Les confréries sont, à l'origine et dans le monde occidental, des groupements de laïcschrétiens fondés en vue de favoriser une entraide fraternelle ou pour animer et développer une tradition religieuse spécifique. Cette forme d'association à base religieuse et à but profane remonte à l'Antiquité, et prend un grand développement dans les nations chrétiennes au Moyen Âge. Elles existent aussi, ailleurs, dans le monde et en particulier en Afrique sub-saharienne.
Les confréries religieuses et charitables, associées à la vie des paroisses et dépendantes du clergé, avaient interdiction de faire du commerce, de vendre des prestations ou de forcer à les payer, et leurs ressources provenaient exclusivement de dons volontaires, de legs, de quêtes. Pour cela, elles organisaient des spectacles qui étaient suivis de quêtes, et certaines obtenaient le droit d'organiser des loteries.
En France, il y avait un très grand nombre de confréries, certaines très anciennes, qui furent regroupées et réorganisées plusieurs fois par les rois, particulièrement sous Louis XIV lors de la création de l'Hôpital général. Elles furent toutes abolies au moment de la Révolution française, par un décret en date du , qui abolissait en outre les congrégations religieuses dont les biens furent confisqués et vendus biens nationaux.
En Espagne, il subsiste de nombreuses confréries (cofradias ou hermandad) perpétuant une tradition religieuse, tout comme en Italie (confraternite) ou en Belgique (La Confrérie du Saint-Sang, par exemple).
La confrérie est parfois présidée par un maître et lorsqu'elle est importante par un grand maître.
Les confréries des métiers sont des institutions de tradition romaine. Déjà le roi Numa rangea, en effet, tous les artisans de Rome en autant de confréries qu'il y avait de professions dans la ville; elles avaient chacune un dieu de l’antiquité pour patron. Les lois de Justinien en font mention : elles défendent aux confréries des métiers d’avoir d’autre objet que l’exercice des principes religieux et le soulagement des pauvres. Les confréries françaises des métiers étaient des œuvres toutes de charité et d'assistance, dont faisaient partie tous les gens du métier. Chacune de ces associations était une sorte de société religieuse de secours mutuels, alimentée surtout par les amendes, les parts de droits d’entrée, d’apprentissage, les dons volontaires. Elle secourait les orphelins, les vieillards pauvres, les veuves et au besoin, faisait les frais des mariages et des funérailles[1].
Les confréries de métier ont été par la suite des groupements constitués à la fin du Moyen Âge (XIVe et XVe siècles en général) dans le cadre des diverses manifestations de la solidarité entre égaux qui tendait à remplacer les liens de protection caractéristiques de l'époque féodale[2].
leur caractère religieux : les confréries avaient pour patron un saint, avec un but spirituel, tandis que les communautés de métier étaient purement profanes, organisées par l'autorité laïque, avec un but économique et politique ;
un recrutement non exclusif (même une confrérie dite « de métier » ne se limite pas aux membres de son métier). Voir les confréries d'artisans, par exemple, appelées dans le passé guildes, ou corporations ;
une primauté du lien sur le cadre. Là où la communauté de métier forme une universitas structurant un corps social, la confrérie relie avant tout des individus entre eux ;
un rôle essentiel du processus d'intercession. La confrérie médiévale n'a pas pour vocation de promouvoir le culte chrétien (ce rôle lui sera dévolu à la période moderne). Par contre, les confrères accomplissent une pratique religieuse plus ou moins régulière ayant pour « but » d'obtenir l'intercession du saint patron de la confrérie. L'avantage de la prière confraternelle sur la pratique solitaire est que la somme des prières de tous les confrères bénéficie individuellement à chaque confrère. On peut en citer quelques-unes : Confrérie de la Passion, Confrérie des Charitables de Saint-Éloi et plus récemment Confrérie de charité.
À l’époque romaine, les confréries étaient organisées par métiers où le roi Numa (possiblement Numa Pompilius) classait les artisans par la loi Justinien[3] (possiblement Code de Justinien).
Les confréries catholiques se développent après le Concile de Trente, et principalement au XVIIe siècle, soutenues par les dévôts et les Dominicains dans le but d'instituer un ordre moral rigoureux.
Elles s'incrustent dans l'Église comme de véritables "États dans l'État", disposent d'une chapelle qui leur est réservée (souvent avec un retable remarquable, par exemple) et sont propriétaires de leurs objets liturgiques, ont leurs propres statuts juridiques (distincts de ceux des fabriques dont elles sont indépendantes)[4]. Les principales sont les conféries du Rosaire et les Compagnies du Saint-Sacrement ; d'autres existent, par exemple la "Confrérie des cinq plaies de Jésus-Christ"[5] et de nombreuses autres : confréries de Notre-Dame de Délivrance, Notre-Dame du Bon-Pasteur, Notre-Dame de la Consolation, de Notre-Dame des Sept-Douleurs, de l'Immaculée Conception, du Scapulaire, de la Pureté de la Vierge, du Corps du Christ, du Sacré-Cœur, de la Sainte-Croix, de Saint-Joseph, de Saint-Roch, de Sainte-Marie-Madeleine, etc.[6].
La Grande confrérie royale de la charité de Notre-Dame-de-Bonne-Délivrance à Paris (estampe de Jean Papillon, 1666).
Dans les années 1950 commence grâce au tourisme une volonté de remettre les terroirs français en valeur, qui se traduit par un regain d’intérêt pour le tradition française culinaire et agricole au travers des confréries[3].
La « Société du dernier devoir » (Hevra kaddisha), instituée en France à l'époque contemporaine, est une société librement structurée mais assez organisée et fermée, faisant office de pompes funèbres, composée de membres juifs qui s'occupent de préparer les corps des défunts juifs conformément aux rites de la loi juive (Halakha) et veillent à ce qu'ils ne soient pas désécrés (volontairement ou non) jusqu'à l'enterrement.
En France, ces sortes de confréries religieuses liées à un métier existaient toujours parallèlement aux communautés de métiers, comme celle des peintres et tailleurs d'images à Paris au Moyen Âge. Dans les domaines qu'on appelle aujourd'hui culturels et artistiques, elles prirent à l'époque moderne, en Italie puis en France, le nom d'académie et tendirent à se séculariser. En France l'académie de Saint-Luc fut transformée en Académie royale de peinture et de sculpture.
Les confréries vénitiennes sont des scuole (singulier scuola ; vénitien schola, pl. schole). Ces institutions de la république de Venise étaient consacrées aux corporations d'arts, de métiers et à la dévotion des patrons de ceux-ci.
La scuola Grande de San Rocco était l'une des plus riches Scuole de Venise, une institution prestigieuse reconnue par le Conseil des Dix, dont le rôle était de lutter contre les épidémies de peste et destinée à aider la population.
Les autres scuole se répartissaient en :
les schole grandi : les associations de charité les plus importantes dans la cité; dotées de grande capacité financière et socialement très importantes vu le grand nombre d'affiliés ;
les schole picole : dites petites pour les différencier des grandes, elles réunissaient obligatoirement tous les artisans du même art ou métier; leur nombre fut important. Les arts furent en outre subdivisés par sestiere et ensuite par quartier, donnant ainsi des sièges ou église de réunion différents ;
les schole nationali : les nationales furent les associations réservées aux nombreuses communautés étrangères qui vivaient à Venise, où elles tenaient souvent aussi une base commerciale propre, le fontego ;
les schole de devozion: les écoles de dévotion furent des associations de citoyens qui se réunissaient à des fins de charité ou pour des raisons d'assistance mutuelle entre les affiliés ; elles se distinguaient à leur tour en fraternelles, compagnies, sovvegni, ces schole sont également subdivisées par sestiere et par quartier, déterminant leur siège ou église de réunion.
En France, le bataillon des canonniers sédentaires de Lille est l'unique descendant des confréries militaires. Créée le , la « confrérie des Canonniers et couleuvriniers » de Lille est alors appelée confrérie de Sainte Barbe. Son nom actuel lui est donné par Napoléon Bonaparte en 1803, en récompense de sa résistance face aux Autrichiens lors du siège de Lille de 1792.
Dans l'Espagne médiévale, une Hermandad, signifiant « fraternité », désigne une confrérie d'hommes armés formée contre le meurtre et le pillage, et qui fut plus tard organisée administrativement.
Dans les Pays-Bas des époques médiévale et moderne, une schutterij est une milice citoyenne destinée à protéger la ville ou la cité d'une attaque, d'une révolte ou d'un incendie, comme la confrérie des arbalétriers de saint Sébastien, appartenant à la Garde civique d’Amsterdam, peinte par Bartholomeus van der Helst (1653).
Le terme de « confrérie », au sens religieux, existe toujours. Dans le passé, les confréries étaient fréquemment des associations d’entraide, soit affiliées à une église, soit formées de membres d'une même profession. Dans ce cas, ce sont plutôt des corporations. Au XVIIIe siècle encore, on dénombrait pratiquement une confrérie par paroisse, notamment à la campagne[9]. Parmi les confréries qui existent toujours, il y a par exemple :
l'Archiconfrérie de la Sainte-Croix de Nice[10] Sociétas Gonfalonis ou Société du Gonfalon, plus connue sous le nom de confrérie des pénitents blancs, est une confrérie de pénitents fondée au début du XIVe siècle. Depuis 1817 elle est reconnue d'utilité publique. Elle s'occupe de gestion d’hôpitaux et de soins aux malades,
l'Archiconfrérie des pénitents bleus de Nice ou la Société du Saint-Sépulcre ou vénérable archiconfrérie des pénitents bleus de Nice est une confrérie de pénitents d’inspiration franciscaine, fondée au XVe siècle et toujours active aujourd’hui. Elle s'est longtemps impliquée dans le soin des lépreux, la gestion d’hôpitaux, d’un mont-de-piété et d’un orphelinat pour filles, mais la première mission charitable établie par ses fondateurs est l'engagement pour la Terre sainte ;
Confrérie Cornélius : une Confrérie Cornélius(de) a pour objectif d'honorer la mémoire du pape Corneille († vers 253), le vingt et unième pape. On connaît en tout 23 confréries Cornélius, dont dix-neuf aux Pays-Bas, sept en Allemagne et six en Belgique. La plupart se trouvent dans des communes qui possèdent une église dont le patron est saint Corneille ;
Archiconfrérie Saint-Michel(de). L'archiconfrérie, de son nom complet Bruderschaft des hl. Erzengels und Himmelsfürsten Michael, est une association catholique d'ecclésiastiques et laïcs dont l'objectif est la vénération de l'archange Michel. Fondée en 1693, elle a eu, à son apogée au XVIIIe siècle, jusqu'à 100 000 membres ; la noblesse était surreprésentée. Elle en compte actuellement environ 800 ;
Confrérie du Rosaire : les confréries du Rosaire sont des associations catholiques réunissant des personnes pour prier le Rosaire ;
Compagnie du Saint-Sacrement : c'était une société catholique fondée en 1630 par Henri de Levis, duc de Ventadour, et dissoute par Louis XIV en 1666 ;
Confrérie du Saint-Sang. La Confrérie noble du Saint-Sang à Bruges, fondée peu après 1400, est une des plus anciennes confréries religieuses belges. Elle emmène lors de la Procession du Saint-Sang chaque année au mois de mai la relique du Saint Sang rapportée de Terre Sainte ;
Orthodoxe Fraternität in Deutschland(de). C'est le nom d'une confrérie pan-orthodoxe portée principalement par des laïcs qui réunit des chrétiens orthodoxes et des amis de l'orthodoxie chrétienne ;
la grande confrérie de saint Martial, fondée en 1356 et toujours existante de nos jours, est une compagnie de laïcs de Limoges qui a reçu pour vocation d'honorer et de participer au culte de saint Martial. Elle est considérée comme la mère de toutes les confréries limousines étant aujourd'hui la plus ancienne dans ce diocèse et gardienne des reliques du premier évêque dont elle a la charge des ostensions.
À Séville, durant les huit jours de la Semaine sainte, soixante confréries (Hermandades et Cofradías) sortent en procession pour se rendre à la Cathédrale, conclure leur station de pénitence, avant de revenir vers leur point de départ.
À Viveiro, ville de Galice en Espagne, durant la Semana Santa de Viveiro, nom officiel de la célébration religieuse de la semaine sainte, huit confréries (Hermandades et Cofradías) sortent en procession dans les rues de la ville.
À Palencia, il existe huit confréries (la plus ancienne fut fondée en 1407 et s'appelle la Cofradía del Santo Sepulcro, San Juan Bautista y Archicofradía de las Cinco Llagas de San Francisco) qui dirigent les processions. Elles possèdent environ quarante chars (les pasos) qui défilent, durant la Semaine sainte, depuis le Samedi de la Passion jusqu'au Dimanche de Pâques.
À Braga, au Portugal, la Semana santa est la procession religieuse la plus importante de la ville, et l'une des plus célèbres du Portugal. Durant les huit jours dédiés à la Passion du Christ, les confréries (confrarias) sortent en procession pour se rendre à la cathédrale, et revenir vers leur point de départ. Chacune de ces congrégations conduit lors de son long cheminement ses pasos, autels portés à dos d'hommes.
Confrérie Kaland(de) désigne une confrérie de bourgeois aisés ayant pour objectif des bonne œuvres. Ces confréries étaient largement répandues dans de nombreuses villes au Moyen Âge. Le mot Kaland vient du mot latin kalendae. Il désigne le premier jour du mois, et fait référence à l'usage des membres d'une confrérie Kaland de se retrouver régulièrement ce jour-là.
La Confrérie de l'Arche (ou Confrérie de l'Arche du Saint-Esprit, ou encore Confrérie du Saint-Esprit) est une œuvre caritative fondée au XIIe siècle. Composée uniquement de laïcs, la confrérie de l'arche du Saint-Esprit fut créée par Guy de Montpellier dans le but de réunir toutes les personnes souhaitant aider les pauvres, les malades et les orphelins. Il fonda aussi à la même période l'Ordre des Hospitaliers du Saint-Esprit.
Les loges maçonniques sont parfois identifiées comme ce type de confrérie[11]. Céline Bryon-Portet qui dirige des travaux de recherche au laboratoire d'études et de recherches appliquées en sciences sociales à l'Université de Toulouse, la qualifie de « confrérie associationniste »[12]. Le rapport qu'elles entretiennent avec d'autres confréries fait l'objet d'études d'historiens depuis plusieurs années[13].
La notion de confrérie a également été reprise dans des œuvres de fiction telles que romans, bandes dessinées, jeux de rôle et dans l'humour populaire, par exemple :
↑Claude-Youenn Roussel, « La confrérie du Saint-Sacrement à Commana, dans le Haut-Léon, en 1671 », Revue "Le Lien du Centre Généalogique du Finistère, no 168, , pages 21 à 31.
↑Voir par exemple Jean-Pierre Surrault (préf. Claude Petitfrère), Au temps des « sociétés » : Confréries, bachelleries, fêtes, loges maçonniques en Bas-Berry au XVIIIe siècle, Paris, Éditions Guénégaud, , 364 p. (ISBN2-85023-101-0).
↑Une archiconfrérie est une confrérie qui groupe plusieurs confréries similaires. Par ses privilèges et droits, elle est supérieure aux simples confréries affiliées à elles.
↑Céline Bryon-Portet, La Franc-maçonnerie, entre cité céleste et cité terrestre : divisions et équilibrages internes au sujet du théisme, de la religion et des questions sociétales, (DOIhttps://doi.org/10.4000/amnis.1676), p. 9.