Boris Vildé

Boris Vildé
Boris Vildé.
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Irène Vildé-Lot (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Boris Vladimirovitch Vildé, né le 25 juin (8 juillet) 1908 à Saint-Pétersbourg de parents russes, fusillé le au fort du Mont-Valérien, a été linguiste et ethnologue au musée de l'Homme, à Paris (France), spécialiste des civilisations arctiques.

Dès le mois d'août 1940 à Paris, il fonde et dirige avec Paul Hauet l'un des premiers mouvements de Résistance, qui se désigne comme « Comité national de salut public » et sera ensuite connu sous le nom de Réseau du musée de l'Homme crée avec son adjoint anthropologue Anatole Lewitsky, à l'initiative de la bibliothécaire Yvonne Oddon. Ils sont arrêtés tous les trois peu après, en mars 1941. Les deux hommes sont emprisonnés avec plusieurs membres du réseau, puis fusillés le .

Après la mort prématurée de son père Vladimir Iosivitch en 1913, Boris Vladimirovtch a passé son enfance d'abord à Saint-Pétersbourg (Pétrograd après 1913) puis dans le village ses grands-parents maternels nommé Yastrebino (rayon de Volossovo) situé à 120 km de Saint-Pétersbourg.

L'Avant-guerre

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En 1919, la famille s'est réfugiée à Tartu en Estonie (Maria Vassilievna Vildé-Goloubeva mère de Boris et de sa sœur Raïssa Vladimirovna ainsi que Michel Goloubev, frère de Maria Vassilievna)[1]. Né en Russie de parents russes, ayant des grands-parents maternels russes, réfugiés en Estonie, tous les membres de cette famille ont conservé leur nationalité russe. L'examen des archives conservées à Tartu ainsi que les actes postérieurs d'état civil le démontrent. Seule l'origine du père, Vladimir Iosevitch, reste imprécise sachant qu'il avait des ancêtres en Lettonie.

Au printemps 1926, Boris Vladimirovitch Vildé terminait ses études secondaires au lycée russe de Tartu pour être admis à l'Université de cette ville. Sa fréquentation de la bohème littéraire locale est notée mais aussi ses prédispositions à écrire des poèmes. Cette période est aussi marquée par sa tentative inexpliquée d'entrer clandestinement sur le territoire de l'Union soviétique située sur l'autre berge du lac Peïpous. Après l'avoir emprisonné quelque temps, les gardes-frontières du Guépéou l'ont renvoyé en Estonie.

Issu d'une famille de condition modeste, après sa sortie de l'Université, il vivra de travaux de fortune, un moment dans une scierie, puis compositeur typographe dans une imprimerie à Tartu. Certaines rumeurs ont circulé quant à sa participation à un mouvement séparatiste en Livonie et que pour cette raison, il aurait été emprisonné durant une courte période. Cela expliquerait sa sortie prématurée de l'Université, sans que cette hypothèse soit prouvée historiquement.

De 1930 à 1932, il passe successivement en Lettonie pour rejoindre l'Allemagne. Il y perfectionne sa connaissance de la langue allemande qu'il avait déjà étudié à l'Université, vit pauvrement à Berlin en effectuant des traductions, occupant divers emplois précaires tel lecteur à l'Université de Iéna. Il participe au mouvement contre la montée du nazisme, ce qui lui vaut un court emprisonnement. À Berlin, il rencontrera André Gide venu donner une conférence. Celui-ci lui conseillera de quitter l’Allemagne et se propose même de lui trouver un logement à Paris.

Boris Vildé arrive à Paris au milieu de l'été 1932[2]. Par l'intermédiaire d'André Gide, il rencontre Paul Rivet, directeur du musée de l’Homme qui lui conseille de poursuivre des études. Plus tard, il obtiendra une licence de langue japonaise délivré par l'École nationale des langues orientales vivantes (actuel INALCO)[3]. Marié en 1934 avec Irène Lot, fille du médiéviste Ferdinand Lot, il obtiendra la nationalité française le 5 septembre 1936. Sa connaissance de la langue allemande sera formalisée par un diplôme délivré par la Sorbonne en 1937. Par la suite, il sera « attaché » au musée de l'Homme et chargé du département des civilisations arctiques.

En 1937 et 1938, il effectue deux missions en Estonie dans la région du Setomaa, et une mission en Finlande en 1939[4].

D'octobre 1937 à juin 1938, il accomplit son service militaire dans un régiment d'artillerie à Châlons-sur-Marne (avec le grade de brigadier) et effectue une période d'entraînement en septembre 1939, à Chartres, avant d'être intégré dans un détachement de défense aérienne[5].

Titularisé au musée de l'Homme, il y dirige la section des peuples polaires. Il obtient également le diplôme de langue japonaise de l'École des langues orientales. Après la défaite, fait prisonnier par les Allemands dans les Ardennes en juin 1940, il s’évade et regagne Paris début juillet.

L'occupation

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En juillet 1940, Boris Vildé commence ses activités anti-allemandes en compagnie d’intellectuels parisiens et de collègues du musée de l’Homme. Ce groupe de Résistants se dénomme « Comité national de salut public ». Au tout début, il est composé de Boris Vildé, Anatole Lewitsky, Yvonne Oddon, et s’élargit rapidement à Jean Cassou, Pierre Walter, Léon-Maurice Nordmann, Claude Aveline, Emilie Tillion, Germaine Tillion, Pierre Brossolette, Simone Martin-Chauffier, Jacqueline Bordelet, René Sénéchal, Marcel Abraham, Agnès Humbert, et d'autres. Ce groupe de Résistants est aujourd'hui cité par les historiens sous le nom de Réseau du musée de l'Homme.

Les premiers tracts sont édités en août 1940 par le groupe de Résistants du musée de l’Homme. En septembre 1940, le premier tract : « Vichy fait la guerre » est édité à plusieurs centaines d'exemplaires. En septembre 1940, Boris Vildé est scandalisé par le contenu du journal clandestin L'Humanité qui présente l'Allemagne, la Russie et l'Italie comme les « nouvelles jeunes nations »[6].

Le premier numéro du journal Résistance, dont la première page a été rédigée par Boris Vildé, est publié sous la direction de Jean Cassou le . Le deuxième numéro sort le . Deux ou trois autres numéros seront encore publiés après l'arrestation de Boris Vildé[7].

Boris Vildé rencontre un certain Ameline (Albert Gaveau, agent du capitaine SS Doering) dont il fait son homme de confiance[8].

Début 1941, Boris Vildé se rend en Zone sud pour « recruter » et prend des contacts à Toulouse, Marseille, Lyon, sur la Côte d'Azur. Il y rencontre diverses personnalités, dont André Malraux qu'il tente vainement de convaincre de s’engager dans la Résistance.

Le à 15 heures, place Pigalle, peu de temps après son retour à Paris, Boris Vildé est arrêté par le capitaine SS Doehring et ses hommes de la Gestapo[9]. Cependant, les premières arrestations de membres du réseau ont été effectuées par la police française après dénonciation par deux employés du Musée de l'Homme. Devant le juge d'instruction près la cour de justice du département de la Seine, Germaine Tillion déposait :

« D'autre part, deux employés du Musée de l'Homme, tous deux d'origine russe, nommés Fedorovsky et sa maîtresse la femme Erouchkovsky, connaissant d'une manière très vague l'activité de résistance de Vildé et de Léwitsky et d'Yvonne Oddon, avaient spontanément été les dénoncer à la police. C'est à la suite de la dénonciation [...] que fut faite la première série d'arrestations du Musée de l'Homme en février 1941. J'ai dit « arrestations » et non inculpations car la plupart des gens arrêtés ce jour-là furent relâchés et ceux qui furent maintenus en état d'arrestation, Lewitsky et Yvonne Oddon, le furent grâce à la suite de l'enquête dont tous les éléments étaient fournis par Albert Gaveau. »

Emprisonné durant 11 mois, d’abord à la Santé puis à Fresnes à partir du , Boris Vildé y écrit son Journal et ses Lettres de prison[10].

Le mail Boris-Vildé à Aubervilliers.

Le procès de Boris Vildé et des membres du Réseau du musée de l’Homme débute en janvier 1942 devant un Tribunal allemand présidé par le capitaine Ernst Roskothen. Le procureur Gottlob qui réclame la peine de mort est un Alsacien français[11].

Boris Vildé est fusillé au fort du Mont-Valérien, à côté de Paris, ainsi que six autres de ses compagnons résistants compris dans le même procès le . Boris Vildé repose au cimetière parisien d'Ivry (Val-de-Marne) à côté de ses compagnons, dont Anatole Lewitsky[12] et à proximité des tombes des fusillés du Groupe Manouchian.

La première commémoration officielle de l'assassinat de Boris Vildé et d'Anatole Lewitsky a lieu à Ivry-sur-Seine, en février 1945. Le général de Gaulle s'y est fait représenter. Le , à l'occasion du centenaire de sa naissance, une cérémonie commémorative, à l'initiative du musée de l'Homme, s'est tenue sur la tombe de Boris Vildé.

Dans la commune de Fontenay-aux-Roses, une rue porte le nom de Boris Vildé ainsi qu'un square attenant à cette rue. Le , la ville d'Aubervilliers rendait hommage à Boris Vildé en dédiant un mail à son nom[13].

Dans la mini-série Résistance diffusée en 2014, le rôle de Boris Vildé est joué par Robert Plagnol.

Publications

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  • La civilisation finnoise, Horizons de France, 1940
  • Journal et lettres de prison : 1941-1942, présentation de François Bédarida et Dominique Veillon, notes de François Bédarida, Cahiers de l'Institut du Temps Présent, no 7, février 1988, 146 p., portrait de Boris Vildé ; réédition éd. Allia, 1997

Bibliographie

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  • Claude Aveline, « Dialogue de prison », Europe 5, du .
  • Claude Aveline, « L'Affaire du Musée de l'Homme », Les Lettres Françaises, 24 février 1945
  • Claude Bellanger, La presse clandestine, Éditions Armand Colin, 1961
  • Henri Noguères, Histoire de la Résistance (juin 1940 - juin 1941), Éditions Laffont, 1967
  • Yves Lelong, « L'heure très sévère de Boris Vildé », La Liberté de l'esprit no 16, 1987
  • Dominique Veillon, De Saint-Pétersbourg au Mont Valérien, Éditions Allia, 1997
  • Tatiana Foughal, La civilisation traditionnelle de la Russie de Nord, Cahiers slaves no 2
  • Martin Blumenson (1918-2005), Le Réseau du Musée de l'Homme, les débuts de la Résistance en France, Éditions du Seuil, 1979, traduit de l'anglais, The Vildé affair, beginning of the French Resistance
  • François Bédarida, La lumière qui éclaire la mort, Éditions Allia, 1997
  • Roger-Pol Droit, « Apprivoiser la mort tout seul », Le Monde, 4 avril 1997
  • Marianne Mahn-Lot, « Le Réseau du Musée de l'Homme - Boris Vildé », Historiens et géographes, mars 2000
  • Anne Hogenhuis, Parcours d'Anatolij Levickij et Boris Vildié, réfugiés russes et résistants du Musée de l'Homme, (Premières rencontres de l'Institut européen Est-Ouest)
  • Agnès Humbert, Notre guerre : souvenirs de résistance, introduction de Julien Blanc, Tallandier, 2004
  • Fonds Boris Vildé, archives historiques de la ville de Tartu en Estonie : 2100-1-18317.
  • Fonds Boris Vildé, archives du musée de l’Homme : 2AP1C, 2AM1K, 2AP1C, 2AMI MIC.
  • BNF : numéros 1, 2, 3 et 4 du journal clandestin Résistance, Salle Y (RES-G-1470-334).
  • Musée Boris Vildé à Yastrebino en Russie.
  • Raïssa Raït-Kovaleva, Tchelovek iz Mouzeia Tcheloveka (« L’Homme du Musée de l’Homme »), Moscou, 1982
  • Entretiens et remise de documents par Marianne Mahn-Lot à Paris en 2003 et 2004.
  • Dossier de carrière administrative aux Archives nationales dans le fonds du CNRS : 20070296/546.
  • Archives relatives au réseau du musée de l’Homme aux Archives nationales[14].
  • BDIC de Nanterre : micro-films du journal clandestin Résistance.

Liens externes

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Notes et références

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  1. Lors de sa visite à Paris le 30 août 2001, le président de la république d’Estonie a déclaré à propos de Boris Vildé : « Nous sommes également fiers de l'Estonien Boris Vildé qui a offert à la France le mot Résistance et qui a sacrifié à la France sa propre vie. »
  2. Il réside alors 6, square Port-Royal, Paris 13e.
  3. Boris Vildé ne maîtrise pas la langue française lors de son arrivée en France. Voir la lettre à sa mère le 8 juillet 1932 dans laquelle il indique qu’il a appris « un peu le français ». Pour cette raison, par une petite annonce, il contacte Irène Lot, bibliothécaire à la Bibliothèque nationale qui, de son côté, recherchait un correspondant russe. Irène Lot, était la fille de l’historien Ferdinand Lot et de Mirrha Borodina (également d'origine russe).
  4. En août 1937, il écrit à Paris depuis Tartu afin d'organiser des échanges d’objets avec le musée de l’Homme. Les documents, correspondances manuscrites et travaux de recherches de Boris Vildé se trouvent dans les archives du musée de l’Homme à Paris sous les références : 2AP1C, 2AM1K, 2AP1C, 2AMI MIC. Voir également les travaux très documentés de Tatiana Benfoughal - Cahiers slaves no 2, UFR d’Études slaves de l'Université de la Sorbonne, Paris.
  5. Selon les pièces de son procès.
  6. À la même époque, ce journal du PCF appelle les Français à refuser leur soutien au général de Gaulle prétextant qu'il est « à la solde des Anglais ».
  7. Les quatre premiers numéros originaux du journal clandestin Résistance se trouvent à la BNF à Paris - Réserve des livres rares. RES-G-1470 (334). Un original portant le no 2, daté du 30 décembre 1940 se trouve en Russie dans le musée Boris Vildé à Yastrebino. Le premier numéro a été édité à 500 ou 600 exemplaires. Ce premier numéro a été essentiellement distribué par voie postale dont les frais ont été pris en charge par Boris Vildé. Le numéro daté du , qui semble être le dernier – numéro 4 ou numéro 5 – a été publié sous la direction de Pierre Brossolette.
  8. Patrice Miannay, Dictionnaire des agents doubles dans la Résistance, Le Cherche-Midi, 2005.
  9. Les membres du Réseau du musée de l'Homme ont été trahis par Albert Gaveau, un Français infiltré par la Gestapo dans le réseau. Ancien moniteur de vol à voile, ouvrier mécanicien dans les usines Blériot, il avait su gagner la confiance de Boris Vildé. Gaveau, né à Angers le d’une mère de nationalité allemande, se réfugia en Allemagne au moment de la Libération. Revenu peu après en France, il a été arrêté en novembre 1945 dans un chantier de construction de Tournay (Orne) où il s'était fait engager comme comptable. Il a été condamné le , pour intelligence avec l'ennemi, aux travaux forcés à perpétuité par la cour de justice de la Seine et écroué à la maison centrale de Clairvaux le . Par un décret du , cette peine a été commuée en 20 ans de travaux forcés. Gaveau avait comme avocat Jean-Louis Tixier-Vignancour.
  10. Le manuscrit Journal et lettres de prison a été récemment retrouvé et déposé depuis janvier 2007 à la Bibliothèque nationale (manuscrits français 28118). Il a été publié par les Éditions Allia, Paris. Une édition en langue russe a été publiée à Moscou en 2006 par Chemin Russe. Voir également : Le Réseau du Musée de l'Homme par Martin Blumenson, Éditions du Seuil, Paris, 1979.
  11. Les pièces du procès ont été retrouvées tout à fait par hasard en 1949 par un officier français des troupes d’occupation à l’occasion d’un classement d’archives allemandes. Le texte du jugement des 17 inculpés prononcé par le tribunal militaire allemand (en langue allemande et traduction en français) se trouve dans le dossier de la procédure intentée après la Libération par la cour de justice de la Seine contre Albert Gaveau (Archives nationales : Z6 / 810 dossier 5677).
  12. Division 39, ligne 4.
  13. « 66e anniversaire de la Libération de Paris et d’Aubervilliers », Ville d'Aubervilliers, (consulté le )
  14. Voir la notice dans la salle des inventaires virtuelle.