Pelléas et Mélisande | |
Pelléas et Mélisandepeint par Edmund Leighton (1853–1922). | |
Genre | Opéra |
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Nb. d'actes | 5 |
Musique | Claude Debussy |
Livret | Maurice Maeterlinck |
Langue originale | français |
Durée approximative | environ 3 heures |
Dates de composition | 1893-1902 |
Création | Opéra-Comique, Paris |
Interprètes | sous la direction d'André Messager |
Représentations notables | |
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Pelléas et Mélisande est un opéra en cinq actes (12 tableaux) de Claude Debussy, considéré par le compositeur comme un « drame lyrique ».
Le livret est de Maurice Maeterlinck, d'après sa pièce de théâtre éponyme. La première eut lieu le à l'Opéra-Comique à Paris sous la direction d'André Messager[4].
L'opéra, comme la pièce de Maeterlinck, est une transposition du mythe de Tristan et Yseult : deux jeunes gens sont irrésistiblement amoureux; leur amour est interdit par la présence d'un mari âgé et violemment jaloux et ne peut s'accomplir que dans la mort.
Debussy a déclaré :
« J'ai voulu que l'action ne s'arrêtât jamais, qu'elle fût continue, ininterrompue. La mélodie est antilyrique. Elle est impuissante à traduire la mobilité des âmes et de la vie. Je n'ai jamais consenti à ce que ma musique brusquât ou retardât, par suite d'exigences techniques, le mouvement des sentiments et des passions de mes personnages. Elle s'efface dès qu'il convient qu'elle leur laisse l'entière liberté de leurs gestes, de leurs cris, de leur joie ou de leur douleur. »
Rôle | Voix[5] | Distribution, (Chef d'orchestre : André Messager) |
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Arkel, roi d'Allemonde | basse | Félix Vieuille |
Geneviève, mère de Golaud et Pelléas | contralto | Jeanne Gerville-Réache |
Golaud demi frère de Pelléas | baryton ou baryton-basse | Hector Dufranne |
Pelléas, petit-fils d'Arkel | ténor ou baryton (baryton-martin) | Jean Périer |
Mélisande | soprano ou mezzo-soprano | Mary Garden |
Yniold, fils de Golaud, issu d'un premier mariage | soprano ou soprano enfant | C Blondin |
Un médecin | basse | Viguié |
Un berger | baryton | |
Marins en coulisses (un chœur mixte), femmes de service et trois pauvres |
C’est le choix de la cantatrice écossaise Mary Garden (1874-1967), souhaitée par Debussy et soutenue par le directeur de l’Opéra-Comique, Albert Carré (1852-1938), qui brouilla définitivement le musicien avec Maeterlinck qui voulait imposer sa maîtresse, Georgette Leblanc, lors de la création de l’opéra.
Instrumentation de Pelléas & Mélisande |
Bois |
3 flûtes (la 3e joue aussi le piccolo), 2 hautbois, 1 cor anglais, 2 clarinettes, 3 bassons |
Cuivres |
4 cors en fa, 3 trompettes en fa, 3 trombones, 1 tuba |
Percussions |
3 timbales, cymbales, triangle, glockenspiel, cloche en sol |
Cordes |
premiers violons, seconds violons, altos, violoncelles, contrebasses, 2 harpes |
En collaboration avec le décorateur Ronsin, l'atelier Lucien Jusseaume réalise les décors pour la création[6].
Scène 1 : Une forêt
Golaud rencontre dans une forêt Mélisande en pleurs. Elle est très timide et paraît triste mais ne trahit toutefois pas la raison de son comportement. Golaud l'emmène avec lui.
Scène 2 : Un appartement dans le château
Dans le château, Golaud écrit une lettre à son demi-frère Pelléas. Celui-ci doit introduire une recommandation au roi Arkel afin que Golaud puisse rentrer après six semaines de voyage par mer avec sa deuxième femme Mélisande. La lettre est apportée à Arkel par Geneviève. Pelléas veut quitter le château à cause d'un ami qui est sur le point de mourir. Arkel avait choisi à l'origine une autre femme comme épouse pour Golaud mais soutient toutefois son nouveau choix et son retour.
Scène 3 : Devant le château
Pelléas doit toutefois rester. Geneviève familiarise Mélisande avec son nouvel environnement. Mélisande craint l'obscurité du château et de sa forêt proche. Des voix sont entendues qui proviennent d'un navire en partance. Pelléas et Mélisande se rencontrent.
Scène 1 : Une fontaine dans le parc
Pelléas conduit Mélisande à la fontaine des aveugles dont l'eau permet de retrouver la vue. Mélisande laisse tomber la bague de Golaud dans le puits. À la même seconde, Golaud, dans un autre lieu, tombe de cheval et se blesse. Interlude I, pour orchestre
Scène 2 : Un appartement dans le château
Il remarque que la bague n'est plus là, Mélisande prétend l'avoir perdue dans une grotte. Golaud l'envoie la chercher et ordonne à Pelléas d'aller avec elle.
Scène 3 : Devant une grotte
Pelléas et Mélisande se heurtent dans la sombre grotte à trois misérables formes, sont confrontés à la maladie et à la famine et s'enfuient.
Interlude II, pour orchestre
Scène 1 : Une des tours du château. Un chemin de ronde passe sous les fenêtres de la tour
Mélisande est à la fenêtre et peigne ses cheveux dénoués. Pelléas vient au pied de la tour, s'extasie devant la longue chevelure de Mélisande, s'enroule dedans. Les cheveux de Mélisande s'emmêlent aux branches. Golaud arrive, et surprend la scène. « Vous êtes des enfants » dit-il.
Scène 2 : Les souterrains du château
Golaud a entraîné Pelléas dans les souterrains du château.
Scène 3 : Une terrasse au sortir du château
En remontant à la surface, Golaud ordonne à Pelléas d'éviter Mélisande. Interlude III, pour orchestre
Scène 4 : Devant le château, sous la fenêtre de Mélisande
Sous les fenêtres de Mélisande, Golaud interroge son fils d'un premier mariage, Yniold : « Pelléas et Mélisande sont-ils souvent ensemble ? De quoi parlent-ils ? S'embrassent-ils ? ». Golaud hisse son fils jusqu'à la fenêtre de la chambre où se trouvent Pelléas et Mélisande et lui demande ce qu'ils font (ils sont immobiles et silencieux et regardent la lumière). Yniold s'effraie. Golaud l'entraîne.
Scène 1 : Un appartement dans le château
Pelléas, qui va quitter le château, donne pour le soir à Mélisande un dernier rendez-vous dans le parc, près de la fontaine.
Scène 2 : Un appartement dans le château
Arkel, à qui Mélisande vient rendre visite, exprime à la jeune femme son affection et sa pitié. Golaud survient, blessé au front, et refuse que sa femme le soigne. Il lui réclame son épée, la traîne par les cheveux et la jette à terre.
Interlude IV, pour orchestre
Scène 3 : Une fontaine dans le parc
Yniold essaye de récupérer sa balle d'or coincée dans un rocher et observe un troupeau de moutons.
Scène 4 : le même lieu
Pelléas entre, suivi de Mélisande. C'est le dernier soir. Pelléas et Mélisande échangent un baiser en s'avouant leur amour. On ferme les portes du château : ils se retrouvent empêchés d'entrer. Golaud surgit par derrière un arbre, et frappe Pelléas à mort qui tombe près de la fontaine, tandis que Mélisande s'enfuit.
Scène unique : Une chambre dans le château
Golaud a blessé légèrement Mélisande. Elle a mis au monde une petite fille. Elle a déliré plusieurs jours durant et est mourante à présent. Golaud lui demande pardon et tente, en vain, de lui faire avouer qu'elle fut coupable. Mélisande meurt doucement, en silence.
Depuis le soir de où Debussy a assisté à la représentation de la pièce, il s'est écoulé presque dix ans. La générale, le , qui se déroule en public et salle pleine, donne lieu à réactions et controverses : des rires, des « conversations fiévreuses » — mais nulle présence ou intervention de la police comme on a pu le lire. Le musicologue Denis Herlin cite entre autres l'agenda d’Henri Büsser : « Peu de protestations. […] Debussy est dans le cabinet de Messager où il reçoit visites et félicitations. » Et dans le journal de Büsser, où ce dernier est plus nuancé : « Debussy s’est réfugié dans le bureau de Messager et fume nerveusement cigarette sur cigarette. Conseil de guerre avec Albert Carré et Messager. Nous sommes atterrés de l’accueil fait particulièrement au troisième acte. On a ri quand Mélisande dit : “Je ne suis pas heureuse”, après la scène où Golaud la traîne par les cheveux[8]. »
Dès le lendemain de cette générale — donc la veille de la première —, la censure fait couper des parties de la scène 4 de l'acte 3.
Henri Büsser écrit dans son journal à propos de la première :
« La première représentation reçoit du public un meilleur accueil : trois et quatre rappels par acte. La scène du petit Yniold soulève encore quelques murmures, vite apaisés. Salle enthousiaste pour les deux derniers actes. »
Cette incompréhension n'empêche pas le succès : « Pelléastres » et « contrapuntistes » s'affrontent. Debussy déclare :
« Je ne crois plus à l'omnipotence de votre sempiternel do, ré, mi, fa, sol, la, si, do. Il ne faut pas l'exclure mais lui donner de la compagnie depuis la gamme à six tons jusqu'à la gamme à vingt et un degrés… Avec les vingt-quatre demi-tons contenus dans l'octave, on a toujours à sa disposition des accords ambigus qui appartiennent à trente-six tons à la fois. »
Vincent d'Indy salue et défend Pelléas dans son article de juin 1902 dans la revue L’Occident :
« Quoi qu’il en soit, à quelque genre qu’on veuille ou ne veuille pas rattacher Pelléas et Mélisande, que résulte-t-il de l'audition pour tout esprit débarrassé du parti pris ?…, la sensation d'une très belle œuvre d'art que l'on peut ne pas comprendre tout d'abord — c'est le cas, je l'ai expliqué, de la plupart de critiques professionnels et aussi de bon nombre de musiciens — mais qui n'en éveille pas moins dans l’âme ce frémissement, constatation de beauté, que connaissent bien ceux dont l'enthousiasme artistique n'est point atrophié, et aussi le désir de réentendre, sûr garant de la valeur d'une œuvre[9]. »
1978 : Richard Stilwell (Pelléas), Frederica von Stade (Mélisande), José Van Dam, (Golaud), Ruggero Raimondi (Arkel), Nadine Denize (Geneviève), Christine Barbaux (Yniold) et le chœur de l'opéra de Berlin, Orchestre Philharmonique de Berlin, dirigé par Herbert von Karajan (Enregistrement EMI).
Direction musicale | Direction de la mise en scène | Date | Pelléas | Mélisande | Golaud | Arkel | Yniold | Geneviève | Éditeur |
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John Eliot Gardiner | Pierre Strosser | 1987 | François le Roux | Colette Alliot-Lugaz | José van Dam | Roger Soyer | Françoise Golfier | Jocelyne Taillon | Ediciones del Prado / Arthaus Musik |
Andrew Davis | Graham Vick | 1987 | Richard Croft | Christiane Oelze | John Tomlinson | Gwynne Howell | Jake Arditti | Jean Rigby | Warner |
Pierre Boulez | Peter Stein | 1992 | Neill Archer | Alison Hagley | Donald Maxwell | Kenneth Cox | Samuel Burkey | Penelope Walker | DG |
Franz Welser-Möst | Sven-Eric Bechtolf | 2004 | Rodney Gilfry | Isabel Rey | Michael Volle | László Polgár | Eva Liebau | Cornelia Kallisch | Arthaus Musik |
Bertrand de Billy | Laurent Pelly | 2009 | Stéphane Degout | Natalie Dessay | Laurent Naouri | Philip Ens | Beate Ritter | Marie-Nicole Lemieux | EMI |
John Eliot Gardiner | Stéphane Braunschweig | 2010 | Phillip Addis | Karen Vourc'h | Marc Barrard | Markus Hollop | Dima Bawab | Nathalie Stutzmann | |
Philippe Jordan | Robert Wilson | 2012 | Stéphane Degout | Elena Tsallagova | Vincent Le Texier | Franz Joseph Selig | Julie Mathevet | Anne Sofie von Otter | Idéale Audience |
Maxime Pascal | Benjamin Lazar | 2016 | Marc Mauillon | Jenny Daviet | Laurent Alvaro | Stephen Bronk | Julie Mathevet | Emma Lyrén | BelAir Classiques |
Bien que les autres œuvres de Debussy soient dans le domaine public dans le monde entier, Pelléas et Mélisande est resté protégé jusqu'en 2020 dans l'Union européenne et les autres pays appliquant un délai de 70 ans posthume, le livret étant de Maurice Maeterlinck (mort en 1949).
Le compositeur et chef d'orchestre Marius Constant a adapté l'œuvre en 1983 sous la forme d'une suite symphonique[10],[nb 1].