Paul Michel Audiard naît au 2 de la rue Brézin[5], le , dans le 14e arrondissement de Paris, quartier populaire alors, où il est élevé par son parrain. Il y poursuit sans grand intérêt des études qui le mènent jusqu'au certificat d’études et à un CAP de soudeur à l’autogène.
Passionné de littérature et de cinéma, il se forge une solide culture, lisant Rimbaud, Proust et Céline, et découvre les dialogues de Jeanson et Prévert. Passionné également de bicyclette, il traîne du côté du vélodrome d'Hiver où il rencontre André Pousse qu'il introduira au métier d’acteur. Songeant un temps à faire carrière dans le vélo, il y renonce car il « ne montait pas les côtes ».
Il a à peine vingt ans quand l'armée du Troisième Reich déferle sur la France. La Seconde Guerre mondiale, à laquelle il ne participe pas, est pour lui une période de privation et la Libération le spectacle de tristes règlements de comptes.
Sous l'Occupation, il écrit dans plusieurs hebdomadaires collaborationnistes et antisémites[6]. Grâce à l'appui de Robert J. Courtine, il publie dans L'Appel de Pierre Costantini des nouvelles et des articles de critique littéraire en 1943 et 1944. Dans l'une de ses premières nouvelles, Le Rescapé du Santa Maria (1943), deux personnages sont juifs et le texte est marqué par des stéréotypes et un vocabulaire antisémites. Dans un article de 1944, il qualifie Joseph Kessel de « petit youpin ». Il publie aussi dans L’Union française un article élogieux sur le livre Autopsie des spectacles de Jean-Pierre Liausu, antisémite notoire. Dans cet article, il écrit : « Le monde qu'il est convenu d'appeler "artistique" et qui demeure dans sa majorité le plus coquet ramassis de faisans, juifs (pardonnez le pléonasme), métèques, margoulins… »[7],[8],[9],[10]. Dans un autre article de L'Appel, il se moque de la « poésie liquéfiante de dame Cocteau »[11].
Cependant, à partir de , il aurait été agent occasionnel du réseau de Résistance Navarre, tel qu'en témoigne une attestation du liquidateur du réseau, le capitaine Grolleau[12],[13].
Une fiche d'adhésion au groupe Collaboration qui rassemblait les élites intellectuelles collaborationnistes porte son nom. Convoqué au commissariat du quartier du Parc-de-Montsouris, le , il affirme que cette inscription s'est faite à son insu, justification qu'il répète en 1978[14].
Le , il épouse Marie-Christine Guibert (morte le 17 janvier 2022 à 94 ans) en l'église Saint-Dominique de Paris (Paris 14e). Avec « Cri-Cri », il aura deux garçons : François (1949-1975) et Jacques (né le ). Bien que toujours marié, il a, en 1953, un troisième garçon — non reconnu — Bruno Meynis de Paulin, qui écrit en 2004 Être le fils de Michel Audiard sous le nom de plume Bruno M. (éd. Michel Lafon).
Au lendemain de la guerre, il vivote comme livreur de journaux, ce qui lui permet d’approcher le milieu du journalisme. Il entre à l’Étoile du soir où il commence une série d'articles sur l'Asie rédigés sur des comptoirs de bistrots parisiens. La découverte de l'imposture lui valant d'être rapidement remercié, il devient alors critique de cinéma pour Cinévie.
En 1968, il entame une carrière de réalisateur et tourne des films dont les titres sont parmi les plus longs du cinéma français : Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages, Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas, mais… elle cause !. Son premier film comme réalisateur, Faut pas prendre les enfants du bon Dieu..., est un succès commercial, mais l'accueil du public va déclinant et lui-même est peu convaincu par cette expérience. Après huit films de fiction et un documentaire, il revient à sa véritable vocation de dialoguiste et de scénariste.
Le , alors qu’il travaille avec le réalisateur Philippe de Broca au scénario de L'Incorrigible, il est durement touché par la mort d'un de ses fils, François, tué dans un accident de voiture. Il en conserve une profonde tristesse qui donnera à son œuvre une tonalité plus sombre (Garde à vue et Mortelle Randonnée de Claude Miller), même s’il continue par ailleurs à participer à de gros succès populaires (Tendre Poulet, Le Guignolo, Le Professionnel). En 1978, il publie un roman en partie autobiographique, La nuit, le jour et toutes les autres nuits, pour lequel il reçoit le prix des Quatre jurys. Il y écrit au sujet de la mort de son fils dans un accident de la route, « ... depuis qu'une auto jaune a percuté une pile de pont sur l'autoroute du Sud et qu'un petit garçon est mort ». Il obtient la reconnaissance de ses pairs en remportant le César du meilleur scénario en 1982 pour Garde à vue.
Les dialogues des films scénarisés par Michel Audiard font l'objet d'un véritable culte populaire, comme en témoigne le nombre de sites web consacrés au sujet.
Son petit-fils, Marcel Audiard (fils de François) publie en 2017 un roman dont le titre, Le Cri du corps mourant[20], est un clin d'œil à l'un de ses films.
Une place dans le 14e arrondissement de Paris porte son nom.
Chaque fois qu'un innocent a l'idée de monter un chef-d'œuvre, le chœur des cafards entre en transe…, Chroniques cinématographiques, 1946-1949, éd. établie, présentée et annotée par Franck Lhomeau, Joseph K., 2020.
Michel Audiard et Georges Simenon, Le Sang à la tête, Maigret tend un piège, Le Président, scénarios édités, présentés et annotés par Benoît Denis, Institut Lumière/Actes Sud, 2020.
Ça ne me regarde pas, Reportages, nouvelles et contes inédits, 1946-1947, éd. établie, présentée et annotée par Franck Lhomeau, Joseph K., 2021.
Michel Audiard et Albert Simonin, Le Cave se rebiffe, Mélodie en sous-sol, Les Tontons flingueurs, scénarios édités, présentés et annotés par Franck Lhomeau, Institut Lumière/Actes Sud, 2021.
Michel Audiard réalisateur, scénarios écrits avec Jean-Marie Poiré, Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages, Le Cri du cormoran le soir au-dessus des jonques, Comment réussir quand on est con et pleurnichard, scénarios édités, présentés et annotés par Thibaut Bruttin, Institut Lumière/Actes Sud, 2022.
Michel Audiard-Jean Herman/Vautrin, Flic ou Voyou, L'Entourloupe, Garde à vue, scénarios édités, présentés et annotés par Thibaut Bruttin, Actes Sud/Institut Lumière, 2023
↑Isabelle Blondel, Olivier Delacroix, Alice Develex, Nicolas d'Estienne d'Orves, Bertrand Guyard, Colette Monsat, Marie-Noëlle Tranchant et Florence Virerron, « Si le Paname d'Audiard m'était conté », Le Figaroscope, semaine du 10 au 16 mai 2017, pages 8-10.
Philippe Durant, Michel Audiard, La vie d'un expert (Dreamland éditeur, Paris 2001) ; réédition revue, corrigée et augmentée de nombreuses interviews inédites parue sous le titre Michel Audiard ou comment réussir quand on est un canard sauvage (Le Cherche Midi, Paris 2005)
Michel Audiard, Audiard par Audiard (édition La mémoire du cinéma français/René Chateau, 400 p., Paris 2000)
Philippe Durant, Le Petit Audiard illustré par l'exemple (Nouveau Monde, Paris 2011)
Stéphane Germain, L'Encyclopédie Audiard (Hugo&Cie, Paris 2012)
Philippe Lombard, Le Paris de Michel Audiard : Toute une époque, Paris, éd. Parigramme, , 128 p., 28 cm (ISBN978-2-84096-991-4, BNF45203000).
Le dépôt légal à la BnF est fait au nom de la Compagnie parisienne du Livre, raison sociale à laquelle se rattache la marque commerciale « Éditions Parigramme ».
Marion Froger, « Histoire et panache dans le cinéma de Michel Audiard au tournant des années 1960 (1958-1964) », Études françaises, vol. 47, no 1, , p. 75-91 (lire en ligne)
Franck Lhommeau, « La Vérité sur l'affaire Audiard », Temps Noir, no 20, , p. 200 à 311
« Michel Audiard, le mauvais esprit : dossier », Revue des deux mondes, juillet-août 2022, p. 19-105
Fabrice Defferrard, Les lois de Michel Audiard - Liberté, Fraternité, Égalité, collection Droit & Cinéma, Éditions Mare & Martin, 2021