Folies-Mayer (1851-1853) Folies-Concertantes (1854) Folies-Nouvelles (1854-1859, 1871-1872, 1880) Troisième Théâtre-Français (1876-1880) Le France (1965-1976) Déjazet Music-Hall (1977) TLP-Déjazet (1986-1992)
Direction
Liste des directeurs
Mayer (1851-53) Hervé (1853-54) Huart et Altaroche (1854-59) Eugène. et Virginie Déjazet (1859-70) S. Manasse (1871-72) C. Bridault (1873-74) A. de Jallais (1874-75) Geindre et H. Buguet (1875-76) Hilarion Ballande (1876-80) Desmottes (1880-81) H. Luguet (1881) M. Villars (1882-83) H. Charpentier (1883-1884) C. Galabert (1884-1885) Achille Campisiano (1885) M. Simon (1885-86) Henri Boscher (1886-95) E. Calvin (1895-97) G. Rolle (1897-1916) Famille Rolle (1916-39) Desbonnet (1978-82) Michel Anseaume / Les Macloma (1982-85) Hervé Trinquier (1986-92)
En , le chansonnier Joseph-Simon Mayer loue le bâtiment désaffecté pour y aménager un café-concert baptisé Folies-Mayer. S'y produit, entre autres, l'auteur-compositeur-interprète Joseph Darcier. Une vaine tentative de reprise par un magicien nommé Bosco conduit à une première fermeture[3]. En , le compositeur et comédien Hervé obtient du ministère de l'Intérieur l'autorisation d'exploitation du lieu. Les Folies-Concertantes se consacrent ainsi à partir du [4],[3] à un genre qui va donner naissance à l'opérette. Hervé y présente en effet des œuvrettes de sa composition (scènes comiques à deux personnages, chansonnettes, etc.) avec le fantaisiste Joseph Kelm (beau-frère de Mayer), mais aussi des pantomimes de Paul Legrand et Charles Delaquis, venus respectivement des Funambules et du Petit-Lazzari.
Louis Huart, rédacteur en chef du Charivari, et Marie-Michel Altaroche, ancien directeur de l'Odéon, ayant racheté les murs, la salle désormais dotée de 850 places[5] rouvre le après une restauration totale confiée aux architectes Édouard Renaud[6] et Boileux et aux décorateurs Charles-Antoine Cambon et Thierry[3], sous le nom de Folies-Nouvelles[n 1]. Hervé conserve les fonctions de directeur artistique, Legrand et Delaquis étant quant à eux nommés directeur de scène et régisseur. Bien que toujours strictement limitée par décret au style des œuvres représentées (pantomimes, saynètes, à-propos, opérettes en un acte) et au nombre de personnages, la troupe s'étoffe rapidement, avec l'arrivée notable en de José Dupuis qu'Hervé débauche du théâtre du Luxembourg-Bobino. Jacques Offenbach y fait jouer une des premières œuvres, Oyayaye ou la Reine des îles en 1855. Hervé est contraint de quitter ses fonctions officielles en à cause d'ennuis judiciaires[7] (il continuera toutefois à fournir des partitions sous divers pseudonymes).
Au total, 150 pièces, dont 134 créations en majorité d'Hervé, auront été représentées de 1854 à 1859[8].
En 1859, la célèbre comédienne Virginie Déjazet, qui veut offrir au jeune Victorien Sardou un cadre digne de ses productions, obtient le privilège d'exploitation de la salle et sa reconnaissance comme théâtre à part entière[n 2]. Le , le lieu prend le nom de théâtre Déjazet (également appelé Folies-Déjazet), appellation qu'il conservera durant l'essentiel de son histoire. Virginie Déjazet le dirige avec l'aide de son fils, Joseph-Eugène, jusqu'au , date de sa représentation d'adieu.
Le 1er juillet, Séraphin Manasse, ancien directeur de théâtre de Constantinople et du théâtre du Caire, lui succède mais la guerre franco-prussienne et les événements de la Commune interrompent ses projets. Ce n'est que le que la salle rouvre, entièrement restaurée, sous le nom de Folies-Nouvelles[3]. Mais une série d'échecs le contraint à déposer le bilan en . Se succèdent plusieurs directions sans plus de réussite, dont Daiglemont, Dechaume, Charles Bridault, Amédée de Jallais, Geindre et Buguet[3].
L'acteur Jean-Auguste-Hilarion Ballande (1820-1887) en reprend la direction en pour y accueillir ses Matinées littéraires et dramatiques créées en 1869. Après de nouveaux travaux faisant passer la capacité à près de 1 000 places, le Troisième Théâtre-Français est inauguré le [3],[9]. Plaçant ouvertement sa programmation sous le signe du théâtre classique, il s'adjoint le concours de jeunes diplômés du Conservatoire comme Eugène Silvain, futur doyen de la Comédie-Française. En , fort de subventions ministérielles, Ballande quitte la salle du boulevard du Temple pour le théâtre des Nations, place du Châtelet. Elle est rachetée dans la foulée par Desmottes et retrouve le son nom de Déjazet[3].
L'expérience est de courte durée puisque Desmottes cède sa place le au comédien Henri Luguet qui lui-même doit interrompre sa programmation, un arrêté préfectoral ordonnant la fermeture du théâtre le pour raisons de sécurité[3]. Ayant entrepris d'importants travaux de remise aux normes, son successeur, Marcel Villars, rouvre le pour faire faillite le [3]. Les suivants ne sont pas plus heureux : Henri Charpentier (1883-1884), Charles Galabert (1884-1885), Achille Campisiano (sept.-nov. 1885), Maurice Simon[n 3] (nov. 1885-fév. 1886) ne font que passer. Le théâtre retrouve un peu de stabilité avec l'arrivée du comédien Henri Boscher qui mise avec bonheur sur un jeune auteur, Léon Gandillot. Les Femmes collantes (1886), La Mariée récalcitrante (1889) et La Course aux jupons (1890) attirent un énorme public. Le , Boscher cède son fauteuil au comédien Edmond Calvin dit Calvin fils[3]. Celui-ci fait installer l'électricité et c'est une salle entièrement restaurée qui rouvre le , portant en son fronton une statue de Virginie Déjazet dans le rôle de Garat[3]. Mais ses efforts sont vains et, en , il est remplacé par le journaliste Georges Rolle et le dramaturge Alphonse Lemonnier[n 4], ce dernier ne restant que l'espace d'une saison.
Rolle revient au genre d'origine qui avait fait les beaux jours de la salle : le vaudeville. Le succès est immédiat : la plupart des productions atteignent la centième, le summum étant atteint par Tire-au-flanc d'André Mouëzy-Éon et André Sylvane créé le et représenté 1 026 fois consécutives (elle atteindra les 2 000 avec les reprises de 1907 et 1911)[3]. Parmi les autres de Mouëzy-Éon, L'Enfant de ma sœur en 1908 (355 représentations), Le Papa du régiment en 1909 (327 représentations) et Les Dégourdis de la 11e (268 représentations) dont la carrière est interrompue par le déclenchement de la Première Guerre mondiale, le . Le théâtre rouvre le , misant sur le talent de Mouëzy-Éon, avec Les Fiancés de Rosalie (255 représentations) suivi de Classe 36 en 1916 lorsque Rolle meurt[3].
Sa femme reprend alors le flambeau, aidée de ses trois enfants, Georges, Paule et Emma[10]. La 2 899e représentation de Tire-au-flanc en est l'occasion pour le public de découvrir un théâtre entièrement rénové, avec baignoires et loges. Après le décès de leur mère en , Georges, Paule et Emma tentent de réhabiliter l'esprit du café-concert avec les Quatre à Sept du Déjazet, mais retournent bien vite à leur fonds de commerce[3]. La fosse d'orchestre est rouverte en 1935 à l'occasion de la création de Pour plaire aux femmes d'André Mauprey et Robert de Makiels, sur une musique de Walter Kolle. La concurrence du cinéma se fait pourtant de plus en plus sentir et, devant la baisse sensible de fréquentation, Paule Rolle décide de vendre le théâtre familial en pour prendre la direction du Gymnase[3].
Le , le Déjazet devient un cinéma, passant progressivement de 900 à 530 places, le second balcon ayant été fermé et les loges du parterre supprimées[3]. Présentant en seconde exclusivité les films de Marcel Carné, Jean Renoir, Henri-Georges Clouzot, la programmation met à l'honneur le film noir. Marcel Carné y tourne les scènes d'intérieur des Enfants du paradis en 1944, la salle ayant fermé durant l'Occupation. Rebaptisée Le France en 1964[3],[11], elle subit la désaffection du public au début des années 1970. Elle est destinée à disparaître en 1976 quand la Société d'exploitation d'art cinématographique (SEDAC)[12],[13], présidée par Jean Bouquin, ancien créateur de mode et fondateur du théâtre Campagne-Première un an auparavant[3], en rachète le bail commercial, l'immeuble étant quant à lui propriété de la Banque de France[14],[15]. Sa réhabilitation en tant que théâtre est entreprise au prix de démarches administratives (le lieu ayant perdu son droit d'exploitation théâtrale) et de gros travaux (balcons, scène et loges, l'immeuble de la rue Béranger qui les abritait ayant été entretemps vendu) ; la programmation cinématographique est durant tout ce temps maintenue.
Le , Coluche inaugure le Déjazet Music-hall, mais le spectacle qu'il vient de jouer un an à Bobino ne dépasse pas les 50 représentations[3]. La salle renoue alors - sous le nom de Cinéma-Théâtre Déjazet - avec le grand écran en proposant des séances groupées (3 films pour 15 francs), puis des festivals thématiques mais aussi des concerts live (Vince Taylor, Steve Lacy, Téléphone, etc.), attirant avec succès toute une nouvelle génération de spectateurs[3]. Fermée administrativement le [réf. nécessaire][16], puis de nouveau le par les commissions de sécurité[17][réf. nécessaire], Jean Bouquin la donne en location-gérance aux clowns Macloma qui obtiennent le [18], après travaux, une autorisation de réouverture sous condition de les poursuivre[réf. nécessaire] (le théâtre étant alors classé en 4e catégorie[n 5]). Ils gèrent le théâtre jusqu'en 1985, date à laquelle la SEDAC signe un nouveau contrat avec la société TLP[3].
Le Théâtre libertaire de Paris, TLP-Déjazet (1986-1992)
Au début des années 1980, Joël-Jacky Julien, musicien de jazz à l'initiative de la création de Radio libertaire (89,4 MHz), la radio de la Fédération anarchiste, et Hervé Trinquier, musicien classique à l'origine de l'achat de la librairie de cette même Fédération (145, rue Amelot, dans le 11e arrondissement) et organisateurs de nombreux galas de soutien à Radio libertaire, décident d'ouvrir une salle de spectacle. Depuis l'amitié qui liait Proudhon à Courbet, le mouvement anarchiste a en effet toujours été proche du milieu artistique. C'est par hasard qu'un de leurs amis, Bernard Lavilliers - qui lui-même recherchait une salle pour ouvrir une école du spectacle - leur apprend en 1985 que le Déjazet serait à reprendre[19]. Julien et Trinquier signent peu de temps après avec Jean Bouquin un contrat de location-gérance. Les clés leur sont remises le 1er décembre[3],[20].
Avec d'autres amoureux de la chanson, parmi lesquels les militantes anarchistes Corinne Rousseau, Paulette Piedbois et le chanteur Alain Aurenche, ils entreprennent la restauration sous la supervision de l'architecte Antoine Monnet et de l'entrepreneur Claude Attienz. L'inauguration du Théâtre Libertaire de Paris ou TLP-Déjazet a lieu le avec une des plus grandes figures contestataires de la chanson, Léo Ferré[21]. Le nom du théâtre ne sera toutefois pas divulgué sous cette forme à l'administration, les gérants préférant les appellations « Temple Loisirs Production »[22], puis « Théâtre, Lyrique et Poésie »[23],[24] pour les sociétés exploitantes.
Joël-Jacky Julien quitte assez vite le TLP pour ouvrir un restaurant[3], laissant seul Hervé Trinquier, qui sera chargé de la gestion de 1986 à 1992[24]. L'arrivée de Jean-Marie Balsano[n 6] en 1990 va influencer la programmation du TLP qui crée les concerts Jazz O' TLP. Programmant selon les saisons entre 300 et 465 spectacles, la rénovation de la salle se poursuit.
En 1990, le ministère de la Culture inscrit la salle aux monuments historiques[25]. En 1992, la commission de sécurité fait passer le théâtre de 4e en 3e catégorie[n 5],[réf. nécessaire]. La même année, l'équipe de direction est nommée en tant que « producteur de l'année » aux Victoires de la musique[26]. La société SEDAC résilie alors le contrat de location et reprend la gestion du lieu en juillet. Une partie de la programmation prévue par le TLP pour la saison 1992-1993 est transférée au théâtre Le Trianon[n 7].
1855 : Pierrot quaker, pantomime de Cham, musique d'Hervé ()
1855 : Qui trop embrasse..., pantomime de Mathieu, musique d'Hervé ()
1855 : La Fontaine, pantomime de Lesage (Altaroche), musique d'Hervé ()
1855 : Fanfare, « scène villageoise » de Théodore de Banville, musique d'Hervé ()
1855 : La Sœur de Pierrot, mimodrame de Pol Mercier et Paul Legrand, musique d'Hervé ()
1855 : Quand les chats n'y sont pas..., pantomime de Charles Bridault, musique d'Hervé ()
1855 : Un drame en 1779, « folie musicale » d'Hervé ()
1855 : Un drôle de monde, pantomime de Lubize, musique d'Hervé ()
1855 : Latrouillard et Truffaldini, ou les Inconvénients d'une vendetta infiniment trop prolongée, saynète de J. Petit et Ernest Blum, musique d'Hervé ()
1855 : Pierrot indélicat, pantomime de Dantan fils et Paul Legrand, musique d'Hervé ()
4e catégorie : 300 personnes et au-dessous, à l'exception des établissements compris dans la 5e catégorie ;
5e catégorie : établissements faisant l'objet de l'article R. 123-14 dans lesquels l'effectif du public n'atteint pas le chiffre minimum fixé par le règlement de sécurité pour chaque type d'exploitation.
↑De son vrai nom Jean-Marie Durand, ce producteur est marié à la chanteuse Dee Dee Bridgewater.
↑Hervé Trinquier se consacrera par la suite à la régie de spectacles et fondera une maison d'édition de livres, les éditions Tops-Trinquier, qui réédite les classiques de l'anarchisme.
↑Arrêté no 90-1282 de la préfecture de la région d'Île-de-France en date du 6 décembre 1990 portant inscription de la salle sur l'inventaire supplémentaire des Monuments historiques.
↑ a et bNathalie Solence, Mes années Serize : La Vie de Jacques Serizier - chanteur, comédien, poète, mélodiste, auteur, animateur à RTL, programmateur, L'Harmattan, , 418 p. (ISBN978-2-336-33412-7, lire en ligne), p.339.
↑Jean-Claude Yon, Théâtres parisiens, Citadelles et Mazenod (www.dejazet.com/dejazet-historique/derniere-parution/).
Louis-Henry Lecomte, Virginie Déjazet, d'après ses papiers et sa correspondance, Montgredien et Cie, Paris, 1873 [lire en ligne]
Annuaire des artistes et de l'enseignement dramatique et musical, Montorier puis Société générale d'impression, Paris, 1887-? (disponibles sur Gallica)
Henry Beaulieu, Les Théâtres du boulevard du Crime, Bibliothèque du vieux Paris, Daragon, Paris, 1905, p. 165-168 (lire en ligne sur Gallica)
Louis-Henry Lecomte, Histoire des théâtres de Paris (1402–1911) : Le Théâtre des Folies-Nouvelles, t. 8, Paris, Daragon, (lire en ligne sur Gallica).
Louis-Henry Lecomte, Un amour de Déjazet : Histoire et correspondance inédites (1834–1844), Bibliothèque du vieux Paris, Daragon, Paris, 1907 (lire en ligne sur Gallica)
Geneviève Latour, Florence Claval (études réunies par), « Théâtre T.L.P.-Déjazet », dans Les théâtres de Paris, Paris, Délégation à l'action artistique de la Ville de Paris. Bibliothèque historique de la Ville de Paris. Association de la régie théâtrale, (ISBN2-905118-34-2), p. 162-164
Michel Seban, Lieux de spectacle à Paris : Abris et édifices, Picard, 1998, p. 61-62 (ISBN9782708405523)
Nicole Wild, « Théâtre des Folies-Nouvelles », dans Joël-Marie Fauquet (dir.), Dictionnaire de la musique en France au XIXe siècle, Fayard, Paris, 2003, p. 479-480 (ISBN2-213-59316-7)
Émilie Roger, « Une comédienne en son temps : Virginie Déjazet (1798-1875). Contribution à l'étude de la femme de spectacle au XIXe siècle », mémoire de master en histoire culturelle et sociale, 2007
Jean-Claude Yon, Théâtres parisiens : Un patrimoine du XIXe siècle, photographies de Sabine Hartl et Olaf-Daniel Meyer, Citadelles et Mazenod, Paris, 2013 (ISBN978-2-85088-568-6)