Jean Eudes | |
Saint, prêtre, fondateur | |
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Naissance | Ri, Orne, royaume de France |
Décès | (à 78 ans) Caen, Calvados, royaume de France |
Nationalité | Française |
Ordre religieux | fondation de la Congrégation de Jésus et Marie et de l'Ordre de Notre-Dame de Charité |
Béatification | 25 avril 1909 |
Canonisation | 31 mai 1925 par Pie XI |
Vénéré par | Église catholique |
Fête | 19 août |
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Jean Eudes, né le à Ri, en Normandie (France) et mort le à Caen (France), est un prêtre français oratorien, fondateur d'un institut religieux consacré à la formation des prêtres, et d'un ordre religieux voué à la réhabilitation des « filles repenties ».
À l'origine de plusieurs séminaires dans sa Normandie natale, il est un artisan de l'introduction des réformes du concile de Trente, en France, ainsi qu'un acteur majeur de l'École française de spiritualité. Il a été canonisé par le pape Pie XI en 1925.
Il est au XVIIe siècle le grand propagandiste du culte au Sacré-Cœur de Jésus et au Cœur immaculé de Marie.
Jean Eudes est né le à Ri, près d'Argentan, en Normandie. Il est le fils aîné d'Isaac Eudes et de son épouse, Martha Corbin. Son père, qui se destinait à la prêtrise, y renonça pour s'occuper du domaine fieffé à ses ancêtres, seul survivant de sa famille anéantie par la peste de 1857. Jean, voué à la Vierge Marie par ses parents[N 1], a quatre sœurs et deux frères, dont l'historien François Eudes de Mézeray (1610-1683).
Enfant, il reçoit les premiers enseignements de sa formation religieuse et intellectuelle dans l'école d'un prêtre du voisinage : Jacques Blanette[1].
Après avoir accompli ses humanités au collège des Jésuites de Caen où il entre directement en 4e année grâce à sa formation antérieure, Jean Eudes est admis, le , dans la toute récente Société de l'oratoire de Jésus de France, rue Saint-Honoré, à Paris, où il est accueilli par le fondateur, le cardinal Pierre de Bérulle. Ordonné prêtre le , il célèbre le 25 de ce mois, jour de Noël, sa première messe, avant de poursuivre ses études théologiques dans la communauté oratorienne d'Aubervilliers[2].
Revenu en 1627 en Normandie, il est d'abord envoyé dans la région de Vrigny (diocèse de Sées), touchée par la peste. A la fin du fléau, il est assigné à l'Oratoire de Caen où il passe cinq années à se préparer à la vie de missionnaire. En 1631, la peste apparaît à Caen : il repart au secours des pestiférés et assiste dans leurs derniers moments son supérieur et deux de ses confrères atteints par le fléau. En 1632, il est envoyé aux missions dans le diocèse de Coutances. De retour à Caen, il reprend sa vie d'étude et de prière pour se remettre en mission dans le diocèse de Bayeux en 1635, notamment dans la paroisse de Fresne où il introduit l'usage de la prière en commun. Il publie à la fin de l'année l'opuscule Exercice de piété afin d'enraciner cette pratique. Il part ensuite en mission dans le diocèse de Saint-Malo l'année 1636. L'année suivante, il publie La vie et le royaume de Jésus dans les âmes chrétiennes, ouvrage qui rencontre une grande popularité. Grâce à « la limpidité, l'exactitude, la simplicité, la lucidité » qui le caractérisent et « qu'un enfant pourrait comprendre », il vulgarise ainsi la doctrine oratorienne[1]. Il poursuit ses missions dans le Calvados et la Manche et c'est à Coutances qu'il rencontre en août 1941 Marie des Vallées dont il écrira la Vie en 1655[3]. En janvier 1642, il est envoyé à Rouen et établi « chef de toutes les missions de la province de Normandie » par l'évêque de Rouen, François Harlay de Champvallon[1].
S'il échappe à l'épidémie de peste de 1627-1631, il découvre lors de ce fléau l'abandon matériel et spirituel dans lequel vivent les campagnes. De ce constat, il tire une priorité pour son apostolat : pour rechristianiser la société, il faut former des prêtres capables de tenir une paroisse rurale ou de prêcher des missions populaires. Rencontrant ainsi les directives du concile de Trente concernant la formation du clergé, il quitte, le , la communauté de l'Oratoire de Caen, dont il était le supérieur, pour ouvrir un séminaire dans cette même ville. À cet effet, il regroupe sept prêtres chevronnés, des missionnaires capables de devenir des formateurs, et fonde, le de la même année, avec l'approbation de l'évêque de Bayeux, une société de prêtres voués tant à la formation des séminaristes et du clergé qu'aux prédications populaires dans les paroisses : la congrégation de Jésus et de Marie, dite des Eudistes[4]. De Caen, les séminaires eudistes essaimeront, du vivant de leur fondateur, à Coutances, Lisieux, Rouen, Évreux et Rennes[5].
Dès 1634, Jean Eudes songe à établir à Caen un « refuge » pour les « filles repenties », c'est-à-dire des femmes désireuses de quitter le libertinage ou la prostitution. C'est chose faite en 1641, grâce à l'assistance de membres de la Compagnie du Saint-Sacrement, avec la création de Notre-Dame du Refuge[6]. Quelque temps plus tard, il confie cette œuvre à des religieuses, et crée, avec l'assistance des Visitandines de Caen, un institut qui deviendra l'ordre de Notre-Dame de Charité, reconnu le par l'évêque de Bayeux, Mgr Molé, et par une bulle pontificale d'Alexandre VII, le . Du vivant du fondateur, s'établissent, en plus de celui de Caen, les monastères bretons de Rennes (1673), d'Hennebont et de Vannes (1676)[7].
À sa mort, le à Caen, Jean Eudes aura prêché cent dix missions, entre 1632 et 1676, dont quatre-vingt-dix en Normandie, principalement dans le diocèse de Coutances. Ces missions populaires avaient pour but de rallumer la foi ou la ferveur catholique dans les paroisses. Chacune d'entre elles durait à peu près un mois et demi. Les matinées étaient consacrées à la prédication, les après-midi au catéchisme ou à des conférences. En plus de ces activités, le missionnaire confessait la population[8].
Jean Eudes a également prêché devant la reine-mère Anne d'Autriche, qui l'appréciait beaucoup. Quant à Louis XIV, après avoir soutenu la fondation de la congrégation de Jésus et Marie, il le suspecte d'hostilité à sa politique gallicane, entre 1674 et 1679[9]. Enfin, il se signale par son activité en faveur du culte des Cœurs de Jésus et de Marie : en 1648, au cours d'une mission à Autun, il fait célébrer, avec l'approbation de l'évêque, la messe et l'office du Cœur de Marie, dont il a composé la structure ; il fait de même, à Caen et dans quatre autres de ses séminaires, en 1672, pour la messe et l'office du Cœur de Jésus[10].
En 1909, Pie X le décrit comme « père, docteur et apôtre des cultes liturgiques des Cœurs de Jésus et de Marie »[11].
Après sa mort, le corps de Jean Eudes est inhumé dans l'église des Très-Saints-Cœurs-de-Jésus-et-Marie du séminaire des Eudistes de Caen[12]. En 1810, ses ossements sont transférés à Notre-Dame-de-la-Gloriette. Depuis le , ils se trouvent dans la crypte sous le transept sud de cette ancienne église des Jésuites[13].
Jean Eudes a été béatifié par Pie X en 1909, et canonisé par Pie XI en 1925. Sa fête se célèbre le .
Le à l'occasion de la session plénière de la Conférence des évêques de France, Michel Dubost a annoncé le soutien de la conférence pour la cause de saint Jean Eudes comme Docteur de l'Église[14]. En , Luc Crepy, évêque du Puy-en-Velay, a rencontré le pape François en audience privée pour soutenir cette cause[15].
Comparé à son maître, Bérulle, Jean Eudes est un missionnaire plus qu'un métaphysicien. Lorsqu'il s'agit de choisir des formateurs pour son séminaire, il ne recrute pas des docteurs en Sorbonne, mais des praticiens aguerris[5]. Dès lors, s'il reste fidèle aux caractéristiques fondamentales de la mystique bérullienne, il les reprend dans une perspective pastorale et se concentre sur ce qui lui paraît essentiel : l'engagement baptismal, l'humilité dans la disposition à Dieu, l'union spirituelle aux intentions de Jésus (les « états » chez Bérulle), la piété mariale, l'empreinte sacerdotale[16].
Ces différents éléments se condensent dans une image accessible et évocatrice : la dévotion au Cœur de Jésus et de Marie. « Dévotion » ne désigne pas ici un exercice de piété purement personnel : Jean Eudes milite pour un culte liturgique, c'est-à-dire une célébration collective ; de plus, le terme doit être pris au sens premier d'obéissance et d'engagement. Quant au « cœur », il ne désigne ni l'organe ni le siège des sentiments, mais bien, au sens biblique, « l'intériorité spirituelle et morale, porteuse de l'énergie de la volonté ». C'est pourquoi Jean Eudes utilise une expression qui ne dissocie pas, sur ce point, Jésus et Marie, puisque leurs dispositions intérieures convergent au service de la Trinité.
En ce sens, peut-être est-il également possible d'y voir une allusion ecclésiologique : les Actes des Apôtres n'affirment-ils pas que les premiers chrétiens ne formaient qu'un seul cœur ? Quelques années avant Marguerite-Marie Alacoque, Jean Eudes propage ainsi, dans ses prédications comme dans ses ouvrages, le culte du Sacré-Cœur, sans exploiter cependant l'idée de réparation victimaire qui sera centrale dans les apparitions de Paray-le-Monial[17].
Après avoir combattu le jansénisme au XVIIIe siècle, l'institut des eudistes est supprimé lors de la Révolution française, puis reconstitué en 1826. La maison généralice est à Rome. Les eudistes sont présents en Amérique du Nord (Collège Jean-Eudes à Montréal et l'Externat Saint-Jean-Eudes à Québec), Amérique centrale et Amérique du Sud, ainsi qu'en Afrique.
L'ancien séminaire de Caen portait le nom de séminaire Saint-Jean Eudes[18].
À Québec, Charlesbourg, il existe aussi une école secondaire « Saint-Jean-Eudes ».
Le quartier Saint Jean Eudes-Saint Gilles est l'un des vingt quartiers de Caen. L'église Saint-Jean-Eudes : l'église est construite entre 1933 et 1944[19]. Les plans initiaux prévoyaient un bâtiment de 20 mètres de large sur 54 mètres de long. Mais des difficultés financières liées à la guerre et la nature du sol ont obligé à réduire la longueur de moitié. Une fresque de 7 mètres sur 5,50 commandée par le curé en 1941 orne l'entrée. Elle représente la vie de saint Jean Eudes.
R.P. Emile Georges, Saint Jean Eudes, Paris, P. Lethiellieux, libraire-éditeur, , 540 p.