Conseil tenu par les rats | ||||||||
Gravure de Martin Marvie d'après Jean-Baptiste Oudry, édition Desaint & Saillant, 1755-1759 | ||||||||
Auteur | Jean de La Fontaine | |||||||
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Pays | France | |||||||
Genre | Fable | |||||||
Éditeur | Claude Barbin | |||||||
Lieu de parution | Paris | |||||||
Date de parution | 1668 | |||||||
Chronologie | ||||||||
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Conseil tenu par les rats est la deuxième fable du livre II de Jean de La Fontaine situé dans le premier recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1668.
Inspirée d'une fable médiévale anglaise sur les souris qui discutent de la façon de rendre un chat inoffensif : on suggère d'accrocher une cloche autour de son cou, et toutes les souris approuvent l'idée mais aucune n'est disposée à le faire[1]. Reprise par Eustache Deschamps (Le Chat et les Souris)[2], puis par Jean de La Fontaine.
CONSEIL TENU PAR LES RATS
[Abstemius]
Un Chat, nommé Rodilardus (1),
Faisait de Rats telle déconfiture (2)
Que l'on n'en voyait presque plus,
Tant il en avait mis dedans la sépulture.
Le peu qu'il en restait, n'osant quitter son trou,
Ne trouvait à manger que le quart de son soû (3) ;
Et Rodilard passait, chez la gent (4) misérable,
Non pour un chat, mais pour un diable.
Or, un jour qu'au haut et au loin
Le galand (5) alla chercher femme,
Pendant tout le sabbat (6) qu'il fit avec sa dame,
Le demeurant des Rats tint chapitre (7) en un coin
Sur la nécessité (8) présente.
Dès l'abord, leur Doyen (9), personne fort prudente,
Opina qu'il fallait, et plus tôt que plus tard,
Attacher un grelot au cou de Rodilard ;
Qu'ainsi, quand il irait en guerre,
De sa marche avertis ils s'enfuiraient sous terre ;
Qu'il n'y savait que ce moyen.
Chacun fut de l'avis de Monsieur le Doyen :
Chose (10) ne leur parut à tous plus salutaire.
La difficulté fut d'attacher le grelot.
L'un dit : " Je n'y vas (11) point, je ne suis pas si sot ";
L'autre : " Je ne saurais." Si bien que sans rien faire
On se quitta. J'ai maints chapitres vus,
Qui pour néant se sont ainsi tenus ;
Chapitres, non de Rats, mais chapitres de moines,
Voire chapitres de chanoines.
Ne faut-il que délibérer,
La cour en conseillers foisonne ;
Est-il besoin d'exécuter,
L'on ne rencontre plus personne.
Vocabulaire
(1) Nom à consonance latine qui se trouve chez Rabelais, qui donne une série de noms de cuisiniers se terminant par -lard (Quart Livre, chapitre LXVII) et signifie Rongelard
(2) au XVIIème, le mot signifiait "déroute générale d'une armée". Mot du registre comique
(3) Manger à demi son soûl, c'est ne manger que la moitié de ce qu'il faut pour se rassasié (dictionnaire de Furetière) . Graphie conservée, nécessaire pour la rime (soûl)
(4) Nation
(5) Mot à double sens : gaillard un peu fripon ou homme adroit, dangereux (écrit presque toujours "Galand" chez La Fontaine) ou homme honnête, amoureux (écrit presque toujours "Galant" chez La Fontaine).
(6) grand bruit, crierie telle qu'on s'imagine qu'on fait au sabbat (dictionnaire de Furetière)
(7) Assemblée que tiennent les chanoines (dans les cathédrales), les religieux (les moines dans les monastères) et les ordres militaires pour délibérer de leurs affaires et réguler leur discipline (dictionnaire de Furetière)
(8) la disette, la famine, le besoin extrême (dictionnaire de Richelet)
(9) Celui qui est le plus ancien dans une maison, dans une société (dictionnaire de Furetière)
(10) rien ne...
(11) je n'y vais...(courant au XVIIe siècle)[3]
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