Le marketing politique est l'une des formes de la communication politique qui vise à promouvoir un projet, un candidat, un dirigeant, une cause politique sur le modèle des techniques de marketing commercial en faisant appel notamment à l'utilisation de campagnes « publicitaires » dans les médias ou sur les réseaux sociaux, la distribution de tracts ou le démarchage, par opposition aux formes historiques de la communication politique que sont, par exemple, les débats publics ou les meetings. En ce sens, la nature du marketing politique s'inscrit dans une stratégie de communication.
Selon la conception de la politique que peuvent avoir les opérateurs qui le mettent en œuvre, les enjeux peuvent être multiples :
Certains auteurs américains font remonter la trace du marketing politique lors de la campagne de Franklin Roosevelt en 1936.
La campagne de Jean Lecanuet pour l'élection présidentielle de 1965, au travers de la première communication télévisuelle, marque les débuts du marketing politique en France.
Winston Churchill, promettant à son peuple « du sang et des larmes », paraît agir et communiquer à la suite d'une analyse approfondie de la situation.
Que penser des empereurs romains lorsqu'ils promettent « du pain et des jeux » ? Leur action et communication — discutables à l'évidence sur le plan éthique — sont-elles moins réalistes ?
La fin de la royauté héréditaire met en demeure les régimes qui lui succèdent de prouver leur légitimité. La conquête de l'opinion publique devient désormais un des facteurs-clés de l'action politique. Et ce, a fortiori pour des régimes démocratiques, où cette légitimité passe par l'élection au suffrage universel et les techniques de représentation parlementaire.
Le marketing politique dit « moderne », a été élaboré et promu par des professionnels de la publicité.
Depuis 1952, date de la campagne présidentielle de Dwight D. Eisenhower, les publicitaires et les professionnels des relations publiques font leur entrée dans le domaine de la politique: L'utilisation des techniques de marketing va largement se répandre à toutes les élections[2]. Mais surtout, l'avènement de la télévision confère à l'élection présidentielle - déjà fortement ressentie comme un « duel » entre deux personnalités incarnant deux grands partis - une importance accrue à l'image. Chez les candidats, rien n'est laissé au hasard et tout est réglé sur mesure: l'habillement, la posture, les médias utilisés et surtout la forme et le contenu du discours.
Ainsi, en septembre et en , John F. Kennedy et le candidat républicain Richard Nixon débattent ensemble. Les citoyens qui suivent les débats à la radio estiment que R. Nixon est légèrement plus convaincant. Mais lors des confrontations télévisées qui sont alors une nouveauté, Nixon apparaît nerveux, en sueur et mal rasé, alors qu'une douleur récurrente au genou le fait souffrir. Face à un Kennedy calme et maître de lui, Nixon « passe » mal à l'écran et ressort affaibli de la confrontation télévisée. Ces débats sont donc considérés comme fondateurs d'une certaine mise en scène de la politique moderne puisque, pour la première fois, la manière de se tenir face à une caméra devient un élément important dans une élection.
Le marketing politique évolue encore aux États-Unis, avec la transformation des primaires en un véritable show politique et la sur-médiatisation des deux principaux candidats, suivis au jour le jour.
Il faut attendre 1965 et la candidature de Jean Lecanuet face au général de Gaulle. Le candidat Lecanuet - qualifié à l'époque de « Kennedy français », quand certains médias avaient également pointé un sourire avantageux et ravageur, d'où le surnom « dents blanches » - se fait remarquer par une forte présence télévisée. Conseillé par l'agence « Services et méthodes » de Michel Bongrand, il ne réussit pas à battre son adversaire qui mène campagne sur un registre classique. Aux élections suivantes, il se fait conseiller par l'agence Havas. Aux élections législatives de 1967, l'agence « Services et Méthodes » passe contrat pour le conseil de l'UNR .
Par suite, beaucoup de futurs candidats à la présidentielle ont recours à des conseils en communication.
Lors des élections présidentielles françaises de 2007 des concepts nouveaux se mettent en place qui ouvrent des perspectives dans la pratique du marketing politique :
Les médias ont un rôle majeur dans le marketing politique, mais ils sont loin d'être le seul outil. Ils sont une méthode[pas clair]. Le marketing politique a recours notamment à des techniques de ciblage ainsi qu'à des modes de communication proches de ceux de la publicité ainsi que des méthodes de persuasion ou rhétorique souvent destinées à faire basculer les débats et influencer les électeurs. Même si la communication est primordiale dans le marketing politique, celle-ci n'est que la partie émergée de l'iceberg. Le marketing politique étant avant tout une stratégie de conquête électorale grâce à un message avec le bon fond et la bonne forme. Les thèmes de campagne font donc partie de cette stratégie car ils abordent les sujets d'intérêt pour les électeurs. Les professionnels du marketing politique peuvent être aussi bien employés pour promouvoir un candidat ou un parti qu'un pays ou une cause. (la guerre en Irak en 2003, par exemple).
Il demande des moyens importants et coûteux :
Du fait de ses coûts, il est utilisé prioritairement lors des campagnes électorales ou de situations de crise.
Le marketing politique est à distinguer de ses usages considérés comme plus extrêmes :
Aujourd’hui, le sondage est devenu un outil important pour l’homme politique. Les présidents américains notamment, ont largement fait appel aux sondages d’opinion pour orienter leur mandat. Les programmes puis les applications politiques sont d’abord testés sur des focus group puis des recherches marketing sont faites pour développer des tactiques, et des stratégies pour les faire apparaître sous leur angle le plus séducteur aux citoyens.
On peut encore évoquer les recherches qui visent à trouver tout ce qui est possible sur un candidat adverse, coutume répandue aux États-Unis, où Grover Cleveland avait été accusé par James Blaine d’avoir eu des enfants illégitimes. Cette méthode existe donc depuis longtemps, c’est l’argument ad hominem que Schopenhauer place comme deuxième base de la dialectique (avec l’argument ad rem), dans; « son Art d’avoir toujours raison ».
Les Américains appellent cela l’ « opposition publicitaire », car le but est de faire opposition dans le but d’embarrasser le candidat. Ils n’hésitent pas à aller chercher des documents d’archive, des prises de position par rapport à des sujets polémiques (on a vu Arnold Schwarzenegger se faire rappeler une interview des années 1970 où il disait consommer du cannabis), des rapports de service militaire (George W. Bush en fait les frais face à John Kerry qui a remis en cause son passé militaire), du Financement de la vie politique et électorale.
Aussi, il arrive que des candidats emploient des firmes ou des enquêteurs privés pour qu’elles leur fassent un audit personnel, sur leur passé, pour trouver des moments de vulnérabilité auxquels il serait bon de trouver une solution si jamais on les attaque à ce propos.
On peut noter qu’en France entre les deux tours de l’élection présidentielle de 1981, François Mitterrand a fait appel à cette technique. Son opération : « Cent coups de fil pour convaincre » avait pour but que des militants socialistes, munis d’argumentaire de campagne appellent 20 personnes en une heure pour les convaincre d’amener leur voix au candidat socialiste.
La diffusion de numéros verts pour entrer en contact avec des militants et discuter avec eux sans avoir à payer le prix de la communication est une des autres méthodes utilisées avec le téléphone.
Marketing Politique Mix[8] | Marketing-Mix des réseaux sociaux[9] |
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Produit : Le candidat/ le parti; Le packaging est également important, ici on considérera qu’il s’agit de la présentation du candidat : son look, son attitude, son body language, sa rhétorique. | le P de Permission. on apporte au consommateur l’info qu’il attend mais c’est lui qui choisit ou non de recevoir le message. |
Distribution : Les lieux visités. Pour le marketing politique cette variable est une partie intégrée dans la variable de communication par quel moyen va-t-on diffuser l’image du candidat ? | le P de Proximité. On doit être le plus proche possible du consommateur, dans son propre réseau, afin de le comprendre, l’écouter, parler le même langage que lui et communiquer dans les deux sens |
Prix : vote, il s’agit d’un prix de vente unique dans le sens où chaque électeur n’a qu’un seul et unique vote à donner pour une élection. | le P de Perception. Selon le principe d’émission et de réception, il peut y avoir des disruptions lors du processus de communication, il faut donc veiller à ce que le message émis soit bien compris par la cible |
Communication : une des variables les plus importantes. Quel média/hors média utiliser ? quel message faire passer. La cible de communication peut être tout à fait différente de la cible marketing | le P de Participation. C’est sûrement la plus forte nouveauté. Le consommateur est partie prenante de l’action : il commente, critique, donne son avis, participe. On passe donc d’une relation linéaire B to C à une relation triangulaire B to C to C puisque les membres du réseau social vont interagir entre eux. |
Un pionnier en termes de communication politique via ce nouveau média était Barack Obama durant la campagne présidentielle de 2008 qui le verra accéder à la maison blanche. À l’époque, la télévision est toujours le média dominant aux États-Unis puisqu’elle permet de toucher 90 % de la population, mais Internet est dans le même temps devenu le média privilégié des jeunes de moins de 30 ans. 42 % à 55 % d’entre eux utilisaient le web pour se tenir informés de la politique[10]. Le candidat démocrate se positionne alors comme le « candidat des réseaux sociaux » et part à la conquête de cette cible.
Son équipe de campagne s’investit dans la conquête de ses nouveaux terrains de communication, et très vite le candidat sera soutenu par 400 000 « amis » sur MySpace (soit près du double d’Hillary Clinton avec 200 000 amis et loin devant John McCain 56 000 amis). Mais c’est surtout sur Facebook, le site leader des réseaux sociaux que le sénateur de l’Illinois a réussi à rassembler des millions de fans, alors que dans le même temps Hillary Clinton est suivie par seulement 158 000 amis et John McCain 145 000[11]. Le recrutement de Chris Hughes, l’un des cofondateurs de Facebook, pour l’épauler lors de la campagne présidentielle de 2008 montre bien que le candidat ne prend pas les réseaux sociaux à la légère. Alors que son concurrent, John McCain, utilise internet en priorité pour lever des fonds, l’équipe de communication de Barack Obama cherche avant tout à créer un lien avec les internautes. Le web déchaîne les passions, et de plus en plus de militants rejoignent Barack Obama dans sa campagne. Son équipe de campagne est même allée jusqu’à créer son propre réseau social, MyBarackObama.com sur lequel un million de sympathisants se sont inscrits. Par l’intermédiaire de ce site, le candidat communique directement avec les internautes et leur donnait l’occasion de participer à la campagne online.
L’exemple de l’opération « Great Schlep »[12]
Toujours dans le contexte de la campagne présidentielle américaine, l’agence de communication Droga5 New York a été chargée de la campagne du candidat Obama sur les réseaux sociaux. Barack Obama devait remporter les votes de l’État de Floride qui est l’un des états clés lors des élections présidentielles. La Floride a été prise pour cible. Les retraités juifs de Floride votaient traditionnellement pour les Républicains, alors que la jeune génération était plus encline à voter pour le candidat démocrate. L’agence produisit une vidéo virale avec la comique Sarah Silverman, afin de pousser les petits enfants à aller leur rendre visite pour discuter du programme d’Obama. Le phénomène eut un grand retentissement sur le net et très vite les médias du pays relayèrent l’information. L’opération « great schlep » était lancée. À la suite de cette opération, 275 000 juifs de Floride ont reporté leur vote sur Barack Obama, qui gagnera l’État avec 75 000 voix d’avance.
En 2011, avec l'approche de la nouvelle campagne présidentielle aux États-Unis, le président Obama cherchait à préparer la campagne de sa réélection. Le candidat décide alors de garder son positionnement original de candidat des réseaux sociaux. Le , Barack Obama est accueilli par Mark Zuckerberg au siège de l’empire Facebook à Palo Alto en Californie, pour une conférence avec les jeunes employés de Facebook et retransmis en direct sur le net[13]. C’est l’occasion pour le candidat démocrate de préparer le terrain pour la prochaine campagne présidentielle américaine en tentant de séduire la jeunesse.
La télévision est toujours considérée comme le média le plus efficace pour les politiciens afin de faire passer un message au plus grand nombre de citoyens. Mais en France la communication audiovisuelle des partis politiques est contrôlée par le CSA, qui fixe des règles très rigoureuses pour s’assurer une certaine parité entre les différents partis. Devant ce constat, l’engouement d’un nombre croissant de citoyens pour les nouvelles technologies a incité les politiques à concentrer leur effort sur le web, qui offre plus de libertés au niveau de la communication. De plus, les coûts des campagnes virales sont amoindris sur le web et permettent d’avoir un contact direct avec les partisans et les sympathisants, notamment via les réseaux sociaux. Si la majorité des partis politiques français sont déjà présents sur Facebook, l’UMP et le PS se démarquent de leurs adversaires en lançant chacun leur propre réseau social. Le , l’UMP sous l’influence de Xavier Bertrand a essayé de mettre en place un nouveau réseau social, les créateurs de possible, destiné à tous les citoyens qui voulaient donner leurs idées[14]. Ce projet de l’UMP a été critiqué par les socialistes qui ne voyaient en lui qu’une dérive de la démocratie participative lancée par Ségolène Royal. Les participants du réseau pouvaient être invités à des événements que le parti met en place. L’autre objectif de ce réseau social était d’attirer la jeune génération qui passe un temps considérable sur le net. Seulement le secrétaire général de l’UMP Jean-François Copé a annoncé que le site serait fermé car il n’aurait pas répondu aux attentes des internautes. Le parti socialiste de son côté a lancé le son réseau social, la Coopol, destiné quant à lui aux militants[15]. Les fonctionnalités du site sont assez proches de Facebook et permettent aux participants de rencontrer et de discuter les autres sympathisants de gauche inscrits sur le site. Il sert également aux militants de plateforme en cas de campagne politique afin de coordonner les différentes actions.
La fin de l’année 2011, une période et phase préélectorale, se caractérise par une montée en puissance de l’utilisation des réseaux sociaux qu’ont les politiques[16]. Ces derniers investissent notamment Facebook et Twitter leur permettant de s’exprimer et d’échanger entre eux ou avec les internautes sur les sujets d’actualité politiques. On retrouve ainsi sur le site de micro blogging, parmi les politiques les plus actifs, Cécile Duflot (2 491 tweets et 37 606 abonnés), Benoît Hamon (1454 tweets et 78 632 abonnés), Nathalie Kosciusko-Morizet (1879 tweets et 99 860 abonnés), ou encore Éric Besson (1631 tweets et 26783 abonnés). L'Agence France-Presse (AFP), associée à YouTube, au Centre de formation des journalistes (CFJ) et à Twitter, a annoncé en le lancement de « YouTube Elections 2012 », une chaîne spéciale sur le site de partage dédiée à l'élection présidentielle française[17]. Comme l’expliquent les entreprises associées à la chaîne, « YouTube Elections 2012 » sera « un espace citoyen de débat et de dialogue en ligne autour des prochaines élections de 2012 » pour permettre aux internautes de suivre et interroger les différents candidats et partis politiques durant les campagnes présidentielle et législatives. La chaîne YouTube Elections 2012 « s'inspire de YouTube YouChoose08 - lieu de débat phare entre internautes et candidats autour de la présidentielle américaine de 2008 » - et propose aux internautes d'interroger les personnalités politiques reçues toutes les deux semaines par le CFJ et l'AFP. Ainsi, avant chaque entretien, les internautes pourront soumettre leurs questions par écrit ou par vidéo sur YouTube ou via Twitter. Il leur sera ensuite proposé de voter pour leurs questions préférées. Même les plus grands représentants de l’État sont présents sur les réseaux sociaux, comme le premier ministre François Fillon qui fait parler de lui le en étant démasqué sur Twitter par un internaute[18]. Le premier ministre était en effet présent sur le réseau social depuis le mois d'octobre. Ce compte, à partir duquel le ministre n'a pratiquement rien publié, était surtout utilisé pour suivre ses ministres, François Baroin, Nathalie Kosciusko-Morizet, Valérie Pécresse ou encore Éric Besson ainsi que des journalistes politiques comme Christophe Barbier de l'Express ou Jean-Michel Aphatie de RTL.
Cette présence des politiques sur ces réseaux leur permettent outre la construction d’une image, le rassemblement ou l’information, de se rapprocher d’un public et de nouer un contact plus direct avec lui. Le web contribue en quelque sorte à désacraliser l’homme politique, le rendant plus semblable à ses concitoyens, plus facile d’identification et donc une opportunité pour lui de gagner en popularité.
Entre 2010 et 2011 la révolution tunisienne (révolution de jasmin) est dans une large mesure, une révolution internet voir une révolution Facebook. En effet, les réseaux sociaux ont permis de catalyser le ras-le-bol mais aussi d’organiser la résistance au régime de Ben Ali. Facebook puis plus tard Twitter ont alors étaient des véritables vecteurs de circulation de l'info et de la prise de parole échappant au contrôle des autorités. Au plus fort des évènements, les Tunisiens ont publié sur Facebook les vidéos des massacres des manifestations. Chaque nouvelle, chaque information importante était immédiatement répercutée à des centaines de milliers de personnes sur internet. La toile était alors devenue en Tunisie le seul espace de liberté pour le peuple. Sans ses réseaux sociaux, non seulement le monde n’aurait pas eu vent des massacres de Kasserine, cette ville martyre de l’ouest tunisien mais de plus la mobilisation des manifestants n’aurait pas été possible, ou d’une ampleur bien plus faible[19].
Besson et l’affaire du DM Fail : le mercredi , un message à caractère privé que le ministre Eric Besson voulait envoyer à un de ses contacts Twitter par message directe (DM) s’est retrouvé publié sur son profil par une erreur de manipulation (DM Fail)[20]. Le fameux message «Quand je rentre je me couche. Trop épuisé. Avec toi?» s’est donc retrouvé accessible et lisible par les plus de 13 000 personnes abonnées au compte du ministre de l’Économie numérique (et de tous les autres par le biais des retweets) entrainant l’hilarité et les moqueries des utilisateurs du réseau.
En , aux États-Unis, un sénateur américain new yorkais, Anthony Weiner, a été contraint de démissionner après avoir publié par erreur des photos de lui torse nu sur la sphère publique de Tweater initialement destinées à une femme rencontré en ligne[21]. Anthony Weiner avait d'abord prétendu que son compte Twitter avait été piraté, avant d'avouer sa faute et de démissionner sous la forte pression des politiques et de l’opinion publique.