Né d'une famille de petits commerçants d'origine provençale, Maurice Rouvier fait des études de commerce aux classes commerciales du lycée de Marseille, actuel lycée Thiers[1]. Parce qu'il y côtoyait l'héritier de la dynastie bancaire marseillaise Zafiropoulos, il y devient employé à la sortie du lycée[2].
Il fait rapidement une brillante carrière. Il organise avec Gaston Crémieux la Ligue de l'Enseignement, collaborant en même temps au Peuple puis au Rappel de la Provence, journaux démocratiques marqués à l'extrême gauche, soutenant Léon Gambetta à Marseille puis créant le journal L'Égalité. Il est de la première insurrection contre l'hôtel de ville en [3].
Il est élu député le sur une liste de conciliation entre républicains et radicaux. Inscrit à l'Union républicaine, il œuvre contre l'exécution de Gaston Cremieux, écrivant contre la commission des grâces et emboîtant le pas à Francisque Ordinaire. Il est de ce fait menacé de poursuites en 1872.
Soutenant Thiers, il vote les lois constitutionnelles de 1875. Réélu en 1876, il dépose un projet d'amnistie partielle en faveur des communards. La même année, il devient secrétaire de la Chambre. Réélu en 1877, il soutient — quoiqu'à gauche — la politique scolaire et coloniale des ministères républicains. Réélu en 1881, il demande la séparation de l'Église et de l'État. Le de cette même année, il accepte le portefeuille du Commerce et des Colonies dans le ministère Gambetta, ministère prenant fin le .
Maurice Rouvier devient alors proche des milieux d'affaires et se lie avec Jacques de Reinach. Du au , il est ministre du Commerce dans le gouvernement de Jules Ferry.
Le , Jules Grévy le nomme président du Conseil. Rouvier prend également le ministère des Finances, des Postes et du Télégraphe. À la suite du scandale des décorations, il remet sa démission à Sadi Carnot, qui a succédé à Jules Grévy. Il devient également président de l'Union des gauches puis, en tant que président de l'Association nationale républicaine, contribue à la lutte contre le boulangisme. Il participe ensuite au second gouvernement de Pierre Tirard, le , dans lequel il est ministre des Finances. Il reste en place jusqu'au (cabinets Charles de Freycinet, Émile Loubet et Alexandre Ribot)[7]. En 1892 – 1893, alors ministre des Finances, il est mis en cause lors du scandale de Panama[8]. Il démissionne ; l'assemblée vote la levée de son immunité parlementaire[9]. Un non-lieu lève les soupçons le et il est réélu à Grasse la même année puis en 1898.
Maurice Rouvier redevient ministre des Finances le , dans le ministère d'Émile Combes. Le , il quitte la Chambre pour le Sénat. Après la démission du ministère Combes, dont la majorité s'est affaiblie à la suite de l'affaire des fiches, et le triomphe du bloc des gauches, Rouvier forme son propre cabinet. À cette occasion, Clemenceau l'avertit : « Ce n'est pas un conseil de ministres, c'est un conseil d'administration ! »[10].
Du au , il dirige deux cabinets successifs[11]. Son gouvernement est renversé à la suite des troubles provoqués par la crise des inventaires[12].
C'est en tant que ministre de l'Instruction publique, des Beaux-arts et des Cultes qu'il signe la loi dite de « séparation des Églises et de l'État » du , loi faisant la réputation d'Aristide Briand[9].
Maurice Rouvier meurt le à l'âge de 69 ans dans son hôtel particulier de Neuilly-sur-Seine[13]. Sa tombe se trouve au cimetière ancien de cette commune[14].
D'abord proche d'Esquiros, de Crémieux et de Léon Gambetta, Maurice Rouvier est caractéristique des républicains opportunistes. Son évolution vers les milieux d'affaires, en fait un libéral favorable au libre-échange.
Républicain, il s'est également engagé en franc-maçonnerie[15].
Ministre du Commerce lors du gouvernement Léon Gambetta en 1881 – 1882 (ce portefeuille était rattaché lors des précédents gouvernements de la Troisième République au ministère de l'Agriculture).
C.-J. Gignoux, Rouvier et les Finances, Paris, Gallimard, 1931.
Jean Garrigues, La République des hommes d'affaires, Paris, Aubier, 1997.
Jérôme Grévy, La République des opportunistes, 1870-1885, Paris, Perrin, 1998, 415 p.
Jean-Yves Mollier, Le Scandale de Panama, Paris, Fayard, 1991, 564 p.
Benoît Yvert (dir.), Premiers ministres et présidents du Conseil. Histoire et dictionnaire raisonné des chefs du gouvernement en France (1815-2007), Paris, Perrin, 2007, 916 p.
Tribunal correctionnel de la Seine, Procès Rouvier : compte rendu sténographique [Paris, 1876]
↑Jacques-François Béguin, « Maurice Rouvier (1842-1911) », Annuaires de l'École pratique des hautes études, vol. 130, no 13, , p. 271–276 (DOI10.3406/ephe.1999.10766, lire en ligne, consulté le )
↑Benoît Yvert (dir.), Premiers ministres et Présidents du Conseil. Histoire et dictionnaire raisonné des chefs du gouvernement en France (1815-2007), Paris, Perrin, 2007, 916 p., p. 346-347.
↑Revue du Louvre, Volume 28, Conseil des musées nationaux, [France], 1978 (réf. en ligne).
↑Jacques Basso, Les élections législatives dans le département des Alpes-Maritimes de 1860 à 1939, Paris, LGDJ, 1968.
↑Jean-Yves Mollier, Le scandale de Panama, Paris, Fayard, 1991.
↑ a et bJean Jolly, Dictionnaire des parlementaires français de 1889 à 1940.
↑Cette réplique est prononcée par Émile Beaufort, le personnage principal du film Le Président, de Henri Verneuil, en 1961. Dans l'hémicycle de la Chambre des députés, celui qui est alors le chef du gouvernement fustige le rôle des groupes de pression dans la politique menée par les gouvernements.