Pierre-Joseph Cambon, député du département de l'Hérault à l'Assemblée nationale. Estampe, eau-forte au pointillé de François Bonneville, fin du XVIIIe siècle.
D’origine prospère (son père est à la tête de la compagnie Cambon, composée de manufactures de toile à Montpellier et à Cholet ainsi que d’un comptoir à Bordeaux, elle comprenait plus de 4000 ouvriers)[3], ce négociant en toiles de Montpellier envoyé comme suppléant de son père aux États généraux de 1789 signera le serment du Jeu de paume, puis reviendra à Montpellier où il deviendra capitaine de la Garde nationale. Il est élu député de l’Hérault à l’Assemblée législative en 1791. Sa connaissance des problèmes financiers et sa fougue républicaine y retiennent l’attention. Il vote la mort de Louis XVI, et fait partie dès du Comité de salut public. Il préside plusieurs fois la Convention, fait voter par celle-ci le Décret sur l'administration révolutionnaire française des pays conquis.
Précédé par sa réputation de financier, il devient en 1793 président du Comité des finances. On lui doit la loi sur la confiscation des biens du clergé ; il rédige sur l'administration des finances un rapport remarquable qui contribue puissamment à rétablir l'ordre. Surtout, il s’illustre par la création du Grand-Livre de la Dette publique () : la Convention y reconnaît les dettes de l’Ancien Régime – mesure habile, qui veut rallier les rentiers à la Révolution. Après avoir déjà essayé de l'obtenir en 1792, mais arrêté par l'opposition de Robespierre, il obtient par le décret du 2ejour complémentairean II (18 septembre 1794) la suppression du budget des cultes, qui met fin à la Constitution civile du clergé et acte la première séparation de l'Église et de l'État.
Il joue un rôle de premier plan à la chute de Robespierre. Directement mis en cause dans le discours de Robespierre le 8thermidoran II à la Convention[Note 1], il est le premier à oser lui faire front[Note 2] et entraîne le revirement de l'assemblée. Bien que compromis dans l'affaire de la Compagnie des Indes, il se tira d'affaire grâce à des complicités depuis qu'il avait fait voter le décret de la confiscation des biens des émigrés.
Son action déterminante dans la mise en accusation de Robespierre ne l'empêcha pas d'être inquiété dans la période de réaction thermidorienne qui suivit le 9 thermidor, et compromis[2] dans l’insurrection du , il dut se cacher à Montpellier où il vécut retiré jusqu’en 1815.
Brièvement élu durant les Cent-Jours à la Chambre des représentants en 1815, il ne prend de part active qu'aux discussions sur le budget. Il est proscrit comme régicide sous la Seconde Restauration et arrêté le 24 juillet 1815 par le marquis de Montcalm. Il est enfermé au Fort de Brescou avant d’être libéré un mois plus tard sur l’intervention de son ami Fouché, alors chef de la police de Louis XVIII[9]. Il part alors pour la Belgique et meurt en exil près de Bruxelles le 15 février 1820, sans enfants malgré son mariage avec Mlle Hotteringe[9]. On a de lui un grand nombre de discours et de rapports sur des matières politiques.
« Quand on aura ruiné la Belgique, quand on les aura mis au même point de détresse que les Français, ils (les Belges) s'associeront nécessairement à leur sort (celui des Français). Alors on les admettra comme membres de la République avec l'espoir de conquérir toujours devant soi avec le même genre de politique ». (, au général Charles François Dumouriez[10],[11],[12].)
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↑« La contre-révolution est dans l'administration des finances... Quels sont les administrateurs suprêmes de nos finances ? Des Brissotins, des Feuillants, des aristocrates et des fripons connus : ce sont les Cambon, les Mallarmé, les Ramel »
↑« Il est temps de dire la vérité tout entière : un seul homme paralyse la Convention ; cet homme c’est Robespierre. »
↑Répertoire du théatre républicain, ou, Recueil de pièces imprimées avant, pendant et après la République Française, Slatkine Reprints, (lire en ligne), p. 17
Céline Borello, « Pierre Joseph Cambon », dans Patrick Cabanel et André Encrevé (dir.), Dictionnaire biographique des protestants français de 1787 à nos jours, tome 1 : A-C, Les Éditions de Paris Max Chaleil, Paris, 2015, p. 556 (ISBN978-2846211901)
Félix Bornarel, Cambon et la Révolution française, Paris, Félix Alcan, , 412 p. (lire en ligne).
Bernard Gainot, Dictionnaire des membres du comité de Salut Public : Dictionnaire analytique biographique et comparé des 62 membres du Comité de Salut Public, Paris, Tallandier, , 163 p. (ISBN9782235018524), p. 90-91.
E.-D. Grand et L. de la Pijardière, Lettres de Cambon et autres envoyés de la ville de Montpellier de 1789 à 1792, Montpellier, Imprimerie Serre et Ricome, 1889, 100 p., [présentation en ligne].
François Hincker, « L'affrontement Cambon-Robespierre le 8 Thermidor », dans Jean-Pierre Jessenne, Gilles Deregnaucourt, Jean-Pierre Hirsch, Hervé Leuwers (dir.), Robespierre. De la nation artésienne à la République et aux nations : actes du colloque, Arras, 1-2-3 avril 1993 / [organisé par le] Centre d'histoire de la région du Nord et de l'Europe du Nord-Ouest, Villeneuve-d'Ascq, Centre d'histoire de la région du Nord et de l'Europe du Nord-Ouest, coll. « Histoire et littérature régionales » (no 11), , 458 p. (ISBN2-905637-22-6, lire en ligne), p. 299-307.
Gratien Saumade, « Le Conventionnel Cambon et sa famille (1785-1830) : Fortune. Biens nationaux. Fédéralisme. Condamnation à mort du Maire Durand. Documents politiques inédits ou peu connus. t. I (seul paru) », Cahiers d'histoire et d'archéologie, Nîmes, Éditions des Cahiers d'Histoire et d'Archéologie. Larguier, imprimeur, t. X, hors-série, 5e année, année 1935, , p. V-299 (lire en ligne).
Clovis Sené, Joseph Cambon (1756-1820), le financier de la Révolution, biographie, préface de Jean Dutourd, J.-C. Lattès, 1987.
Mathieu Soula, « Tout était à faire ». Mise en place du système fiscal révolutionnaire dans le département de l'Hérault, L’exemple des contributions foncières et mobilières 1789-an XII, thèse de droit soutenue le , Université des Sciences sociales de Toulouse 1, École doctorale Droit et Science politique, [lire en ligne], [compte rendu en ligne].
Notice biographique de Joseph Cambon, extrait de l'ouvrage Les Ministres des Finances de la Révolution française au Second Empire, Comité pour l'histoire économique et financière de la France, 2007, 376 p, (ISBN978-2-11-094805-2)