Fauteuil 28 de l'Académie française | |
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Naissance | |
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Sépulture |
Cimetière de Sainte-Foy-lès-Lyon (d) |
Nom de naissance |
Frédéric Charles Pierre Édouard Bargone |
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Père |
Pierre Bargone (d) |
Conjoint |
Henriette Roggers (d) |
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Genre artistique | |
Distinction |
Claude Farrère, nom de plume de Frédéric Charles Pierre Édouard Bargone, né le à Lyon (Rhône), mort le à Paris (Seine), est un officier de marine et un écrivain français.
Claude Farrère effectue ses études secondaires au lycée Thiers, puis au lycée de Toulon[1]. Suivant les traces de son père, Pierre Bargone (1826-1892), lieutenant-colonel d’infanterie de marine[2], il se lance dans une carrière militaire et entre en 1894 à l’École navale. En 1899, il sert en Extrême-Orient sur le cuirassé Vauban, puis sur le croiseur Descartes et prend part à l'occupation du Kouang-Tchéou-Wan au sud de la Chine[2]. Il est promu enseigne de vaisseau en 1899. Il sert en 1901 sur le cuirassé Massena dans l'escadre du Nord, puis l'année suivante sur la vieille frégate-cuirassé Couronne, en école de canonnage dont il sort breveté. En 1903, il sert sur le contre-torpilleur Vautour à Constantinople, navire commandé par le commandant Viaud (alias Pierre Loti)[2].
Lieutenant de vaisseau en 1906, il sert sur le cuirassé Brennus (1907) puis sur l'aviso Cassini (1908) où il prend part à des opérations sur les côtes marocaines[2]. En 1910, il est affecté au service Renseignement et travaux historiques (le futur Service historique de la Marine) de l'état-major de la Marine[2]. Il est mis en disponibilité par le ministre de la Guerre, l'amiral Boué de Lapeyrère à la suite d'un article qu'il a écrit sur la crise de la marine nationale française[2].
Il est réintégré en septembre 1911 avec un embarquement sur le croiseur-cuirassé Ernest Renan[2]. Il quitte la marine début août 1914 pour intégrer comme inspecteur d'armement la Compagnie générale maritime mais il est rappelé en août 1914 au début de la guerre et sert sur le croiseur-cuirassé Amiral Aube[2]. Il se fait détacher dans l'armée de terre en 1917 et commande une batterie d'assaut[2], et obtient la Croix de guerre le 23 octobre 1917 à la bataille de la Malmaison. Il est nommé capitaine de corvette en août 1918.
Il démissionne de la Marine en octobre 1919 pour se consacrer entièrement à l’écriture.
Son talent lui vaut un prix Goncourt en 1905 avec Les Civilisés. S’inspirant de son expérience et de ses voyages, il écrit principalement des romans à succès, mais aussi des récits de voyages, des ouvrages de marine et des essais sur l'actualité internationale. Il est l'ami de Pierre Louÿs, de Pierre Benoit (en compagnie duquel il eut un accident d'automobile sans gravité en date du 7 octobre 1929[4]) et de Victor Segalen et porta une grande estime à Pierre Loti :
« J'eus l'honneur de sa suprême confidence. C'est moi qu'il fit à son lit de mort, et déjà mort plus qu'à moitié, jurer de continuer après lui de combattre pour la Turquie, cette Turquie musulmane injustement condamnée par une Chrétienté qui n'a plus de chrétien que le nom. »
— Cent dessins de Pierre Loti commentés par Claude Farrère[5]
Il précise aussi qu'il a servi quatorze ou quinze mois sous ses ordres,
« dans l'intimité d'un petit navire, quand il avait cinquante-trois ans et moi vingt-sept ; ma vie à moi semble avoir été calquée sur la sienne. J'ai été, comme Loti, un jeune officier pauvre et j'ai dû, comme lui, aider ma mère à vivre, parce que sa pension de veuve (1 667 francs par an !) lui avait à peine suffi pour qu'elle pût me pousser vers cette École navale, qui avait été mon rêve constant, avant même que j'eusse seulement vu l'eau salée. Et, par la suite, tout ce qui advint à Loti m'est advenu[6]. »
L'œuvre de Claude Farrère fut parfois rapprochée de celle de ce dernier. Ainsi, il s'intéresse particulièrement à la Turquie qu'il a visitée onze fois à partir de 1902, et surtout au Japon auquel il voue une amitié qui ne s'est jamais démentie, illustrée par un de ses premiers livres, La Bataille qui se déroule au Japon, à Nagasaki, en 1905, à l'approche de la bataille de Tsushima entre les flottes japonaise et russe. Farrère est invité par le gouvernement japonais en 1938 en tant qu'écrivain « indépendant ». Au cours de ce séjour, il se rend en Chine du Nord, en Corée et au Mandchoukouo, et est décoré de l'insigne de deuxième classe de l'ordre du Trésor sacré[réf. nécessaire]. Il a également écrit un recueil de nouvelles fantastiques, L'Autre côté, dont certaines ont été reprises dans Fiction. En 1906, il publie L'Homme qui assassina (avec des illustrations de Ch. Atamian) : vingt ans avant Agatha Christie, Claude Farrère fait de l'assassin le narrateur d'un roman policier.
Le 22 décembre 1919 il épouse dans le 16e arrondissement de Paris, Joséphine Victorine Roger[7] dite Henriette Roggers, artiste dramatique de trois ans son aînée[8] qui sera quelques années plus tard pensionnaire de la Comédie-Française[8]. Le couple n'a pas d'enfants et après le décès de sa femme, le 22 janvier 1950[8], Farrère reste veuf.
Il soutient l'Empire ottoman pendant les guerres balkaniques[9], puis le mouvement kémaliste pendant la guerre d'indépendance turque[10].
Ses idées sur ce sujet sont résumées dans l'avant-propos d'un roman qu'il publie en décembre 1921 :
« J'ai deux raisons qui justifient ma sympathie : une raison d'intérêt et une raison de sentiment. La raison d'intérêt, je l'ai vingt fois exposée, dans trop d'articles et dans trop d'études dont j'ai, de 1903 à 1921, encombré les revues, les journaux, les magazines même. Je reviens encore là-dessus […] dans tout le Proche-Orient, les intérêts français sont liés, et mieux que liés : mêlés, enchevêtrés, confondus avec les intérêts turcs. Chaque pas perdu par la Turquie fut toujours un pas perdu par la France. »
Quant à la raison de sentiment, « Les Turcs […] ont de la conscience. Ils en ont même infiniment plus que les chrétiens d'Orient, que les orthodoxes levantins. »
Il se justifie en faisant valoir son expérience : « J'ai vécu en Orient deux ans et demi, de 1902 à 1904. J'y suis retourné de 1911 à 1913. […] Et tous mes camarades, tous les officiers français qui ont comme moi vécu en Turquie, si peu que c'ait été, partent comme je suis parti et reviennent comme je suis revenu[11]. »
Cependant, il regrette, à partir de 1925, la politique laïciste de Mustafa Kemal Atatürk. Farrère revient sur cet engagement en rééditant, en 1930, sous forme de livre, Turquie ressuscitée, publié comme un très long article en décembre 1922, et qui est le récit de son voyage en Turquie peu avant l'offensive finale d'août-septembre 1922 contre les forces grecques.
Le 6 mai 1932, Claude Farrère assiste au salon annuel des écrivains anciens combattants à l’hôtel Salomon de Rothschid, à Paris. Alors qu’il s’entretient avec le Président de la république, Paul Doumer, venu inaugurer l’événement, ce dernier se fait tirer dessus à deux reprises et en meurt le lendemain à l’aube. Claude Farrère, lui-même touché au bras, parvient tout de même à déstabiliser le tireur, Paul Gorgulov, un émigré russe qui, manquant de se faire lyncher par l'assistance, sera finalement maîtrisé par les inspecteurs de la sûreté.
En 1933, il s’engage au sein du Comité français pour la protection des intellectuels juifs persécutés ; il demande aussi à la France de faire bon accueil aux Juifs qui fuient l’Allemagne, à la fois au nom de la générosité et au nom de l’intérêt bien compris du pays : ce serait « une bonne affaire » d’accueillir ces Juifs, comme l’Allemagne avait accueilli des protestants français après la révocation de l’édit de Nantes[12].
Pendant l'entre-deux-guerres, il collabore au Flambeau, journal des Croix-de-feu; il adhère à cette association en novembre 1932[13]. Par la suite, il publie dans Le Petit Journal[14], organe du Parti social français, qui a repris la succession politique des Croix-de-feu.
Il publie en 1934 une Histoire de la Marine française dans laquelle il explique que l'existence d'une marine a toujours été, en France, l'apanage d'une élite éclairée, en général peu soutenue par l'opinion publique, et que les grandes défaites subies par la France (début de la guerre de Cent Ans, Louis XIV, Napoléon) étaient généralement dues à l'absence d'une marine.
Claude Farrère est élu à l'Académie française le , le même jour qu'André Bellessort et Jacques Bainville. Il bat de cinq voix son concurrent, Paul Claudel, pour succéder à Louis Barthou au 28e fauteuil.
Après-guerre, il fait partie du comité d'honneur de l'Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain[15],[16].
Il est président de l’Association des écrivains combattants, de janvier 1930[17] à juin 1936. C’est en tant que président de cette association qu’il accueille, le 6 mai 1932, le président Paul Doumer à une réunion littéraire qui comprenait la vente de livres d’anciens combattants à la fondation Salomon de Rothschild, rue Berryer. Lorsque Doumer arrive à la table où sont exposés les ouvrages de Farrère, l’écrivain lui offre un exemplaire de La Bataille et lui signe une dédicace. C’est alors que Paul Gorgulov se détache de la foule et tire quatre coups à bout portant, puis un cinquième, sur Doumer, qui s’écroule. L'écrivain, qui a tenté de protéger le président, est blessé au bras[18].
En 1948, avec l'aide d'un comité, il s'occupait de décerner le « Grand prix de la mer » à des écrivains débutants.
Il meurt à l'hôpital du Val-de-Grâce ; il repose au cimetière de Sainte-Foy-lès-Lyon avec son épouse[19]. Son testament indiqua qu'il désignait comme légataire universel l'Association des écrivains combattants.
Son nom a été donné à une distinction littéraire délivrée par l’Association des écrivains combattants, le prix Claude-Farrère, créé en 1959 pour « un roman d'imagination et n'ayant obtenu antérieurement aucun grand prix littéraire ».
Plusieurs voies publiques ou établissements portent son nom dont :