Née à Saint-Josse-ten-Noode le 24 août 1886[1] d’une famille française, la jeune Bruxelloise Èva Louise François, médaillée du gouvernement belge, est envoyée perfectionner ses études à Paris[2]. Elle se passionne très jeune pour l’art de la comédie et suit les cours de Paul Mounet au conservatoire. En 1913, lors d’une matinée au théâtre Antoine, elle rencontre le poète, journaliste et homme de théâtre Louis Delluc (1890-1924) qui va devenir son pygmalion au cinéma et son mari. Ils ont une passion commune pour la littérature, la poésie et la musique[1].
Eve Francis crée le 2 juin 1914 au théâtre de l’ŒuvreL’otage de Paul Claudel. Elle joue ensuite dans L’annonce faite à Marie et Le partage de midi et s'impose comme une des grandes interprètes du théâtre de Claudel[1],[2]. Ils partagent une longue amitié et Eve Francis publie, en 1973, une biographie de l'écrivain, Un autre Claudel[3],[4].
En 1914, Paul Claudel dresse un portrait de l'actrice, rapporté dans l'ouvrage du critique littéraire, Henri Guillemin : « S'il a tant apprécié Ève Francis, c'est qu'elle possédait, disait-il, un sens inné de ce qu'il avait personnellement voulu faire et qu'il avait tout de suite constaté un accord miraculeux et comme substantiel entre la diction de cette actrice et son propre souffle, l'économie sonore de ses vers et leur texture secrète »[4].
Ève Francis récite des textes et poèmes de Paul Claudel en Italie dans le but d'inciter le pays à s'engager dans la Première Guerre mondiale. Paul Claudel affirme d'ailleurs dans Animus et Anima, un texte dédié à Ève Francis, « C'est grâce à nous que l'Italie est entrée dans la Première Guerre mondiale »[2],[3].
Lors d'une interview d'Ève Francis réalisée en 1978, l’entretien s'achève par la narration passionnée de ses rapports avec Paul Claudel qui a été « la personnalité la plus extraordinaire de sa vie »[5]. En 2006, l'écrivaine Dominique Bona retrace la rencontre d'Ève Francis et de Paul Claudel dans une biographie[6].
En 1919, Eve Francis joue dans La fête espagnole de Germaine Dulac, sur un scénario de Louis Delluc[1]. Par la suite, elle joue dans la plupart des films réalisés par Louis Delluc. C'est dans l’œuvre la plus connue, La Femme de nulle part (1922), l'avant-dernier qu'il réalise, qu'elle révèle tout son talent[9],[7].
Eve Francis et Louis Delluc se séparent en 1922 mais ils restent liés[7].
Ève Francis décède le , cinq ans après avoir joué un dernier rôle dans Adieu Poulet de Pierre Granier-Deferre[7]. À l'issue d'une cérémonie à l'église Saint-Pierre de Neuilly-sur-Seine, elle est inhumée dans la sépulture de Louis Delluc au cimetière parisien de Bagneux. Bien que séparée de Louis Delluc depuis 1922, soit cinquante-huit ans, elle le rejoint dans la sépulture dont elle avait pris soin de faire refaire et graver la pierre tombale en beau granit, ornée d’un bronze de Gabriel Spat(ru)[7].
Une affiche lithographique la représentant, intitulée affiche de promotion de la comédienne Ève Francis, œuvre de Bernard Bécan, est conservée à la Cinémathèque française[13].
↑ abcde et fGilles Delluc, Brigitte Delluc, « Louis Delluc, homme de lettres, cinéaste et malade », XXIIIe colloque des amis de Cadouin 2016, , p. 56-76 (lire en ligne [PDF])
↑Pascal Manuel Heu, « Oubliés et méconnus : Quelques figures féminines », La lettre du SFCC, Paris, Imp. Grafik Plus (Rosny-sous-Bois), no 49, , p. 7 / 17 (lire en ligne [PDF], consulté le ).
↑Ève Francis, Temps héroïques, théâtre - Cinéma, éditions Denoël, Paris, 1947, préface de Paul Claudel.