Vers 1566 : Charles IX fait construire un portique supportant une terrasse perpendiculaire à la Seine relié au pavillon du roi.
: Henri IV fait son entrée triomphale dans Paris. Il réinvestit les demeures de la monarchie abandonnées depuis cinq ans.
1594-1608 : Henri IV fait élever à l'emplacement du portique un bâtiment à deux étages avec comble reliant le pavillon du roi à la Grande Galerie[1]. Il fait aménager une galerie des peintures au premier étage.
1655-1658 : aménagement de l'appartement d'été de la reine-mère Anne d'Autriche par Louis Le Vau au rez-de-chaussée, sous la galerie des peintures[2].
: un incendie détruit la galerie des peintures. Seul le grand portrait de Marie de Médicis par Frans Porbus semble avoir échappé à l'incendie.
1661 : Reconstruction de la Petite Galerie par Louis Le Vau dont la décoration est confiée à Charles Le Brun
En 1566, Charles IX commence les travaux de construction du rez-de-chaussée de la Petite Galerie, perpendiculaire à la Seine, qui servira de point de départ pour la future grande Galerie du bord de l’eau, reliant le Louvre aux Tuileries[Note 1], le long de la Seine[Note 2]. La future Galerie d’Apollon (un étage au-dessus) n’est alors que la terrasse des appartements de Charles IX[Note 3]. C’est lors de la construction de la Grande Galerie, entre 1595 et 1610, sous Henri IV, que la Petite Galerie se dote d’un étage, la Galerie des Rois, avec les portraits des rois et reines de France, la future Galerie d’Apollon. La Galerie des rois offre alors un plafond peint par Toussaint Dubreuil et Jacob Bunel et les portraits des rois ainsi que ceux d’hommes illustres, sont réalisés par Jacob Bunel, les portraits des reines ont été peints par Marguerite Bahuche, sauf celui de Marie de Médicis qui est dû à Frans Pourbus le Jeune.
Le , un incendie se déclenche dans la Petite Galerie lors du montage d’une scène pour un ballet ; l’étage et ses décors sont dévastés.
Louis XIV et la naissance de la Galerie d’Apollon (1661-1679)
Après l'incendie du , il est nécessaire de reconstruire cette partie du Louvre, fortement endommagée. Les travaux architecturaux sont confiés à Louis Le Vau, qui les réalise entre 1661 et 1663, tandis que Charles Le Brun est chargé par Colbert d'élaborer le programme décoratif. Il s'agit de la première galerie royale destinée à Louis XIV, qui servira de modèle à la galerie des Glaces du château de Versailles vingt ans plus tard.
La galerie d'Apollon est une pièce du palais du Louvre (aile Denon, 1er étage, salle 705), prototype du classicisme français tel qu'on le retrouvera à Versailles.
Le programme décoratif de Le Brun suit un rythme extrêmement complexe, marqué par l'illusionnisme. Les thèmes retenus sont :
La course du soleil.
Une course dans le temps, à travers l'iconographie des heures, mais aussi du zodiaque.
Une course dans l'espace, via les références à la terre, l'eau et le monde.
Des médaillons, des tableaux et des atlantes font également référence au thème de l'année.
Ce programme iconographique, que Le Brun n'a pas eu le temps de mettre en œuvre en totalité, fait référence aux bienfaits du soleil, éternels et universels, et par derrière, évidemment, aux vertus et à l'immortalité de Louis XIV. Il s'agit donc d'une nouvelle forme donnée à un sujet traditionnel, avec un goût certain pour l'illusionnisme et l'exubérance.
Voulu par Charles Le Brun, on trouve à chaque extrémité de la galerie un des quatre éléments : au nord, la terre (Le Triomphe de la Terre ou Le Triomphe de Cybèle (1850) de Joseph-Benoît Guichard,1806-1880)[Note 4], au sud, l'eau (Le Triomphe de Neptune et d’Amphitrite de Charles Le Brun) , et au centre, la gloire d'Apollon (Apollon terrassant le serpent Python par Eugène Delacroix[Note 5]).
La course du soleil est représentée par deux toiles laissées par Le Brun : Le Soir ou Morphée (entre 1664 et 1677) et La Nuit ou Diane (également entre 1664 et 1677).
Entre 1667 et 1670, Jacques Gervaise peint la majorité des douze médaillons représentant les mois de l'année, placés à la base de la voûte, sur chacun des côtés.
Entre 1666 et 1670, Léonard Gonthier[Note 6] (vers 1625-1701) peint, dans l’axe longitudinal du plafond, 6 ensembles de grotesques qui séparent les compartiments réservés aux peintures grand format et qui représentent les dieux des planètes.
La réalisation des stucs sera confiée à quatre sculpteurs : François Girardon pour le quart sud-ouest des murs latéraux, Gaspard Marsy pour le quart nord-ouest, Balthazar Marsy (frère de Gaspard) pour le quart nord-est, Thomas Regnaudin pour le quart sud-est. Ils travailleront sur le projet de 1663 à 1667, sur les modèles fournis par Le Brun.
Des deux côtés de chaque voussure des extrémités, quatre stucs représentent chacun un groupe de deux captifs assis, adossés à un trophée d’armes, symbolisant les quatre continents que parcourt le soleil dans sa course journalière :
Gaspard Marsy, Les Captifs d’Afrique (1663-1664), dans le quart nord ouest,
François Girardon, Les Captifs d’Asie (1663-1664), dans le quart sud-ouest,
Thomas Regnaudin, Les Captifs d’Europe (1663-1664), dans le quart sud-est,
Balthazar Marsy, Les Captifs d’Amérique (1663-1664), dans le quart nord-est.
Six sculptures, positionnées en avant de certaines peintures de la voûte, représentent successivement l'Hippocrène et chacune des neuf muses :
Aux extrémités nord et sud :
Associé à la peinture de Le Brun (Amphitrite), au sud, un stuc de Girardon L’Hippocrène, fleuve du Parnasse[Note 7](1665) : l'Hippocrène tient une rame et l'un des deux petits génies se désaltère de l'eau de l'Hippocrène avec une écuelle.
Associé au cartouche où sera placée la peinture de Joseph Guichard (Le Triomphe de la terre, 1850), au nord, un stuc de Gaspard Marsy, Calliope (1663-1665) : la muse Calliope, muse de l’Éloquence et de la poésie héroïque, est entourée de deux petits génies ; elle tient une trompette d’une main et de l’autre un livre.
Au niveau des murs ouest et est :
Au nord-est, associé au cartouche où sera placée la peinture d'Antoine-François Callet (Le Printemps ou Zéphire et Flore couronnant Cybèle de fleurs, 1780-1781), un stuc de Balthazar Marsy, Terpsichore et Polymnie (1663-1665) : Terpsichore, muse de la Danse, joue de la lyre, et Polymnie, muse de la Rhétorique et du chant, tient dans ses mains des rouleaux de papier ou des parchemins.
Au nord-ouest, associé au cartouche où sera placée la peinture de Jean-Jacques Lagrenée (L’Hiver ou Éole déchainant les vents qui couvrent les montagnes de neige, 1775), un stuc de Gaspard Marsy, Uranie et Erato (1663-1665) : Uranie, muse de l’Astronomie, tient dans sa main droite un compas pour prendre des mesures sur le globe terrestre et Érato, muse de la Poésie lyrique et érotique, partiellement dénudée, joue de la lyre.
Au sud-ouest, associé au cartouche où sera placée la peinture de Louis Jean-Jacques Durameau (L’Été ou Cérès et ses compagnons implorant le soleil, 1774), un stuc de Girardon, Melpomène et Thalie (1663-1665) : Melpomène, muse du Chant et de la tragédie, est coiffée d’une couronne et tient un sceptre (qui font partie de ses attributs) et Thalie, muse de la Comédie, tient un masque pour évoquer le théâtre.
Au sud-est, associé au cartouche où sera placée la peinture de Hugues Taraval (L’Automne ou Le Triomphe de Bacchus et d'Ariane, 1769), un stuc de Regnaudin, Euterpe et Clio (1663-1665) : Euterpe, muse de la Musique, tient une flûte et Clio, muse de l’Histoire, tient une couronne et s'appuie sur des livres.
Les quatre groupes de captifs de la voûte du plafond de la Galerie d'Apollon
Repère 1 : Gaspard Marsy, Les Captifs d’Amérique.
Repère 2 : Thomas Regnaudin, Les Captifs d’Europe.
Repère 3 : Balthazar Marsy, Les Captifs d’Afrique.
Repère 4 : François Girardon, Les Captifs d’Asie.
Les neuf muses et Hippocrène sur la voûte du plafond de la Galerie d'Apollon
Repère 5 : Gaspard Marsy, Calliope (1663-1665).
Repère 6 : François Girardon, L’Hippocrène fleuve du Parnasse (1665).
Repère 7 : Balthazar Marsy, Terpsichore et Polymnie (1663-1665).
Repère 8 : Thomas Regnaudin, Euterpe et Clio (1663-1665).
Repère 9 : Gaspard Marsy, Erato et Uranie (1663-1665).
Repère 10 : François Girardon, Melpomène et Thalie (1663-1665).
Sur la base de cartons établis par Le Brun, treize tapis de haute lisse furent commandés à la Manufacture de la Savonnerie, alors dirigée par Simon Lourdet (vers 1590-1667), dans le but de recouvrir la totalité du plancher de la Galerie. Longs de plus de neuf mètres (correspondant à la largeur de la Galerie), ils reprenaient la composition en compartiments du plafond, en particulier, en leur centre, la forme des compartiments à grotesques, renforçant ainsi l’unité de l’ensemble. Ces tapis ont été livrés en 1667. Ils sont aujourd’hui, soit disparus, soit dispersés : deux fragments du grand tapis central sont conservés, l’un à Notre-Dame de Paris, l’autre aux Gobelins. Trois exemplaires sont au musée du Louvre et au Mobilier national[Note 8].
Sur le tapis conservé au Louvre (département des Objets d'art, aile Sully, premier étage, salle 604), on peut comparer la partie centrale du tapis avec les compartiments à grotesques (voir ci-dessous) :
Un des tapis de la Galerie d'Apollon, comparaison avec les compartiments des grotesques du plafond
Tapis de la Manufacture de la Savonnerie (1664-1667), d'après Charles Le Brun, fabriqué pour la Galerie d'Apollon.
Partie centrale du tapis, permettant la comparaison avec un compartiment à grotesques du plafond de la galerie d'Apollon.
L'avant-dernier compartiment à grotesques en partant du côté nord.
L'Académie royale de peinture et de sculpture, installée au Louvre en 1692, entreprend rapidement de combler les vides du plafond, encore inachevé. Ainsi, celui-ci sert notamment à la peinture des « morceaux de réception », grâce auxquels les nouveaux membres intégraient l'académie. Le travail devant porter sur le thème des saisons et de L'Étoile du matin, le plafond sera complété par les œuvres de Jean-Hugues Taraval (L’Automne ou Le Triomphe de Bacchus et d’Ariane, 1769), Louis Durameau (L'Été ou Cérès et ses compagnes implorant le soleil, 1774), Jean-Jacques Lagrenée le jeune (L’Hiver ou Éole déchaînant les vents qui couvrent les montagnes de neige, 1775), Antoine François Callet (Le Printemps ou Zéphyr et Flore couronnant Cybèle, 1780-1781), Antoine Renou (L'Étoile du matin ou Castor, 1781).
En 1848, la restauration de la galerie est confiée à l'architecte Félix Duban. Il s'emploie avec succès à rétablir la cohésion de la structure très fragilisée, particulièrement du côté de la Seine. Duban renforce les points affaiblis ou fissurés de la voûte en berceau.
Il commande notamment trois toiles, laissées à l'état de croquis par Le Brun, aux plus grands peintres contemporains : Delacroix (Apollon terrassant le serpent Python) , Muller (Aurore) et Guichard (Triomphe de la Terre ou de Cybèle).
Vingt-huit portraits de souverains et d'artistes ornent les lambris de la Galerie, sous forme de tapisseries provenant de la manufacture nationale des Gobelins. Ils ont fait l'objet d'une étude par Duban mais sont réalisés entre 1851 et 1861[5], donc après son départ. Ils représentent des artistes ou hommes d'État qui ont concouru, d’une manière ou d’une autre, à l’édification du Louvre et des Tuileries.
Les 28 tapisseries[Note 9] mesurent 2,16 m de haut et 1,33 m de large, sauf les 4 tapisseries représentant des souverains au centre de la galerie (2,28 × 2,40 m). Les personnages représentés sont :
L'inauguration a lieu le , avant l'achèvement du travail de Delacroix. Ce chantier très délicat lance véritablement la carrière de Duban qui est nommé pour de longues années, à la suite et aussi grâce à François Debret, architecte de l'École des beaux-arts de Paris.
Entre 2002 et 2004, la galerie est restaurée par plus de 50 restaurateurs. L'objectif de l'intervention est d'harmoniser les œuvres entre elle. Elles présentent divers degrés de dégradation, rendant l'ensemble disparate. Le parti est pris d'une restauration plutôt illusionniste qu'archéologique.La restauration a vocation à se rapprocher au maximum de l'état du XIXe siècle après le chantier de Félix Duban, considéré l'état le plus complet[6].
↑F. de Clarac, Musée de sculpture antique et moderne ou description historique et graphique du Louvre et de toutes ses parties, t. II, 1841, Imprimerie royale, Paris.
↑Ce tableau avait été conçu par Lebrun pour l'extrémité nord de la Galerie : Cybèle, déesse personnifiant la terre, est sur son char traîné par deux lions. C'est Joseph Guichard, qui compléta le compartiment vierge deux siècles plus tard en reprenant les indications laissées par Lebrun.
↑ Bien que cette toile n'ait été réalisée qu'au XIXe siècle, elle était déjà prévue par Le Brun.
↑Tableau de Paris, Edmond Auguste Texier, Paris, 1853 Lire en ligne.
↑Pierre Boulanger par Raymond Subes, Presses du Compagnonnage, Paris, 1961.
↑Atelier Arcanes, « Dossier de Presse » [PDF], sur Arcanes.eu (consulté le )
↑La Galerie d'Apollon, Paris, Faton, coll. « Dossier de l'art » (no 120), , 72 p.
La version du s'appuie entre autres sur la fiche de présentation disponible dans la Galerie d'Apollon et sur le dossier de presse réalisé à l'occasion de la réouverture de la Galerie en .
Vladimir Nestorov, « Petits maîtres et grands travaux. La foule des peintres dans le Louvre d'Henri IV », dans Mathilde Legeay, Jessy Jouan (dir.), Les artistes secondaires en France et en Italie du XIIe au XIXe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2024, p. 133-147.
Jérôme Prieur, Le Réveil d'Apollon, film documentaire tourné durant la restauration de la Galerie d'Apollon (85 min), édition DVD Musée du Louvre-RMN-Arte France-Gédéon programmes, 2004