizio Cattelan, nato a Padova il 21 settembre 1960 » .
  2. Olivier Wicker, « L'échelle de la célébrité », Libération Nextcinéma,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Personnel de rédaction, « Against the odds », The Economist,‎ (lire en ligne, consulté le )
  4. (it) « Cattelan, Maurizio nell'Enciclopedia Treccani », sur treccani.it (consulté le ).
  5. (en) Roberta Smith, « A Suspension of Willful Disbelief », The New York Times,‎ (lire en ligne, consulté le )
  6. (it) « Toilet Paper - Maurizio Cattelan e Pierpaolo Ferrari - Art Magazine », sur Collateral, (consulté le )
  7. (en) « Maurizio Cattelan (B. 1960) , Him », sur christies.com (consulté le ).
  8. Jeune homme.
  9. Interview dans Paris Match à lire sur parismatch.com.
  10. Site French Morning de New York frenchmorning.com.
  11. (it) Laura Larcan, « "Tutto" Cattelan al Guggenheim, irriverenza e provocazione », La Repubblica Arte, Recensioni,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. Thierry Hay, « Maurizio Cattelan le provocateur expose à New York », culturebox.francetvinfo.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  13. Jean Pierrad, « Maurizio Cattelan - L'art spaghetti ? », lepoint.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  14. Alice Bosio, « Une statue d'Hitler controversée à Varsovie », Le Figaro,‎ (lire en ligne, consulté le )
  15. (en-US) « ARTPULSE MAGAZINE » Reviews » Cattelan vs. Cattelan » (consulté le )
  16. Article du Figaro
  17. Harry Bellet, « Bâle : les chevaux de Maurizio Cattelan », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  18. Programme de la Monnaie de Paris, site officiel, en ligne.
  19. Big Paintings
  20. (en) « Maurizio Cattelan on ArtStack - art online », sur My Favorite Arts (consulté le )
  21. a b c et d « Royaume-Uni : le WC en or de Maurizio Cattelan volé dans un palais », sur francetvinfo.fr, (consulté le )
  22. a et b « Art contemporain : une banane vendue 120 000 dollars », sur francetinvfo.fr, (consulté le )
  23. a b c et d Jean Zeid, « La Maison Blanche voulait un Van Gogh, Guggenheim lui propose des toilettes en or », sur francetvinfo.fr, (consulté le )
  24. a b c d e f et g V.G., « Royaume-Uni : un WC en or massif volé dans un palais », sur leparisien.fr, Le Parisien, (consulté le )
  25. a b c d et e Sophie Jouve, Lorenzo Ciavarini Azzi, Fabrice Bousteau, « "C'est une œuvre qui provoque et invite à sourire" : la banane de Cattelan décryptée par le critique d'art Fabrice Bousteau », sur francetvinfo.fr, (consulté le )
  26. a b c et d Laure Narlian, « Une banane scotchée au mur vendue 120 000 dollars à la foire Art Basel de Miami », sur francetvinfo.fr, (consulté le )
  27. a b c et d « La banane de l'artiste Maurizio Cattelan, vendue 120 000 dollars, aussitôt mangée par un autre artiste », sur francetvinfo.fr, (consulté le )
  28. « Corée du Sud : un étudiant mange la banane qui faisait partie d'une œuvre de l'artiste Maurizio Cattelan », sur Franceinfo, (consulté le )

Bibliographie

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  • (en) Hans Werner Holzwarth, Art Now Vol 3. A cutting-edge selection of today's most exciting artists, Cologne, Taschen, 2008, p. 88-91.
  • (en) Uta Grosenick, Burkhard Riemschneider, Art Now. 137 Artists at the Rise of the New Millenium, Cologne, Taschen, 2002, p. 88-91.
  • (en) « 6th Caribbean Biennal - A Project by Maurizio Cattelan », Les presses du réel, Dijon, 2001 (ISBN 978-2-84066-050-7).

Liens externes

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