Né en Alsace, à Thann, le , René Laforgue est mobilisé dans l’armée allemande en 1914-1918. Il étudie la médecine à Berlin, mais il soutient en France en 1919 sa thèse de médecine consacrée à « l'affectivité dans la schizophrénie »[1].
Son attitude durant la guerre et ses tentatives de collaboration avec l’Institut Göring de Berlin contrôlé par les Nazis lui valent d'être mis en cause après la guerre, par les autres psychanalystes de la Société psychanalytique de Paris qui pour leur part avaient choisi l'exil (Marie Bonaparte) ou la résistance, et dont certains exerçaient clandestinement après la fermeture de la Société en 1940[3].
Il est poursuivi après la guerre, notamment à la demande de ses collègues psychanalystes. Il se défend en indiquant qu'il avait hébergé son ami et éditeur Bernard Steele qui était juif, ainsi que des résistants dans sa propriété de La Roquebrussane, et qu'il avait facilité le passage d'Olivier Freud, un fils de Sigmund Freud et de son épouse par l'Espagne, et dirigé l'analyse d'Eva Freud[4],[5],[6]. Il est acquitté à l'issue d'un procès devant la section d'épuration de la cour d'appel de Paris[7], mais non réhabilité[4].
Sa carrière ne se remit pas de ces événements. Il participe à la revue Psyché de Maryse Choisy, puis en 1953, il quitte la Société psychanalytique de Paris pour la Société française de psychanalyse. Il s'installe en 1956 à Casablanca où il fonde un institut de psychanalyse. Il revient en France en 1956, en lien avec l'indépendance du Maroc[1].
René Laforgue est à l'origine de la notion de « névrose d'échec », terme qu'il introduit en psychanalyse dans son ouvrage Psychopathologie de l'échec[9], paru chez Payot en 1939 (d'après la référence bibliographique donnée par Jean Laplanche et Jean-Bertrand Pontalis)[9] ou en 1941 dans Les Cahiers du Sud selon d'autres sources[10]. Selon Laplanche et Pontalis, cette notion est associée à de nombreux travaux de Laforgue consacrés à la fonction du surmoi, aux mécanismes d'auto-punition et à la psychopathologie de l'échec en général[9]. L'auteur repère en effet toutes sortes de syndromes d'échec dans la vie affective de l'individu ainsi que dans des groupes sociaux comme la famille, la classe, le groupe ethnique, en cherchant un ressort commun au fonctionnement de tels groupes : l'action du surmoi[9].
La Psychanalyse et les névroses (en collaboration avec René Allendy, préface de Henri Claude). Payot, 1924.
L'Échec de Baudelaire, Denoël, 1931
Misère de l'homme (Récit), Denoël, 1932
Clinique psychanalytique : conférences faites à l'institut de psychanalyse de Paris, Denoël, 1936
Relativité de la réalité, Denoël, 1937
Psychopathologie de l'échec (1941), Marseille, Les Cahiers du Sud ; Paris, Payot, 1944, nouv. éd. ; Paris, Payot 3e éd. revue, 1950 ; Genève, Édition du Mont-Blanc, revue par Délia Laforgue, 1963 ; puis Guy Trédaniel, 1990, (ISBN2857076037)
Talleyrand (l'homme de la France), Edition Mont-Blanc, 1947
Essais sur la schizonoïa (articles de 1923-1929), Edition Mont-Blanc, 1965
Au-delà du scientisme (articles parus dans la revue Psyche), Edition Mont-Blanc, 1965
Réflexions psychanalytiques (articles parus dans la revue Psyche entre autres), Edition Mont-Blanc, 1965
Les Processus d'auto-punition (écrit principalement par Angelo Hesnard), Denoël et Steele, Paris, 1931, 83 p.
↑Jean-Pierre Bourgeron, Marie Bonaparte et la psychanalyse. À travers ses lettres à René Laforgue et les images de son temps, Ed. Champion-Slatkine, 1993, (ISBN2051009090)
↑Simon Epstein (2008), Un paradoxe français. Antiracistes dans la Collaboration, antisémites dans la Résistance, Albin Michel, collection Bibliothèque Histoire, p. 114.
↑ a et bcopie du jugement dans Roudinesco, 1994, Histoire de la psychanalyse en France, vol. 2 : annexes, et p. 170–177
↑Élisabeth Roudinesco et Michel Plon, « Freud Olivier (1891-1969) », dans Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Fayard, (1re éd. 1997), 1789 p. (ISBN978-2-253-08854-7, BNF42534520), p. 524-526.
↑Élisabeth Roudinesco et Michel Plon, « Laforgue René (1894-1962) », dans Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Fayard, (1re éd. 1997), 1789 p. (ISBN978-2-253-08854-7, BNF42534520), p. 894-899.
Martine Lilamand, René Laforgue, fondateur du mouvement psychanalytique français. Sa vie, son œuvre, thèse non publiée, université de Paris Val-de-Marne, Créteil, 1980.
« Névrose d'échec », dans Dictionnaire international de la psychanalyse, Paris, Hachette, (ISBN201279145X), p. 1157-1158.
Freud et la France, 1885–1945, Presses Universitaires de France, 2010 (ISBN2130545157)
Annick Ohayon, Psychologie et psychanalyse en France. L'impossible rencontre 1919–1969, Paris, La Découverte, 2006, (ISBN2707147796)
Marie-Odile Pisot Poivet, René Laforgue. Sa place originale dans la naissance du mouvement psychanalytique français, 1978, thèse non publiée, université de Paris Val-de-Marne, Créteil
« René Laforgue ou la collaboration manquée Paris/Berlin, 1939-1942. Documents concernant l'histoire de la psychanalyse en France durant l'Occupation », Cahiers Confrontation, 16, automne 1986, p. 243-278.
Histoire de la psychanalyse en France. 2 1925-1985, Paris, Fayard, , 781 p. (ISBN2-213-59360-4), p. 698-.
Élisabeth Roudinesco et Michel Plon,
« Laforgue René (1894-1962) Psychiatre et psychanalyste français », dans Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Fayard, (1re éd. 1997), 1789 p. (ISBN978-2-253-08854-7, BNF42534520), p. 894-899.
« Freud Olivier (1891-1969), fils de Sigmund Freud », dans Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Fayard, (1re éd. 1997), 1789 p. (ISBN978-2-253-08854-7, BNF42534520), p. 524-526.