Le sommet du G6 1975, appelé aussi sommet de Rambouillet, 1re réunion du G6, réunit les dirigeants des 6 pays démocratiques les plus industrialisés, ou G6, du 15 au , dans la ville française de Rambouillet, à l'époque du serpent monétaire européen, auquel succèdera en 1979 le système monétaire européen. Il conduit à créer le G6 (qui deviendra le G7 l'année suivante puis G8 en 1997, pour redevenir G7 en 2014).
À l'origine, le président français était opposé à la présence de l'Italie mais a dû se conformer à l'avis des autres participants qui souhaitaient sa présence. L'Italie se fît admettre, en « faisant valoir l'effet stabilisateur que sa participation aurait sur son équilibre politique interne »[5].
En février 1975, les banques centrales américaine, suisse et allemande conclurent un accord pour coordonner leurs interventions sur le marché des changes pour soutenir le dollar, dont il fut fait référence à Rambouillet[6], mais sans réellement de suites volontariste[6].
Ce fut lors de la Conférence sur la sécurité de Helsinki (juillet 1975) que le président français invita les Cinq à se réunir à Rambouillet à l'automne[5]. Le président américain Gerald Ford, appuyé par le secrétaire d'État Henry Kissinger, accepta malgré des réticences initiales[5].
L'objectif est stopper la baisse du dollar. Les Américains bénéficient d'une croissance de 13 % en rythme annuel depuis l'automne[2] mais leur monnaie paie l'accroissement spectaculaire du déficit des paiements courants des États-Unis, qui entraîne des reports massifs sur une monnaie refuge, le mark allemand, pénalisant les autres monnaies européennes.
La réunion s'est conclue par la déclaration de Rambouillet qui est l'élément fondateur et qui fixe les motivations du G6.
Cette baisse du dollar va en réalité s'amplifier à la fin de juin 1976[7] avec les sondages donnant une nette victoire de Jimmy Carter à l'élection présidentielle américaine de 1976, car il est réputé favorable à des taux d'intérêts américains bas.
Le résultat du sommet de Rambouillet de 1975, selon des économistes, « peut s'analyser comme l'acceptation formelle par la France des changes flottants »[8]. Les Américains acceptent de limiter l'ampleur des variations de change par une action des banques centrales mais refusent le retour à une parité fixe[8]: un document franco-américain déclare qu'un régime de parités fixes ne pourra être rétabli que par un vote au FMI à la majorité de 85 %[8], ce qui fait que Paris reconnaît, de fait, le régime actuel de changes flottants[8], en échange de faire « accepter pour l'avenir, mais à terme indéterminé », le principe d'un retour aux parités fixes, qui n'aura pas lieu[8]. Un mécanisme d'appel et d'orientation générale est organisé entre directeurs du Trésor et ministres des Finances, mais sans disposition sur une parité centrale, « ni sur l'ampleur des marges de fluctuations tolérables »[8].
L'accord de Rambouillet a pu faire l'objet d'interprétations contradictoires[6], les seules contraintes effectives étant celles qui résultent de l'appartenance au serpent communautaire[6].
Après celle de la lire à la fin du mois de janvier, la dévaluation impromptue de la peseta[Laquelle ?] en février, déclenchant des « bchats massifs de marks », est la cause de « la nouvelle secousse », le feu sous la cendre s'étant « brutalement rallumé », obligeant les banques centrales d'Allemagne et de France à « agir en commun pour atténuer les pressions spéculatives » mais cette fois pour le franc et plus le dollar, soutenu lui par la Réserve fédérale américaine[9], « en application de l'accord de Rambouillet », selon le ministre français de l'Économie, Jean-Pierre Fourcade.
Le porte-parole du gouvernement allemand doit démentir le l'hypothèse d'une réévaluation du deutschemark, sur laquelle parie la spéculation après cette « dévaluation de fait de la peseta » le , de 11 % environ[10], trois semaines après celle, de fait aussi, de la lire italienne[11]. Comme la lire, la peseta souffre de fuites de capitaux dues la situation politique en Espagne après la mort du dictateur Franco le [12] et le troisième gouvernement du franquiste Carlos Arias Navarro, formé le , dont les mesures « libérales » déçoivent l'opposition antifranquiste, très sceptique[13] et que le roiJuan Carlos Ier remplace seulement en par Adolfo Suárez, dans l'attente de la réforme des institutions via la loi du et un référendum un mois après. Des grèves de cent mille personnes se à Madrid le 14 janvier, s'étendent « lentement dans le reste du pays », t dix-huit personnalités réclament face à la montée des prix et du chômage, une " rupture démocratique ". en attendant le discours d'Arias Navarro du 28 janvier[14], après lequel les marchés attendent toujours un « nouveau gouvernement espagnol » qui puisse lancer un « un plan sérieux de lutte contre l'inflation » et le déficit de la balance commerciale DE 3 milliards de dollars en 1975, comme en 1974[12], un référendum national et la légalisation des partis politiques de gauche[15] se faisant attendre jusqu'en mars[16].
Cette « dévaluation de fait » de la peseta « accentue encore les pressions » sur les monnaies faibles, franc français et franc belge[11], tandis que la Banque d'Angleterre a dû intervenir pour soutenir sa monnaie[11], mais un réajustement semble proscrit car les banques centrales considèrent alors qu'elles ne peuvent pas céder à la spéculation « sans remettre en question l'accord de Rambouillet »[11].
Philippe Labarde, dans Le Monde, relève la rumeur voulant que la Banque de France a déjà dépensé 30 % de ses réserves en devises, aux spéculateurs étrangers mais aussi à des « opérateurs commerciaux désireux de se couvrir contre une éventuelle manipulation monétaire, qu'ils considèrent, à tort ou à raison, comme inévitable »[9]. Les banques françaises n'étant pas autorisées à leur prêter, les premiers empruntent des francs en France, entraînant une tension sur les taux de l'eurofranc[Quoi ?], pour les vendre contre des marks. Autre scénario évoqué, une réévaluation légère du deutschemark, de 4 % à 5 %, jugée insuffisante.
« Les interventions des banques centrales n'ont pas enrayé la spéculation sur le mark qui entraine la persistance de la tension sur le marché des changes », constate à nouveau le 13 février 1976 Le Monde[17], en notant que Jean-Pierre Fourcade a été contraint de démentir une éventualité de dévaluation[17], pour accompagner les déclarations de Hans Friderichs, ministre ouest-allemand de l'Économie, dans une interview à l'hebdomadaire économique Wirtschaftswoche[17].
Est organisé alors une sorte de "tête-à-tête à quatre" avec Giscard d'Estaing, Jacques Chirac, Helmut Schmidt et son vice-chancelier Genscher, président du FDP, second parti de la coalition de Bonn, la présence du premier ministre français étant censé rassurer les marchés des changes sur l'absence de dévaluation.
Solutions proposées contre la montée de la spéculation
Une semaine après qu'il ait annoncé à la mi-mars que la France sortait du Serpent monétaire européen, Gilbert Gantier, député giscardien de Paris, réclame un "fusion du mark et du franc", le 23 mars 1976, afin de faire « réfléchir les spéculateurs mondiaux » et éviter au « mark d'avoir à lutter contre des attaques à la hausse » néfastes à l'économie ouest-allemande[18]. L'économiste Serge-Christophe Kolm réclame lui quinze jours après le passage à un "serpent monétaire réel"[19], où « rce qui est limité n'est plus la variation de la valeur du mark en francs, mais celle-ci moins l'excès du taux d'inflation français sur le taux d'inflation allemand »[19], afin d'éviter les anticipations spéculatives autoréalisatrices causées par le "serpent nominal"[19], « une bête nuisible et éphémère, néfaste quand elle vit, mais heureusement peu vivace »[19], qui ne limite que les variations des parités des monnaies alors qu'il faudrait limiter plutôt celle des parités des pouvoirs d'achat[19], ce qui fait que « les spéculateurs prévoient ce processus, vendent en hâte des masses de francs en marks, d'où déficit brutal de la balance des capitaux, et dévaluation »[19]. Ce "serpent réel", plus efficace car plus modeste, limiterait la coopération entre nations à « la lutte contre une éventuelle spéculation absurde et sans fondement »[19].
Parmi les autres causes de la spéculation sur la baisse du dollar et la hausse du mark, Le Monde note le dégagement américain du Vietnam[17], la prise en main de l'Angola par une formation soutenue par l'Union soviétique[17] et les spéculations sur les résultats de l'élection présidentielle américaine de novembre 1976 aux États-Unis[17].
Les économistes s'aperçoivent au même moment que les « mouvements de capitaux à court terme, par leur importance et leur sens », ont pris « une incidence forte »[20], avec un marché des changes désormais « fort sensible au contexte financier », aussi bien de la part des trésoriers d'entreprises par le jeu du termaillage[20] que des spéculateurs détenteurs de capitaux flottants[20]: du printemps 1973 à l'automne 1976), la parité entre franc et mark s'est « avérée très instable et fort sensible, s'écartant des rapports de prix », puis qu'à partir du plan Barre de l'automne 1976, le franc s'est mieux comporté « que ne pouvait le laisser envisager la différence d'inflation apparente entre les deux pays »[20], les autorités françaises s'étant « efforcées de créer un environnement financier qui ne soit pas défavorable à leur devise »[20]. Ainsi, de l'automne 1976 au second trimestre 1980, le rapport des prix français aux prix allemands s'est dégradé de 24,1 % alors que la monnaie allemande ne s'est appréciée que de 12,4 %[20].
Ils constatent en 1976 la forte croissance du montant des euromonnaies, de 28% par an en moyenne contre 13% par an pour les réserves des banques centrales[6], dont la marge de manœuvre face aux « mouvements spéculatifs » devient « de plus en plus étroite »[6].
9 mai 1971: le Conseil européen approuve la proposition de Bonn d'un flottement général des monnaies[6], les autorités allemandes, belges et néerlandaises cessent de soutenir le dollar[24],[23], envolée du mark jusque là fixé à 1,175 5 franc[24].
15 août 1971: les États-Unis suspendent la convertibilité-or du dollar à prix fixe[23], taxent de 10 % les importations et allègent la fiscalité des investissements[23]. Le dollar entame une baisse qui va atteindre 70% face au mark en une vingtaine d'années[25]
Fin octobre 1971: hausses face au dollar, de 9,7 % du mark, 8,1 % du florin, 7,3 % du franc belge, 4% du sterling et 2,4 % du franc[23].
18 décembre 1971: l'accord du Smithsonian Institute, conçu pour sauver les parités fixes[24], acte l'éclatement du système monétaire de Bretton Woods. L'once d'or augmentée à 38 dollars (+8,6 %)[23]. Les principales monnaies européennes réévaluées[23]. Le franc de 8,6 % par rapport au dollar[23], mais se déprécie par rapport à d'autres monnaies[6] dont 6 % face au mark[23]. Les parités vis-à-vis du dollar sont élargies de ± 1% à ± 2,25 %[23]. Les fluctuations entre monnaies européennes peuvent atteindre 9 % en cas de retournement face au dollar[23], nuisant à la politique agricole commune[23]. "Cela va durer trois mois", commente Paul Volcker[23].
23 juin 1972: la livre sterling doit déjà quitter le serpent[26].
Début 1973: la lire italienne doit quitter le serpent[27]
14 février 1973: deuxième dévaluation du dollar (de 38,02 $ l’once à 42,22 $)[24], le mark réévalué de 3 %[24].
19 mars 1973: les États européens cessent de défendre la parité de leurs devises contre le dollar[24].
février-mars 1973: grande crise monétaire, la France participant à l'accord des Européens à Bâle, sa monnaie suit le serpent monétaire européen, puis sa parité est restée pratiquement stable[6].
juin 1974 à juin 1975: le franc se redresse continûment par rapport au DTS, grâce à la baisse du dollar de 4,90 francs à 4[6] et à la dépression conjoncturelle qui réduit les importations[6].
Denis Healey présente un plan de recyclage des pétrodollars, en partie repris par le FMI[31].
février 1975: accord des banques centrales américaine, suisse et allemande pour coordonner leurs interventions sur le marché des changes pour soutenir le dollar[6], mais sans réellement de suites volontariste[6].
8 janvier 1976: accords de la Jamaïque entérinant l'accord de Rambouillet[6], alors que l'hiver 1975-1976 est celui de la chute de la lire[37].
21 janvier 1976: rencontre des dirigeants socialistes et communistes italiens[38]. Après avoir dépensé 528 millions de dollars en 3 semaines, la Banque d'Italie suspend son soutien, jusqu'à mars, à la lire[37],[39] qui flotte depuis le 9 février 1973 et a perdu depuis 21 %[38].
22 janvier 1976: le marché des changes italien est fermé[38], le cinquième blocage du marché en quatre ans[38],[40] et la spéculation des États-Unis dénoncée par les quotidiens La Repubblica et L'Unita (gauche)[38].
9 février 1976: la peseta dévaluée de 11 % face au dollar[37].
début février 1976: le franc attaqué car l'inflation a fini 1975 à 10 % contre 5 % en Allemagne[37].
février 1976 à octobre 1976: le plan de relance de Jacques Chirac de septembre 1975[37], creusant les importations, contribue à une dépréciation de 10 % du franc[6].
fin février 1976: la livre attaquée puis s'effondre début mars[37].
mars 1976: les réserves de change, en hausse jusque-là, commencent à plonger[41], générant « une panique sur les marchés »[41].
5 mars 1976: attaque des marchés contre le franc français et le franc belge, mais aussi la couronne danoise[37] et suivies d'un discours du président français qui souhaite toujours relancer la croissance[37].
mars 1976: la Banque de France engage 8 milliards de francs pour défendre sa monnaie après 4 millions en février[42].
15 mars 1976: après les élections cantonales[42] le franc sort définitivement du serpent monétaire européen[6] sur une dépréciation de près de 4,5 % face au mark[42].
29 septembre 1976: chute du sterling après le congrès travailliste de Blackpool qui n'a pas soutenu l'accord conclu du gouvernement Callaghan avec les syndicats et le patronat pour « réduire à environ 10 % la progression des salaires au cours des douze mois à venir ».
3 octobre 1976: l'inflation italienne grimpe à 18 %, le Parti communiste italien accepte le compromis historique[45].
3 novembre 1976: Jimmy Carter élu président américain.
janvier 1977: forte réduction de l'excédent commercial français face à l'Angleterre, constate Raymond Barre[46].
début 1977: Jimmy Carter veut convaincre le japonais et allemandes d'une relance concertée[47].
mai 1977: sommet de Londres, les Allemands et Japonais refusent les propositions américaines de relance.
année 1977: le niveau atteint par le franc au dernier trimestre 1976 se maintient[6].
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