Therac-25 est le nom d'une machine de radiothérapie développée conjointement par l'Énergie atomique du Canada Limitée (EACL, Canada) et CGR MeV (France). Il s'agissait d'une évolution des modèles Therac-6 et Therac-20.
Entre 1985 et 1987, le Therac-25 est impliqué dans au moins six accidents durant lesquels des patients reçurent des doses massives de radiation, parfois de l'ordre de plusieurs centaines de grays. Au moins cinq patients décèdent des suites de l'irradiation.
La cause directe du dysfonctionnement était d'ordre informatique. La machine est depuis souvent citée dans les documents qui traitent de la sécurité et de la validité des logiciels destinés à des applications sensibles où la vie peut être mise en danger.
Le premier prototype fut produit en 1976. La version commerciale, contrôlée par un ordinateur PDP-11 et à l'origine des accidents, fut disponible dès 1982. Elle fonctionnait selon deux modes de traitement :
Lorsqu'il travaillait dans le premier mode, le Therac-25 émettait un faisceau d'électrons dont l'intensité était réglée par des aimants. Dans le mode rayons X, trois composants se mettaient en rotation pour intercepter le flux d'électrons et modifier son intensité et sa forme. La cible convertissait les électrons en rayons X, un filtre générait une intensité uniforme et finalement un ensemble de blocs mobiles (le collimateur) focalisait les rayons. L'intensité du rayonnement était mesurée grâce à une chambre d'ionisation.
Les accidents se produisaient quand le faisceau d'électrons était activé sans que la cible soit correctement mise en place. Le logiciel qui pilotait le Therac-25 ne détectait pas ce mauvais fonctionnement qui engendrait une irradiation massive et potentiellement mortelle pour le patient. Celui-ci recevait directement le faisceau d'électrons qui, avec sa très forte énergie, produisait des brûlures thermiques et radioactives ainsi qu'une sensation proche d'un intense choc électrique. Plusieurs personnes qui furent exposées allaient décéder par la suite.
Le , à Marietta, Georgie, une femme de 61 ans atteinte d'un cancer du sein commença un traitement avec le Therac-25[1]. La machine était en fonctionnement depuis six mois et n'avait pas posé de problèmes. Les opérateurs dirigèrent le faisceau de 10 MeV vers la clavicule de la patiente. Celle-ci ressentit alors une intense chaleur.
Peu après le traitement, la patiente souffrit de douleurs dans la région irradiée. Celles-ci furent imputées au traitement par radiothérapie. Mais la peau commençait à présenter les signes d'une brûlure radioactive. Les spécialistes estimèrent par la suite qu'elle avait reçu une dose comprise entre 15 000 et 20 000 rads (alors que ce type de traitement utilise des doses d'environ 200 rads). Elle continua à souffrir de ses brûlures et son bras resta paralysé.
Le cas ne fut pas signalé au constructeur avant .
Les autres incidents furent similaires avec des atteintes profondes de la peau avec des nécroses, des dégâts au niveau des articulations ainsi que de fortes douleurs dans la zone irradiée.
Au Canada, une autre patiente[2] de 40 ans, traitée par radiothérapie avec le Therac 25 en pour un cancer du col de l'utérus fut également victime d'une erreur de la machine. Lors de sa séance du , après que l'opérateur eut activé le Therac, celui-ci s'arrêta en indiquant NO DOSE, TREATMENT PAUSE. Le manipulateur suivit la procédure recommandée et réessaya de mettre en fonctionnement la machine, à 4 reprises avec le même message d'erreur à chaque fois. À la 5e tentative, la machine s'arrêta et un technicien fut appelé qui ne retrouva rien d'anormal. La patiente se plaignit de brûlure dans les hanches dès le et fut hospitalisée le 30. Elle décéda le de la même année. L'autopsie révéla que la mort était due à son cancer, toutefois l'irradiation avait atteint de manière importante la partie inférieure de son corps et un remplacement complet de sa hanche aurait été nécessaire si elle avait survécu. Un technicien de l'EACL estima ensuite qu'elle avait reçu entre 13 000 et 17 000 rads.
Les chercheurs ouvrirent une enquête afin de déterminer les causes de ces accidents. Plusieurs problèmes de gestion du projet informatique furent découverts :
D'autres problèmes, liés à la conception et la technique, furent également révélés par l'enquête :